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« La cuisine japonaise historique a ceci de particulier qu’elle a longtemps utilisé le nuage comme un ingrédient majeur. L’impression aérienne que l’on garde souvent après un repas japonais vient du fait que le nuage est apprécié comme le summum des produits nobles. (…)
Produit digeste, non allergène et non gras, qui ne contient ni gluten ni sucre, et qui ne pose pas de problème de bilan carbone, le nuage est bien l’ingrédient du XXI° siècle.
Il est en outre très maniable, et son goût délicat se marie avec toutes les sauces. Vous constaterez qu’il peut tout aussi bien servir d’ingrédient principal que d’accompagnement.
Nous pouvons aussi apprécier le nuage comme produit du terroir, car les formes et les goûts diffèrent selon les régions -, de quoi augmenter les plaisirs gustatifs en voyage.
Une seule mise en garde : consommez-le avec modération dans les pays qui manquent de pluie…
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… Comment choisir un bon nuage ?
Produit sauvage par excellence, le nuage est le meilleur reflet de la nature. Il va sans dire qu’il vaut mieux le choisir le moins pollué possible. Certains nuages de campagne sont réputés pour leurs saveurs rustiques. Par ailleurs chaque saison a son nuage, certains nuages disparaissent du marché au bout d’à peine deux semaines. (…) Maniez avec précaution les nuages contenant des éclairs : ils peuvent laisser une légère sensation de picotement sur la langue, ou éclater lors de la friture…
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... De quoi se nourrissent les nuages ?
Certes il est rare qu’on la trouve relatée dans les livres de cuisine historiques, mais la légende veut que le meilleur nuage soit celui qui a mangé des oiseaux. Vibrant au palais, on raconte qu’il permettrait à qui le goûte de rêver, la nuit suivante, qu’il se transforme à son tour en être ailé… »
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Ce petit opuscule des Éditions de l’Épure est une vraie merveille, œuvre à six mains de Ryoko Sekiguchi, poétesse et traductrice japonaise, passionnée de cuisine, Sugio Yamaguchi, Chef cuisinier inventif et Valentin Devos, étudiant/designer à L’ENSCI de Paris.
Tout ici n’est que délicatesse, en attendant, pas de précipitation, restez bien à l’abri pour une dégustation de pure poésie et de grains de folie, et peut-être vous lancerez-vous comme je l’ai fait aujourd’hui dans l’une ou l’autre des recettes proposées par Sugio Yamaguchi…
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– CIEL « GRIZ » –
« Comme un nuage le riz est malléable, adopte mille texture,
abrite mille nuances de gris et de blanc. Il se sale ou se sucre, commence et termine les repas.
Rincez 100 g de riz rond et faites blanchir les grains pendant 5 mn dans de l’eau bouillante. Égouttez.
Portez à ébullition 40 cl de lait et 50 g de sucre. Lorsque les bulles éclatent à la surface du liquide, versez le riz blanchi et 5 gousses de vanille fendues en deux. Baissez le feu et laissez cuire doucement environ 45 mn, en remuant souvent pour que la nacre du riz colore le lait dans son sillage.
Goûtez et vérifiez que la cuisson des grains convient. Coupez le feu, couvrez votre casserole. Laissez refroidir à température, alors que la chaleur rémanente finit de cuire le riz à cœur.
Récupérez les gousses de vanille et déposez-les dans une autre casserole avec 10 cl de crème. Laissez infuser, passez au chinois et faites refroidir la crème parfumée avant de la monter à l’aide d’un fouet. Incorporez la crème dans le riz refroidi pour obtenir une préparation onctueuse et voluptueuse. Plongez une grande louche dans ce lait grisé par le riz, coloré comme un jour maussade où le réconfort viendrait d’un secret de grand-mère.
Chuuut ! »
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Extraits de : « le nuage – dix façons de le préparer » – 2019 – Ryoko Sekiguchi, Sugio Yamaguchi et Valentin Devos.
Illustrations : 1/ « Mont Fuji » Shimomura Kanzan 1873-1930 2/ et 3/ Photos BVJ.
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Se nourrir de tous les grains de poésie…
BVJ – Plumes d’Anges.