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« Le caractère particulier et distinctif de notre génération c’est l’esprit de système. Chacun a sa conviction arrêtée sur toutes choses, et suivant ses convictions, il construit dans son esprit un système de gouvernement, un système de croyance, un système physique, un système historique. L’un est républicain et l’autre est monarchiste ; l’un est catholique et l’autre anticatholique, et, partant de là, sans nulle autre recherche, il se fait un système sur le monde et un système sur l’histoire. Quelques uns ensuite pensent à faire des recherches, mais ils les font dans la ligne de leur conviction, et ils arrivent aux résultats que leurs convictions attendaient. Bien rare est l’homme qui se soucie uniquement de la vérité. Tous ont cet amour de la vérité dans la bouche ; tous prendraient volontiers pour devise veritatem diligo. Et ils ne sont pas de mauvaise foi ; seulement il arrive que l’éducation qu’ils ont faite à leur esprit l’asservit à quelque idée préconçue. Regardez nos plus grands érudits ; observez l’opinion générale que chacun s’est faite à l’âge de 20 ans, c’est-à-dire avant de commencer ses travaux d’érudition, et vous reconnaitrez que toutes les études qui sont venues depuis les ont conduits à des résultats qui s’adaptent à leurs opinions premières…
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Voir les choses telles qu’elles ont été a toujours été difficile et l’est plus que jamais à notre époque. En vain nos moyens d’investigation se sont perfectionnés ; en vain nous sommes plus convaincus qu’on ne l’a jamais été de la nécessité de la critique, en vain proclamons-nous plus haut que jamais l’indépendance de la science. C’est l’esprit de chacun de nous qui n’est pas libre, et il ne l’est pas, parce qu’il s’est fait sur des croyances avant de faire des recherches. »
Numa Denis Fustel de Coulanges 1830-1889.
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Je ne prétendrai pas ici parler de l’œuvre de Fustel de Coulanges, mais juste de ce texte retrouvé par hasard et qui m’a interpellée.
Dans le monde en perpétuelle évolution où une voix unique cherche à s’imposer, ne nous faudrait-il pas pour approcher la vérité – sans énoncer notre opinion – douter de tout, faire des recherches personnelles, remonter à la source première des textes, ne pas répéter un propos entendu sans l’avoir vérifié et étudié (chacun, sans mauvaise intention aucune, interprétant l’histoire) ?
À la fin, nous pourrions peut-être constater qu’il n’y a rien à affirmer, seulement observer, libérer notre esprit et proposer une force agissante pour nous élever ensemble… Qu’en pensez-vous ?
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Illustrations : 1/ « La peinture » 2/ « La sculpture » 3/ « L’architecture » Esquisses pour le décor de la porte des Beaux-Arts de l’exposition universelle de 1878 4/ « La céramique » Esquisse pour le décor de la façade de la manufacture Loebnitz – Musée de Beauvais – Huiles sur carton de Lazare Meyer 1847-1945.
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Tenter d’approcher une vérité…
BVJ – Plumes d’Anges.