Archive pour juillet 2016

Grande nuit…

jeudi 28 juillet 2016

.


.

« … Jourdan, tu te souviens d’Orion-fleur-de-carotte ?

– Je me souviens.

– Le champ que tu labourais, le tabac que tu m’as donné ?

– Je me souviens.

– Tu m’as demandé : « N’as-tu jamais soigné les lépreux ? »

Je me souviens comme d’hier. Tu m’as répondu : « Non, je n’ai jamais soigné les lépreux. »

– Tu trainais une grande peine.

– Oui.

– Plus de goût.

– Non.

– Plus d’amour.

– Non.

– Rien.

– La vieillesse, dit Jourdan.

– Tu te souviens, dit Bobi, de la grande nuit ? Elle fermait la terre sur tous les bords.

– Je me souviens.

– Alors je t’ai dit. : regarde là-haut, Orion-fleur-de-carotte, un petit paquet d’étoiles.

Jourdan ne répondit pas. Il regarda Jacquou, et Randoulet, et Carle. Ils écoutaient.

– Et si je t’avais dit Orion tout seul, dit Bobi, tu aurais vu les étoiles, pas plus, et, des étoiles ce n’était pas la première fois que tu en voyais, et ça n’avait pas guéri les lépreux cependant. Et si je t’avais dit : fleur de carotte tout seul, tu aurais vu seulement la fleur de carotte comme tu l’avais déjà vue mille fois sans résultat. Mais je t’ai dit : Orion-fleur-de-carotte, et d’abord tu m’as demandé : pardon ? pour que je répète, et je l’ai répété. Alors tu as vu cette fleur de carotte dans le ciel et le ciel a été fleuri.

– Je me souviens, dit Jourdan à voix basse.

– Et tu étais déjà un peu guéri., dis la vérité.

– Oui, dit Jourdan.

Bobi laissa le silence s’allonger. Il voulait voir. Tout le monde écoutait. Personne n’avait envie de parler.

– De cet Orion-fleur-de-carotte, dit Bobi, je suis le propriétaire. Si je ne le dis pas, personne ne voit ; si je le dis, tout le monde voit. Si je ne le dis pas, je le garde. Si je le dis  je le donne. Qu’est-ce qui vaut mieux ?

Jourdan regarda droit devant lui sans répondre.

– Le monde se trompe, dit Bobi. Vous croyez que c’est ce que vous gardez qui vous fait riche. On vous l’a dit. Moi je vous dis que c’est ce que vous donnez qui vous fait riche. Qu’est-ce que j’ai moi, regardez-moi.

Il se dressa. Il se fit voir. Il n’avait rien. Rien que son maillot et, dessous, sa peau. Il releva ses grands bras, agita ses longues mains vides. Rien. Rien que ses bras et ses mains.

– Vous n’avez pas d’autre grange que cette grange-là, dit-il en frappant la poitrine. Tout ce que vous entassez en dehors de votre cœur est perdu…

.


.

… S’il n’y avait pas de joie, il n’y aurait pas de monde. Ce n’est pas vrai qu’il n’y a pas de joie. Quand on dit qu’il n’y a pas de joie, on perd confiance. Il ne faut pas perdre confiance. Il faut se souvenir que la confiance c’est déjà de la joie. L’espérance que ça sera tout à l’heure, l’espérance que ça sera demain, que ça va arriver, que c’est là, que ça nous touche, que ça attend, que ça se gonfle, que ça va crever tout d’un coup, que ça va couler dans notre bouche, que ça va nous faire boire, qu’on n’aura plus soif, qu’on n’aura plus mal, qu’on va aimer… »

.


Extraits de : « Que ma joie demeure »  Jean Giono 1895-1970.

Illustrations : 1/« Nuit »  Edward Burne-Jones 1833-1898  2/« Blés » John Linnell 1792-1882.

…..

Fleurir notre ciel…

BVJ – Plumes d’Anges.

Balcons de brume…

lundi 25 juillet 2016

.


.

« J’écoute le vent

les grands coups d’ailes du corps invisible

mêlés à la mer, aux arbres et aux toits

à tout ce qui dans mon corps bat, ressent, respire

levant les eaux, fouillant les fonds –

brassant les feuilles de la pensée

toute cette eau amassée, pliée, rompue, précipitée

claquement de portes, la plainte étirée d’un pin

d’un très vieux pin courbé près duquel autrefois

des passants qu’on disait sages ou saints

poètes ou fous méditaient sur un balcon de brume –

entre eux et l’inimaginable

quelques battements de cœur -« 

.


.

« Clarté pieds nus dans l’herbe du matin

pensées et mots se lavent à la rosée

des mots qui sont nerfs, qui sont chair criés

désir sans borne de creuser encore

traverser déserts et montagnes

afin d’encore et encore revenir

à une source en soi plus proche que –

la peur, la joie d’aller à découvert -« 

.


.

« Il se tient debout

face à la mer

les yeux fermés

on dirait depuis toujours

comme s’il attendait

que telle une sève

la lumière monte

d’on ne sait quels fonds –

comme s’il avait compris

que ni les mots

ni les rayons ne suffisaient

pour voir vraiment »

.

.

Quand l’horizon se pare d’un vêtement de brume,

dans le paysage de la vie,

nous ne savons plus que dire, que faire, que penser…

Que nous est-il demandé ?

Peut-être de mieux observer ce et ceux qui nous sont proches,

peut-être de veiller au déploiement de la bienveillance ?

Peut-être…

Poèmes extraits de : « Patmos et autres poèmes » 2001 Lorand Gaspar.

Photos P.J. – Jardin et plage de l’Almanarre – juillet 2016.

…..

Déployer notre bienveillance, même dans la brume…

BVJ – Plumes d’Anges.

Joyaux…

jeudi 21 juillet 2016

.


.

« … Je me souviens, enfant, lorsque je revenais en ville après un séjour à la campagne, j’avais l’impression de perdre physiquement mes ailes. C’était comme un rétrécissement de tout mon être, un sentiment d’exil, d’isolement, de fermeture. L’exil n’est pas simplement géographique, c’est aussi l’impression intérieure d’avoir perdu quelque chose d’essentiel. Et j’avais perdu quelque chose d’essentiel. Ces ailes étaient les ailes de la joie, des ailes magiques qui s’épanouissaient dès que je me retrouvais au milieu des arbres, des lacs, des rivières, des montagnes. Habité par cette joie, la nuit, la lune et les étoiles m’apparaissaient sous leur vrai visage, comme des puissances magiques qui s’ouvraient dans le ciel nocturne, et le soleil était une divinité. Un univers vivant, un univers de joie…

.

… Il n’est pas recommandé de faire des efforts pour aimer les autres. Cela entraine toujours une réaction de l’ego qui n’aime pas être contraint. Les anciens Tibétains, qui avaient beaucoup d’expérience dans ce domaine, savaient que le mental a une parenté certaine avec le chameau, dans la mesure où il fait exactement le contraire de ce que l’on veut… Ne faisons pas d’effort pour aller vers les autres. Changeons d’abord nos émotions, notre vision du monde, notre regard et nous changerons notre relation aux autres.

Nous savons qu’en ressassant une pensée de haine, elle finit par s’imposer et par générer un acte de violence. Selon un processus équivalent, en cultivant une pensée de joie ou de sérénité, en se la remémorant souvent, celle-ci finit par s’inscrire dans les couches les plus profondes de la psyché et par produire des actions ou des paroles bénéfiques pour les autres. Les pensées d’amour, de compassion, de joie, de sérénité, tracent comme des sillons dans la terre de l’âme. Elles arrivent à faire partie de notre être et à devenir des composantes de notre caractère et à modifier notre comportement.

C’est sur ce principe que sont basés les exercices proposés par le bouddhisme des origines.

Ces exercices se nomment « méditations sur les quatre joyaux » ou « les quatre sentiments illimités ». Le disciple qui désire pratiquer cette méditation commence par cultiver cette joie en lui. Il la fait naître et la développe dans le secret de son être. Pour cela, il peut se remémorer un moment de joie, le revivre de la manière la plus intense possible. Chacun de nous a un souvenir de bonheur qui demeure présent dans sa mémoire. (…) Une fois que nous avons évoqué ce souvenir, nous isolons le sentiment de joie de la représentation qui lui est associée. Seule demeure l’émotion, sans l’image qui l’accompagnait ou la provoquait. Cette dissociation est plus facile à réaliser que nous pouvons le penser.

Puis nous choisissons une personne qui nous est chère pour lui envoyer une pensée de joie bienveillante. Nous pouvons visualiser cette joie bienveillante comme une substance lumineuse qui entoure et baigne cette personne. On opère de même avec un être qui nous est indifférent ou un ennemi… Ce qui peut être plus difficile.

Finalement, nous enveloppons dans cette pensée de joie bienveillante tous les êtres, « tous ceux qui respirent, tous ceux qui existent », les êtres attachés, pris par le désir, le plaisir, la soif de vivre, mais aussi les dieux et les habitants de l’enfer disent les textes bouddhistes. Le rayonnement de cette joie-compassion s’étend progressivement dans toutes les directions, l’est, l’ouest, le nord, le sud, le zénith et le nadir… »

.


Extraits de : « Petit traité de la joie » 2015  Erik Sablé.

Illustrations : 1/ « Paysage avec prairie »  Kyriak Kostandi 1852-1921  2/« La jeune fille à la rose »  Charles-Joseph Natoire 1700-1777.

…..

Changer notre relation au monde…

BVJ – Plumes d’Anges.

Jour parfait…

lundi 18 juillet 2016

.


.


.


.


.


.


.


.

« Il n’y a que deux jours dans une année où l’on ne peut rien faire.

Ils s’appellent hier et demain.

Pour le moment aujourd’hui est le jour idéal pour aimer, croire,

faire et principalement vivre. »

.

Paroles de  : Tenzin Gyatso XIVème Dalaï-lama.

Photos BVJ

...

JOIE DE PARTIR, JOIE DE REVENIR, JOIE DES SOUVENIRS, JOIE DES RETROUVAILLES…

AUJOURD’HUI, JOUR PARFAIT !

…..

Aujourd’hui est le jour parfait…

BVJ – Plumes d’Anges.


Utopie ?…

lundi 4 juillet 2016

.


.

« … L’affirmation souvent proposée : « Je suis les liens que je tisse », n’est pas seulement vraie pour les êtres humains, elle est valable pour tout élément du cosmos ; il ne peut être pensé hors du tissu des interactions…

.

… Si, comme on peut l’espérer, les richesses non renouvelables offertes par la nature sont enfin considérées comme appartenant à tous les humains, une des sources principales de conflits entre les nations aura disparu. Mais ce n’est pas suffisant ; aussi bien pour les individus que pour les collectivités, c’est notre regard sur l’autre qui doit être transformé. Nous avons le réflexe de voir en lui un danger, un adversaire potentiel. Notre crainte nous pousse à anticiper une possible agression. Le souvenir des conflits d’hier contribue à provoquer ceux de demain. Il est temps d’échapper à ce cercle vicieux. Pour cela, il faut apprendre que cet autre est une source. Notre effort doit être non de le combattre, mais de le rencontrer. Pour mettre un terme définitif aux guerres, la seul issue est de développer l’art de la rencontre.

Rappelons le constat d’Érasme : « On ne naît pas homme, on le devient. » Ce devenir est un processus qui métamorphose un petit homme, objet produit par la nature, en un sujet, une personne capable de se savoir être…

.

… Un humain face à un autre. (…) Force est de constater que notre société privilégie la fermeture. Elle présente la plupart des rencontres comme des occasions de confrontation, de lutte, de palmarès. Un exemple extrême est fourni par le sport. Quelles que soient les règles du jeu, chaque partie devrait provoquer une émulation, être un échange bénéfique, agréable, joyeux, pour tous ceux qui y participent ; l’attitude collective la transforme souvent en une compétition acharnée dont le seul but est de l’emporter, d’être le gagnant, donc d’imposer à l’autre le statut de perdant. (…) Rien ne nous oblige à prolonger cette lutte au cours des évènements qui sont la part spécifiquement humaine de notre vie : les échanges… « 

.


Extraits de : « Mon utopie »  Albert Jacquard 1925-2013.

Illustrations :1/Repos sur la montagne » 2/« Chutes d’eau et pêcheurs »  August Kessler 1826-1906.

Mes nouveaux « yeux » et mes gambettes m’emportent vers les montagnes,

quelle chance de pouvoir admirer leur splendeur et de rencontrer un autre monde,

belle semaine à toutes et à tous !

…..

Transformer une utopie en réalité…

BVJ – Plumes d’Anges.