Archive pour juillet 2022

Univers saturnien…

dimanche 31 juillet 2022

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« … Montée au refuge  La terrasse d’alpage fut vite traversée et l’on commença d’attaquer la vaste structure composite du flanc de montagne. Ull suivit d’abord un vague sentier qui ne tarda pas à disparaître sous la neige ; tout, à présent, en était recouvert. (Dans les rigoles plates et dans l’intervalle entre des pans de rocher d’inégales hauteurs.) La terrasse ne cessait de plonger vers le bas ; elle se faisait plus lisse encore, absolument lisse. Et voilà que l’éclat du petit jour frappait ce plateau d’une manière étrange : les mille petits cours d’eau (que l’on n’aurait pas remarqués plus bas), la surface des flaques gelées étaient comme des plaques métalliques arrondies par un emporte-pièce multiforme qui se détachaient sur le fond sombre ; certaines de ces plaques, de platine ou d’étain, dont les bords incurvés tissaient des entrelacs d’une incroyable finesse de tranchant, étaient parfaitement mates ; les autres, extraordinairement brillantes, émettaient une lumière intense, sans fluctuation aucune, ni vibration quelconque, sans l’ombre d’une teinte chaude ; leur clarté blanche et vive déchargeait d’un seul coup sa lumière et, tout éclatante qu’elle fût, cette clarté restait d’une dureté impitoyable. Cette continuité, cette infaillibilité sans nuances, était un trait propre aux terrifiants miroirs (qui ne reflétaient rien) et aux parements de métal mat. Que l’on se représente maintenant l’infinité de ces structures – et particulièrement des méandres formés par l’intense ramification des ruisselets – et qu’on les situe tous merveilleusement reliés entre eux sur la tonalité sombre de l’arrière plan – et l’on se sera fait une faible image du somptueux ouvrage de forge que ce plateau, basculant à l’abîme, offrait au regard froid du jour commençant…  »

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Deux hommes, Ull, un alpiniste chevronné et Johann,  un alpiniste qui l’est un peu moins, s’engagent dans l’ascension d’un glacier des Alpes. La météo s’avère mauvaise, les éléments se dressent contre eux, une sourde menace plane. Johann est tétanisé par la peur, il abandonne. Ull continue seul, il sait au fond de lui que c’est une folie mais il s’en va. Face à l’adversité, la personnalité profonde d’un individu se révèle. Une série d’épreuves les attend l’un est l’autre. La fin est…

Je ne vous dévoilerai bien sûr pas le dénouement de cette histoire.

J’ai été émerveillée par la description de la montagne et des situations que peuvent vivre les alpinistes quand tout se ligue contre eux. L’auteur fait preuve d’un tel réalisme, d’un tel sens du détail que l’on peut imaginer qu’il raconte du vécu. Il a, parait-il, écrit et réécrit ce roman plusieurs fois, pour trouver le vocabulaire le plus juste peut être. C’est du grand art, le résultat est à la fois glacial et brillant, on se retrouve vraiment aux côtés de ceux qui ascensionnent , on sent la rudesse des caractères, on vit les évènements, on imagine le roc acéré et cassant, l’atmosphère ténébreuse, l’effort, le froid, l’épuisement…

J’ai buté plusieurs fois sur des mots, l’auteur (ou le traducteur ) voulait-il insister sur la difficulté à avancer dans un tel contexte ? Là est un roman assez fascinant, d’une grande force dont je vous conseille vivement la lecture.

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Extraits de : « Ascension »  Ludwig Hohl  1904-1980.

Illustrations : 1/ et 2/« Crevasses et séracs dans le glacier du Mont Blanc »  Gabriel Loppé  1825-1913.

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Faire parler notre personnalité profonde…

BVJ – Plumes d’Anges.

Intelligence des fleurs…

dimanche 24 juillet 2022

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On la surnomme Belle aux cheveux dénoués ou encore Cheveux de Vénus,

nous dit Maurice Maeterlinck dans son Langage des fleurs

NIGELLA DAMASCENA,

une grande dame, d’une infinie poésie…

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Graines « aéroportées » depuis un pays voisin (merci A. et J-P.),

graines-offrandes accompagnant le merveilleux rite des bons vœux de l’an neuf,

graines semées joyeusement…

La première année, seules des tiges ornées de feuilles finement découpées virent le jour.

« Patience, patience » semblait dire la Nature, vous ne maitrisez pas tout,

vous ne pouvez décider de tout,

il faut être patient pour voir le miracle s’accomplir.

Une gestation, que dis-je, un réflexion souterraine devait se faire…

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La seconde année, le feuillage s’étoffa, là apparurent de précieux boutons.

Ils prirent bonne taille, une fleur, puis deux puis trois… naquirent.

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Les pétales d’abord blancs prirent une teinte d’un doux bleu qui s’accentua au fil des jours.

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Les Nigelles de Damas s’épanouissaient.

Pures beautés aux étamines dansantes, d’une sublime délicatesse,

elles nous accompagnèrent plusieurs jours et lentement se fanèrent.

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Elles se métamorphosèrent alors sous nos yeux ébahis

en petits ballons verts qui grossirent, grossirent puis séchèrent avec leur dentelle végétale.

De minuscules fentes apparurent,

dessinant au sommet de chaque capsule une étoile à cinq branches. 

Des graines brunes s’envolèrent…

Incroyable rythme, l’horloge cosmique est là, son cycle est parfait : magie toujours renouvelée, abondance.

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Si nous mettions nos plus belles idées en terre, si nous les cultivions amoureusement,

sans doute donneraient-elles aussi de précieux trésors.

L’Univers se plait à vibrer, soyons à son diapason.

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« La couleur du poème dépend de la quantité de lumière

Qui se réverbère en son encre.

Elle change au gré de l’heure, de l’age et de la langue.

 

Incolore au commencement, quand il n’est encore qu’une inspiration vague.

D’un blanc de page vide, il tend vers le gris en rêvant son encre prochaine.

Aube indécise sur le papier. Tels brouillards ou fumées qui montent.

C’est pourtant vers le bleu qu’il s’enlève le plus souvent.

Accroissant son ciel et son eau, entrouvrant sur la page une vague idée d’azur… »

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Jean-Michel Maulpoix – Extrait de : « La couleur du poème »

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Photos BVJ – 2022.

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Vivre dans l’harmonie du monde…

BVJ – Plumes d’Anges.

B A, BA… comme basilic…

lundi 18 juillet 2022

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– OCIMUM BASILICUM –

Plante aromatique très ancienne, originaire d’Inde et de Perse disent certains,

elle est riche en oligoéléments et antioxydants,

 contient de nombreuses vitamines,

améliore la digestion.

Des peuples antiques vantaient ses vertus pour guérir les plaies… 

Elle nous comble de plaisirs gustatifs durant la saison estivale.

Il y a plusieurs années,

je vous avais « livré » la sublime recette de Soupe au pistou de Julie ,

aujourd’hui ce sera celle du PESTO Italien,

trouvée dans un très beau livre dont je vous avais parlé > ICI,

elle accompagnera joyeusement un plat de pâtes en ces chaudes soirées d’été.

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– PESTO GENOVESE –

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Ingrédients (pour 400 g. de pâtes) :

70 g de feuilles de basilic, 30 g de pignons de pins, 45 à 60 g de parmesan, 20 à 40 g de pecorino, 1 gousse d’ail, 3 g de gros sel de mer, 40 à 60 ml d’huile d’olive.

Réalisation :

Laver et sécher les feuilles de basilic sans les froisser.

Dans un mortier, broyer l’ail et les pignons jusqu’à obtenir une crème (personnellement, je fais un peu griller les pignons). Ajouter alors quelques grains de sel et les feuilles de basilic, sans les tasser, pour remplir le mortier. Écraser le basilic avec un léger mouvement de rotation contre les parois. Quand le basilic laisse sortir son liquide vert clair, ajouter les fromages.

Verser l’huile d’olive en filet tout en mélangeant pour que la pâte devienne plus crémeuse. L’opération doit se terminer le plus vite possible pour éviter l’oxydation.

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L’auteur de cette merveille ajoute :

LA PETITE HISTOIRE

« On doit la première codification du pesto à Giovanni Battista Ratto, dans La cuciniera genovese publiée en 1863. Son ancêtre le plus illustre est certainement le moretum romain, une sorte de fromage enrichi en herbes aromatiques et broyé au mortier avec de l’huile, du vinaigre, des noix ou des pignons de pin, autant d’ingrédients dont la Riviera ligure regorge. Le pesto est aussi un descendant de l’agliata, une spécialité du Moyen Âge à base d’ail écrasé, agrémenté de poisson en Sardaigne, d’amandes et de ricotta en Sicile, de basilic en Ligurie. En dialecte génois, pesto se prononce « péstu » (participe passé du verbe génois pestâ, « piler »), qui a donné « pistou » en Provence (ail, basilic, huile d’olive). »

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Nous ne pensons pas, lorsque nous dégustons un met, que sa recette ait ainsi traversé le temps. Nous sommes habité(e)s des savoirs de nos ancêtres. Dans nos familles, il y a des recettes qui font voyage d’une génération à l’autre, comme des reliques précieuses, nous nous appliquons à les « réussir », c’est toujours émouvant. Parfois elles viennent de loin, elles ont été empruntées à un pays lors de belles vacances, elles génèrent alors une émotion de bien-être, de joie profonde, elles conversent comme les fils d’une étoffe, elles tissent de grands bonheurs…

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« Laissez votre vie danser avec légèreté sur les bords du Temps,

comme la rosée sur la pointe des feuilles. »

Rabindranath Tagore

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Recette extraite de : « ON VA DÉGUSTER L’ITALIE »  2020  François Régis Gaudry et ses amis.

Photos BVJ .

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Gratitude à l’égard des trésors transmis

de génération en génération depuis des siècles…

BVJ – Plumes d’Anges.

Haute voltige…

dimanche 10 juillet 2022

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« … Il y a deux siècles, Leopardi disait dans son Éloge des oiseaux que « les oiseaux sont par nature les créatures les plus joyeuses au monde. À chacun de leurs bonheurs, à chacune de leurs satisfactions ils se prennent à chanter ; plus ce bonheur et cette satisfaction sont vifs, plus ils mettent d’ardeur dans leur chant. »…

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Plus que tout vol peut-être, stupéfiants sont les vols groupés d’étourneaux qui forment des figures éblouissantes dans le ciel juste avant le crépuscule. Vastes respirations plastiques, formes qui se font et se défont dans une sorte de travelling métamorphique, qui se creusent en leur centre, s’étirent, se densifient, se dispersent, esquissent des chorégraphies tout en élans et en abandons. On dirait l’organisation acéphale d’un petit peuple sans chef, guidé par l’acquiescement secret de ses membres à tour à tour s’accorder et se désaccorder. Fluides, continus, liquides, ces vols transforment le ciel en une espèce d’écran océanique, et les nuées d’oiseaux en orages, en baleines ou en méduses lentement allongées. C’est un véritable concert plastique, des phrases en plein vol – qu’en anglais on appelle d’ailleurs du mot formidable de « murmurations « .

Les murmurations émerveillent, on en a tous fait l’expérience. On s’arrête, on est saisi, capté, heureux, on tente une photo, on entre dans le mouvement. Et la merveille peut aller plus loin : on dit que dans le Jutland, au Danemark, les nuées sont si massives et spectaculaires qu’elles en arrivent à occuper tout le ciel et à cacher le soleil. Les Danois parlent de « soleil noir », sort sol

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« Il bat de l’aile, il s’envole.

Il bat de l’aile, il s’efface.

Il bat de l’aile, il réapparaît.

Il se pose. Et puis il n’est plus.

D’un battement, il s’est effacé dans l’espace blanc.

Tel est mon oiseau familier,

L’oiseau qui vient peupler le ciel de ma petite cour.

Peupler ? On voit comment… »

Vers d’Henri Michaux« L’oiseau qui s’efface » – dans « La vie dans les plis » 1990.

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On s’intéresse aussi désormais à tout ce qui témoigne d’une plasticité des langues d’oiseaux : les phénomènes d’apprentissages, d’infléchissement stylistique, d’emprunts, d’accents, de dialectes, de régiolectes… L’alouette des champs par exemple (les chercheurs du Muséum l’ont récemment documenté) a un répertoire exceptionnel, de plus de 600 notes (contrairement au modeste coucou, qui en a deux), organisées en séquences régulières, comme des syllabes dans des phrases, qui sont autant d’informations sur sa provenance, son appartenance à un groupe, son humeur, ses besoins du moment… « Des renseignements délivrés qui sont à lire comme des codes empilés les uns sur les autres, la phrase de l’alouette n’étant pas linéaire. L’émotion, par exemple, est rendue par la rapidité des séquences chantées : quand les silences diminuent, notre alouette signifie à ses congénères qu’elle est en colère. Ainsi, pour parler alouette, il faut avoir un rythme précis (dans l’alternance des sons et des silences) et un bon tempo (à savoir le nombre des syllabes par unité de temps. En outre, l’alouette fait partie des passereaux, c’est-à-dire des oiseaux qui apprennent à chanter, dont le chant n’est pas fixé génétiquement à la naissance (contrairement aux tourterelles par exemple). L’alouette « apprend toute petite auprès de son tuteur, son père. Que celui-ci soit parisien ou provençal, elle reproduira l’accent paternel, par mimétisme ou par souci de bien faire ». Par attachement, en fait… »

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Marielle Macé nous dit que les oiseaux disparaissent, ils sont « déboussolés ».

 Aurions-nous cessé de les écouter et de les entendre ?

Fut un temps où nous avons cherché à nous en rapprocher,

voire même à les imiter.

Ces petits êtres sont un cadeau du ciel

alliant légèreté, joie et beauté.

Au fil des pages, l’auteure se fait oiseau, elle sautille d’un sujet avien à un autre,

par petits bonds, son érudition niche dans de nombreux domaines,

elle nous entretient de la virtuosité de ce joli monde,

 nous invite à l’écoute jubilatoire du chant mais pas que.

L’oiseau trouve sa place dans la philosophie, la poésie,

la musique, le langage, il crée un lien,

sorte de fil d’or inspiré et inspirant pour l’Homme. 

Ce livre est un enchantement, on y grappille de précieux savoirs.

C’est une lecture riche d’une énergie que je qualifierai de printanière,

laissez-vous surprendre, vous tomberez sous le charme…

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Extraits de : « Une pluie d’oiseaux »  2022  Marielle Macé.

Illustrations : 1/  2/  3/  Détails – Retable de Kate Elizabeth Bunce  1856-1927  – artiste peintre et poétesse – Église Saint Alban de Birmingham.

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Vibrer en mode oiseau…

BVJ – Plumes d’Anges.

Secrets remèdes…

lundi 4 juillet 2022

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Tout n’est-il pas reflet d’une réalité ? Rien n’est définitif,

la danse de la vie nous offre ses multiples chorégraphies…

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Sorte de conversation entre Ciel et Terre, de cœur à cœur,

langage éphémère et silencieux,

il faut de la présence à soi pour percevoir des mots, décrypter le message…

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Dans quelle souterraine chapelle serait caché le code qui nous donnerait accès au sens ?

Nul ne peut encore le dire, un jour, peut-être…

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S’attacher simplement à la seule beauté du moment,

à sa fragilité qui en fait un trésor, on le gardera en soi tel un bijou,

une perle rare. Précieuse mémoire…

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Le remède aux maux du monde semble simple,

il est lumière, poésie, couleurs, rêveries, parfums, sons…

Le Créateur puise en ses entrailles,

il restitue une succession d’Œuvres d’Art,

là est le divin cadeau,

gardons l’œil ouvert, transmettons, rayonnons…

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« Les mots que l’on n’a pas dits sont les fleurs du silence « 

Proverbe japonais (trouvé sur Instagram).

Photos BVJ – Alpes suisses et italiennes – Juin 2022.

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Sentir là, l’univers tout entier…

BVJ – Plumes d’Anges.