Archive pour octobre 2022

Luxuriance…

lundi 31 octobre 2022

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Printemps et automne dans un village perché où il doit faire bon vivre,

jardin de paradis, luxuriance de la végétation

qui invite les oiseaux à chanter et le poète à composer,

moment de contemplation, calme intérieur, incitation à la méditation…

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Nous devons parfois couper quelques branches

ou en soutenir d’autres pour entrevoir le bleu du ciel ,

  semer des graines d’amour encore et toujours,

la nature est la vie, c’est elle qu’il faut suivre ou aider et non le contraire,

tout y est parfait, tout a sa raison d’être, tout s’y déploie harmonieusement…

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Photos BVJ – Bormes-les-Mimosas – mars et octobre 2022.

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Choisir les lieux et les moments…

BVJ – Plumes d’Anges.

Incandescences…

lundi 24 octobre 2022

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« …↕À l’heure de mourir, Haru Ueno regardait une fleur et pensait : Tout tient à une fleur. (…)

Il savait qu’il serait mort bientôt et il se disait : Enfin, je suis accordé aux choses…

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… Au cours des siècles, des hommes avaient assemblé les bâtiments et les jardins, disposé les temples, les arbres et les lanternes et, à la fin, ce labeur patient avait engendré un miracle : en arpentant les allées, on se sentait tutoyer l’invisible. Beaucoup en créditaient le mérite aux présences supérieures qui hantent les lieux sacrés mais Haru, lui, avait appris des pierres de son torrent que l’esprit naît de la forme, qu’il n’y a rien d’autre que la forme, la grâce ou la disgrâce qui en résultent, l’éternité ou la mort contenues dans les courbes d’un rocher…

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Ainsi, Haru Ueno était né et mourrait en regardant un iris. Désormais, il le savait : pour être présent aux choses, il lui fallait naître ou mourir et cela, chaque fois, aurait lieu au jardin…

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À un moment, Keisuke s’adressa au frère d’Isao.

– Alors, Ieyasu, tu crois en la vie idéale ?

Bien-sûr, l’autre était trop soûl pour répondre.

– Elle n’existe pas, dit Keisuke. Ne juge pas trop sévèrement tes parents et tes frères, ils croient en ce qu’on leur a dit de faire plutôt que de faire ce en quoi ils croient et tant d’autres encore sont comme eux. Mais Isao, lui, ne croyait qu’en l’humanité et, pour cette raison, il était de ces hommes avec lesquels une vie idéale est possible…

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Au sol, une mousse épaisse, veloutée et presque phosphorescente, courait sur les racines et les pierres. Plus loin, une clairière abritait un étang d’où montaient les brumes légères de l’hiver. Tout autour, les branches noires de janvier calligraphiaient un poème secret. Haru s’enfonça dans le sous-bois et flâna sous les brisures de soleil pâle. Il s’arrêta, leva les yeux vers les frondaisons des cyprès et des érables nus. Ils sont immobiles mais ils engendrent la vie, pensa-t-il, alors que nous arrachons nos racines pour échapper à notre ombre. Puis, dans la lignée de ce qu’il avait compris en quittant ses montagnes après la mort de son père : ailleurs est ici, dans la transformation…

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… – Mais tout homme se représente la vie, dit Paul.

– Cette chienne, dit le potier. Tu crois qu’il y a beaucoup plus à en dire ?

Paul ne répondit pas.

– Et toi, demanda Keisuke à Haru, de quelle façon te la représentes-tu ?

– Comme la traversée d’un fleuve, répondit-il, un fleuve d’eau noire à force d’être profonde. Je ne peux en voir le fond mais il faut traverser tout de même.

Keisuke le regarda avec tendresse.

– Tu fais bien, dit-il, la rosée est sur l’autre rive… »

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C’est un roman publié en 2022 dont la suite a été publiée en 2020. Étrange non ?

C’est l’histoire d’Haru Ueno qui nous plonge dans les vieilles mémoires de sa vie. Il a quitté sa famille et ses montagnes, il vit à Kyoto où il est devenu un riche marchand d’Art très renommé. Il soutient et promeut le travail d’artistes, mène une vie où les rencontres féminines sont nombreuses mais ne vont pas loin, retrouvent ses amis chaque jour, le saké – la boisson des dieux – coule à flot…

Il habite une splendide maison de bois et de verre qu’il a lui-même dessinée, au bord d’une rivière face aux montagnes de l’est. Au centre, une cage de verre ouverte sur le ciel où un érable offre le divin spectacle des métamorphoses liées à la valse des saisons. Un soir, il fait la rencontre de Maud, une française à la chevelure flamboyante, ils partagent dix nuits exaltantes, elle quitte le Japon et rentre en France. Peu de temps après, il apprend qu’elle attend un enfant, une certitude s’installe en lui, c’est son enfant. Une vague d’amour déferle en lui instantanément. Maud confirme cette paternité mais lui interdit d’approcher cet enfant. Haru n’a pas d’autre choix, il supporte l’ultimatum, à sa façon…

Ce livre nous parle des mues successives de Haru, ce sont des bulles de poésie. J’ai aimé sa douceur, la profondeur de ses interrogations ; il poursuit sa vision du monde, cultive la beauté, l’amitié et l’amour inconditionnel de sa fille. Son quotidien est raconté par petites touches : méditations, balades, discussions amicales, joies et chagrins, apparitions surnaturelles. Tout est dit sur un ton égal, avec délicatesse et dignité, il cherche à éclairer le fil de la vie, cette vie qu’il accepte sans révolte. L’homme se questionne et questionne ses amis jusqu’à leur dernier souffle, jusqu’à son dernier souffle, ils s’enrichissent de toutes les réponses offertes…

J’aime infiniment Muriel Barbery, elle signe là un vrai roman japonais, dans un monde entre deux mondes.

Si vous voulez lire ou relire la suite, vous pouvez emprunter ce chemin

—>  « Une rose seule »

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Extraits de : « Une heure de ferveur »  2022 Muriel Barbery.

Illustrations : 1/« Mont Hiei »  3/« Phalènes »  Gyoshu Hayami  1894-1935   2/« Chrysanthèmes blancs »  Watanabe Shotei  1851-1918.

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Choisir la ferveur…

BVJ – Plumes d’Anges

Vie en osmose…

lundi 17 octobre 2022

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« … De la cime de la montagne au lac, la neige recouvrait une si grande partie de l’univers de la fille que, près de la moitié de l’année, tout ce qu’elle voyait en regardant par cette fenêtre était un paysage au repos sous un manteau blanc.

Et pourtant, quelle que soit la longueur de l’hiver, le printemps faisait suite, son arrivée douce et, quelque part, surprenante, telles les notes d’un chant d’oiseau au réveil ou le floc de la gouttelette de rosée tombée d’une branche. À mesure que la neige fondait, des rochers noirs, du lichen gris et un tapis de feuilles marron se détachaient de la palette auparavant uniforme du sol de la forêt, et les silhouettes minces, argentées des arbres commençaient à se parer de vert tendre sur le fond de ciguë et de sapins. Ces jours-là, la fille quittait la maison au matin avec son père pour étudier un nouveau monde qui jaillissait de la boue de la forêt et de l’eau au bord du lac…

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… Pour ses douze ans, son père lui offrit un ensemble de silex et d’acier dans une bourse en peau de chevreuil. Et tandis qu’ils se tenaient en haut de la montagne, ce matin-là, surplombant la forêt et le lac, il lui annonça qu’ils devaient commencer à se préparer pour un long voyage, décider ce qu’ils allaient emporter et, même s’il connaissait le chemin, étudier les vieilles terres qu’ils allaient parcourir sur le plan qu’il conservait plié dans un livre.

La fille se tenait à côté de la tombe de sa mère. Elle écouta puis demanda : Où sur les terres ?

Vers l’est, dit l’homme, et il désigna le soleil qui brillait, comme s’il s’était levé ce matin à cette seule fin. Vers l’océan. Après toutes les peaux qu’on a tannées et les poissons qu’on a pêchés, on a besoin de sel. La racine de pacanier ne suffit pas. Si on remplit deux de nos plus grosses gourdes d’eau de mer, ça fait assez de sel pour tanner la peau d’un lièvre.

Comment on en trouve ?

On prendra nos marmites, on fera des feux dans le sable, et on fera bouillir autant d’eau de mer qu’on pourra. On devrait se mettre en route pour rentrer d’ici l’équinoxe d’automne.

Il y a une piste qui mène à cet océan ?

Plus maintenant dit l’homme…

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L’ours retourna la fille du bout de son museau et lécha la croûte de sommeil et de sel dans ses yeux ; elle se réveilla au spectacle d’une éclipse de ciel floue, en forme de tête.

On est à la maison ? demanda-t-elle sans bouger, recroquevillée dans le sable, frissonnante.

Non répondit l’ours… »

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C’est un conte, un voyage au cœur d’une nature omniprésente. Les paysages, les plantes, les animaux sont les rois de l’histoire. 

Un homme et sa fille – on ne saura jamais leurs noms – vivent sur le flanc d’une montagne, « la Montagne isolée ». Nul voisin, nul autre être humain, on sent que quelque chose s’est passé mais on ne saura jamais quoi.

Quelques livres, une vitre héritée des grands parents, une carte sont leurs seuls liens avec le passé. Le père enseigne à sa fille tout ce qu’elle doit savoir pour vivre en totale autarcie, il lui apprend à ressentir les murmures de la vie, à prévoir et devancer les manques, il lui transmet ses connaissances.

Ils fabriquent leurs outils, leurs vêtements, pêchent, chassent uniquement quand c’est nécessaire à leur survie. Au fil de l’histoire, quelques pages de « l’avant » se racontent. Puis vient le moment d’un départ vers l’océan, pour en rapporter son précieux sel. Dans ce périple, un évènement change le cours des choses. 

Les descriptions des lieux, les émotions ressenties sont admirablement décrites. Le visible et l’invisible cohabitent, l’auteur nous offre une expérience singulière, il sait regarder et écouter. On ne peut s’empêcher de penser que vivre en harmonie avec la nature, avec sa douceur et sa rudesse,  et enseigner à l’enfant les apprentissages pour qu’il déploie ses ailes le plus sereinement possible, sont avec l’amour et la beauté, les seules choses importantes d’une existence.

Notre société consumériste veut tout gommer, on ne réfléchit plus, on laisse des machines le faire à notre place, on nous parle d’intelligence artificielle, on bétonne les sols, on entre en guerre… ne serait-ce pas total égarement ?

Je vous invite à lire ce petit livre, son propos est enrichissant, la réflexion qu’il suscite est profonde. Il n’y a aucune image négative, aucun coupable désigné.

Tout est au contraire lumineux, nous sommes seuls mais accompagnés, la fin est très émouvante…

Extraits de : « L’ours »  Andrew Krivak  2020.

Illustrations : 1/« Chute d’eau »  John Henry Twachtman  1853-1902  2/« Mont Monadrock »  Abbott Handerson Thayer  1849-1921   3/« Vagues »  Paul Richard Schumann  1876-1946  4/« Paysage de forêt »  Albert Bierstadt  1830-1902.

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Réapprendre à vivre…

BVJ – Plumes d’Anges.

Luna…

dimanche 9 octobre 2022

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Océan des Tempêtes, Marais du Sommeil…

Golfe de l’Amour, de la Rosée, du Succès…

Lac de la Bonté, de la Tendresse, de l’Espérance,

Lac des Songes, de l’Allégresse, de la Félicité…

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Mer des Nuées, des Humeurs, des Crises,

Mer des Ondes, des Pluies, des Écumes,

Mer de la Fécondité, de la Tranquillité, de la Sérénité…

De la poésie, encore et toujours !

Tous ces noms et bien d’autres encore

furent donnés par les astronomes après l’invention du télescope…

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Le MUSEUM OF THE MOON

est une œuvre itinérante de l’artiste Luke Jerram.

« Mesurant sept mètres de diamètre, la lune présente des images détaillées de la NASA à 120 dpi de la surface lunaire. À une échelle approximative de 1:500 000, chaque centimètre de la sculpture sphérique éclairée de l’intérieur représente 5 km de la surface de la lune. »

Suspendue en extérieur ou en intérieur, cette œuvre suscite diverses réactions,

elle ne laisse pas indifférent.

Installée pendant quelques jours dans L’église de la Madeleine à Aix en Provence (église fermée au public depuis seize ans). D’importants travaux de stabilisation et de consolidation y ont été réalisés, suivront des travaux  de restauration intérieure, l’ouverture définitive est prévue en 2025.

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Derrière cette énorme lune, apparait l’autel surmonté d’une voûte céleste constellée d’étoiles d’or.

De nombreuses fissures ont été colmatées, l’impression est étrange.

L’objet céleste, lui,  semble prêt à migrer vers d’autres cieux, le rêve peut continuer…

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« Fût-ce en mille éclats

Elle est toujours là –

La lune dans l’eau »

Ueda Chôshû

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Merci à Den d’avoir initié ce joli moment…

Photos BVJ – 6 octobre 2022.

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Fêter la pleine lune…

BVJ – Plumes d’Anges.

Éblouissements…

dimanche 2 octobre 2022

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« … La lagune et la gondole sont inséparables et se complètent l’une par l’autre. Sans gondole Venise n’est pas possible. La ville est un madrépore dont la gondole est le mollusque. Elle seule peut serpenter à travers les réseaux inextricables et l’infinie capillarité des rues aquatiques…

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La transparence du ciel, la limpidité des eaux, l’éclat de la lumière, la netteté des silhouettes, la force et la finesse du ton donnaient à cette vue immense une splendeur éblouissante et vertigineuse…

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… À certaines heures, quand l’ombre s’épaissit et que le soleil ne lance plus qu’un jet de lumière oblique sous les voûtes et les coupoles, il se produit d’étranges effets pour l’œil du poète et du visionnaire.

De fauves éclairs jaillissent brusquement des fonds d’or.

Les petits cubes de cristal fourmillent par places comme la mer sous le soleil.

Les contours des figures tremblent dans ce réseau scintillant ; les silhouettes si nettement découpées tout à l’heure se troublent et se brouillent à l’œil…

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… Que de temps, de soins, de patience et de génie, quelle dépense pendant huit siècles il a fallu pour cet immense entassement de richesses et de chefs-d’œuvre !

Combien de sequins d’or se sont fondus dans le verre des mosaïques ! Combien de temples antiques et de mosquées ont cédé leurs colonnes pour supporter ces coupoles !…

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Que de carrières ont épuisé leurs veines pour ces dalles, ces piliers et ces revêtements de brocatelle de Vérone, de portor, de lumachelle, de bleutine, d’albâtre roux, de cyphise, de granit veiné, de granit mosaïcain, de vert antique, de porphyre rouge, de porphyre noir et blanc, de serpentine et de jaspe !

Quelles armées d’artistes, se succédant de générations en générations, ont dessiné, ciselé, sculpté dans cette cathédrale !…

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Sans parler des inconnus, des humbles ouvriers du moyen âge que recouvre la nuit des temps, qui se sont ensevelis dans leurs œuvres, quelle liste de noms l’on pourrait dresser, dignes d’être inscrits sur le livre d’or de l’art !… »

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Images rapportées d’une échappée belle de 24 heures en cité de Venise.

où l’œil se doit d’être curieux pour traquer des détails insoupçonnés.

 Tourner quelques pages du merveilleux « Voyage en Italie » de Théophile Gautier,

où l’auteur se fait  virtuose de la description,

(je n’ai d’ailleurs pas trouvé le sens des mots bleutine et cyphise,

sont-ce là des inventions poétiques ?)

et de ce grand livre d’Art à ciel ouvert

dont on ne se lasse de découvrir les trésors,

mais qu’on abandonne volontiers pour retrouver le calme et la nature sauvage…

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Extraits de : « Voyage en Italie »  Théophile Gautier  1811-1872.

Photos BVJ – Venise – septembre 2022.

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Se laisser éblouir un instant…

BVJ – Plumes d’Anges.