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« … Beccafumi à Sarteano
Vous connaissez à la rigueur le peintre Domenico Beccafumi, mais sûrement pas le village de Sarteano, 5000 habitants, au sud de la Toscane et aux confins avec l’Ombrie, non loin de Panicale, dans la région de Montepulciano et de Pienza, ces joyaux de l’urbanisme Renaissance enchâssés dans un paysage de colline dont les pentes doucement inclinées sont enveloppées dans une brume que Paul Bourget a qualifiée de « violette »…
… Le corso Garibaldi se termine par la place où s’élève la modeste église S.Martino, reconstruite en style néoclassique sur l’emplacement d’un ancien édifice démoli, dont il ne subsiste que la cloche. Qui s’attendrait à y trouver, sur le mur de droite, un chef d’œuvre de la peinture du XVIème siècle ?
Le paysan Giacomo di Pace travaillait comme laboureur sur les terres du nommé Lorenzo Beccafumi, citoyen siennois, quand lui naquit, en 1486, un fils qu’il baptisa Domenico et envoya tout jeune garder les moutons. Tel Giotto, l’enfant s’amusait à dessiner sur des pierres ou dans le sable à l’aide d’un bâton appointé. Ayant remarqué les dons précoces du garçon, Lorenzo Beccafumi l’emmena à Sienne et le plaça dans l’atelier d’un peintre...
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… Pierro della Francesca à Monterchi
Cette fresque si célèbre n’aurait aucun titre à être rappelée dans ce livre, si elle n’était conservée dans un village difficile d’accès, qu’on n’atteint qu’au bout de routes escarpées et sinueuses, au milieu de montagnes inhabitées. Piero l’avait peinte, vers 1450, pour servir de retable au maître-autel de la petite église Santa Maria della Momentana, située sur les pentes de la Citerna, au-dessous de l’éperon sur lequel est bâti le village fortifié de Monterchi, à quelques 25 kilomètres à l’est d’Arezzo…
… Les deux anges aux cheveux courts fixent le spectateur de leurs yeux grands ouverts, dont le regard intense est pourtant vide…
… Quant à la Madone, sereine et majestueuse, mais à la fois pensive et modeste, elle abaisse ses pupilles, vides et absentes, sous des paupières lourdes tracées d’une ligne sinueuse…
… Sur son beau front poli, avec sa bouche petite et resserrée, sa main droite posée sur son ventre pour indiquer le mystère de l’Incarnation dans son corps est le lieu, avec son port de reine, la Madone est ici et en même temps ailleurs, devant vous et très loin de vous dans un lointain inscrutable…
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En ce moment délicat du confinement, il nous faut trouver de possibles belles échappées. Nous avons une chance incroyable, celle de pouvoir voyager dans notre tête, imaginer, imaginer encore, des lieux, des situations, nous laisser envahir avec bonheur et délectation.
Plus de concerts, de théâtres et de cinémas ouverts ? Il nous reste encore les livres dont les sujets nous portent vers d’autre mondes.
Là, une balade du sud au nord de l’Italie, la balade d’un érudit qui a déniché des pépites artistiques souvent méconnues et pourtant réalisées par des peintres ou des sculpteurs célèbres. Son propos est passionnant, il resitue les œuvres dans leur contexte, raconte l’Histoire, raconte des histoires. On sent le passionné d’Italie, le discours est joyeux, jamais ennuyeux, bien au contraire, on se surprend à prendre des notes pour un voyage prochain – quand ? plus tard !
Les illustrations sont en noir et blanc, de petite taille. J’ai trouvé intéressant lors de cette lecture de faire apparaitre ces œuvres ou ces lieux sur mon écran d’ordinateur.
Ah, vous voyez, nous ne sommes pas si confinés que cela,
nous avons tous de petites réserves si nous cherchons bien, non ?…
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Extraits de : « L’Italie buissonnière » 2020 Dominique Fernandez.
Illustrations : 1/« L’Annonciation » Domenico Beccafumi 1446-1551 2/« Madonna del Parto » Piero della Francesca entre 1412 et 1420-1492.
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Se fixer sur le possible et non sur l’impossible…
BVJ – Plumes d’Anges.