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« Fabienne Verdier – Rétrospective
Cette exposition présente l’œuvre d’une arpenteuse qui dresse une cartographie inédite : celle des flux d’énergie qui traversent l’univers, notre cerveau ou le langage, et modèlent les paysages qui nous environnent. De la France à la Chine, en passant par New York, les fjords de Norvège ou le fleuve Saint Laurent au Québec, Fabienne Verdier parcourt la planète pour saisir le monde dans sa dimension spontanée. À 20 ans, elle observe à Toulouse le vol des oiseaux, puis part en Asie près de dix ans (1983), pour comprendre le mouvement qui les anime auprès des derniers maîtres de la peinture traditionnelle, Fabienne Verdier doit quitter la Chine suite aux évènements de la place Tiananmen, puis y revient. Atteinte d’une grave maladie, elle rentre en Europe à 30 ans et pendant quinze années se retire, imagine une nouvelle façon de peindre. Elle conçoit en 2003 un pinceau monumental et bâtit autour de lui un atelier. Elle devient un corps-pinceau. L’artiste collabore avec des scientifiques (astrophysicien, linguiste, neuroscientifique) et des musiciens, pour saisir les forces qui engendrent les formes. Cette expérience musicale, commencée en Amérique en 2014, est poursuivie à Aix-en-Provence avec quatre quatuors à cordes. Le directeur du musée Granet lui propose alors de venir travailler sur le motif. L’artiste construit un atelier nomade pour se confronter au vent, au soleil, à la pluie et à la grêle : sur les terres de Cézanne. »
(page 1 du Guide du visiteur)
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« … Je vous pose maintenant cette question toute simple : avez-vous de la difficulté à trouver le chemin de la paix intérieure et à être sans vouloir ?
Ami poète, je m’en vais vous répondre ce matin sans savoir où aller… Alors, j’erre dans le jardin à l’heure bleue du ciel, passant de pierre en pierre sur le sentier qui me mène à l’atelier. Dans l’apparente banalité du jour, je hume l’air frais, et qui vient me taquiner ? Des flocons de neige à profusion. Avec une sorte de gaieté première, j’accueille la neige. Je suis en béatitude, m’attardant à contempler les choses telles qu’elles sont. La plus petite manifestation ne révèle-t-elle pas la vérité tout entière ?
Voilà peut-être le « être sans vouloir », c’est ce « laisser-aller comme la vie va »… C’est une disposition intérieure matinale de base pour la peinture. Suivre le destin, la respiration du jour, une adhésion totale à l’instant, à l’univers vivant. (…)
Après cette sorte d’errance et une inspiration profonde, l’esprit délié, nourri par la réalité du jardin, je suis prête pour l’expiration profonde et la transmission possible au pinceau. La peinture, c’est une belle histoire de respiration.
Cela paraît si simple ! mais croyez-moi pour parvenir à « être sans vouloir », cela demande une activité intense, l’air de rien. La peinture exige cet autre état de conscience pour agir à partir de l’essence. Un sans-vouloir naturel, libéré de la pensée raisonnante, de la raison analytique, des dogmes moraux, des automatismes de perfection, de la préoccupation des apparences. Il s’agit bien de tout oublier de cet état d’être là. Oublier ce que l’on veut être, car c’est un frein au destin. Oublier ce que l’on croit être car c’est une prison qui ne nous laisse que peu de chances de découvrir nos territoires inconnus.
Teilhard de Chardin nous invite pourtant à « Être plus ». Le « non vouloir », n’est-ce-pas la pratique secrète de la recherche de « l’être véritable » dans une attitude première de « non-être » ?
Celui qui m’a fait comprendre cette idée ô combien déroutante – ce n’est que récemment que j’arrive à la mettre en pratique dans ma vie quotidienne -, c’est ce génial cordonnier d’un petit village en Allemagne du XVII° siècle, maître Jacob Böhme, qui dit : « Lorsque tu te tiens dans le repos du penser et du vouloir de ton existence propre, alors l’ouïe, la vue et la parole éternelles se manifestent en toi… »… »
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Extrait d’un très beau livre : « Entretien avec Fabienne Verdier » 2007 Charles Juliet.
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Comment parler de Fabienne Verdier, les mots la limitent elle qui touche par son être et par son œuvre au cosmique. Elle avait écrit en 2003 ce superbe livre « Passagère du silence« , dans lequel elle nous expliquait son cheminement, son dur apprentissage pendant 10 années en Chine. Elle continue d’explorer le monde, tente d’en trouver les lignes d’énergie du moment, chemine dans une démarche spirituelle et fixe des instants d’impermanence des choses.
Il y a à l’origine de ses créations, une observation, des recherches, des lectures, une réflexion, une méditation, il y a la lente élaboration des fonds, leur taille, leur texture, leur couleur vibrante… Puis encore une observation, une réflexion, une méditation, elle se défait de tout et capte alors un souffle, la matière se sculpte, vide, plein, lumière, obscurité, mat, brillant… engagent un dialogue.
Face à ce travail on ressent l’envie de faire silence, on regarde et on voit, on entre dans d’autres mondes, on se fond dans l’œuvre qui nous revivifie.
C’est une superbe exposition organisée par le Musée Granet à Aix-en-Provence, jusqu’au 13 octobre 2019. Elle « s’étire » dans deux autres lieux aixois : Le musée du Pavillon Vendôme et la Cité du livre – Galerie Zola, à suivre…
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Photos BVJ : 1/et 4/ « Manifestation 1 et 2 – Entre ciel et terre » 2005. 2/et 3/ « L’esprit de la montagne » 2017-2019. 5/ et 6/ « Les maîtres flamands » 2009-2013 Fabienne Verdier.
D’autres chemins pour la rejoindre…
« Passagère du silence » 2003 Fabienne Verdier.
Une interview de Fabienne Verdier.
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Inspirer, expirer, vibrer…
BVJ – Plumes d’Anges.