Archive pour mai 2014

Correspondances…

vendredi 30 mai 2014

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« … Cher Dieu.

Merci d’être venu…

J’ai compris que tu étais là. Que tu me disais ton secret : Regarde chaque jour le monde comme si c’était la première fois. Alors j’ai suivi ton conseil et je me suis appliqué. La première fois. Je contemplais la lumière, les couleurs, les arbres, les oiseaux, les animaux. Je sentais l’air passer dans mes narines et me faire respirer. J’entendais les voix qui montaient dans le couloir comme dans la voûte d’une cathédrale. Je me trouvais vivant. Je frissonnais de pure joie. Le bonheur d’exister. J’étais émerveillé. Merci, Dieu, d’avoir fait ça pour moi. J’avais l’impression que tu me prenais par la main et que tu m’emmenais au cœur du mystère contempler le mystère. Merci…

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… Cher Dieu…

J’ai essayé d’expliquer à mes parents que la vie, c’était un drôle de cadeau. Au départ, on le surestime, ce cadeau : on croit avoir reçu la vie éternelle. Après, on le sous-estime, on le trouve pourri, trop court, on serait presque prêt à le jeter. Enfin, on se rend compte que ce n’était pas un cadeau mais juste un prêt. Alors on essaie de le mériter. Mais moi qui ai cent ans, je sais de quoi je parle. Plus on vieillit, plus faut faire de preuve de goût pour apprécier la vie. On doit devenir raffiné, artiste… »

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Extrait de : « Oscar et la dame rose » 2002   Eric-Emmanuel Schmitt.

Illustrations : 1/« Bajirao Mastani » Peinture Moghole XVIIIème  2/Illustration du livre « Was soll ich werden » Lothar Meggendorfer 1847-1925.

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Demander pour être entendu…

BVJ – Plumes d’Anges.

Va…

mercredi 28 mai 2014

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« Va devant toi et si le monde que tu cherches n’existe pas,

il jaillira tout exprès de l’onde pour justifier ton audace. »

Friedrich von Schiller 1759-1805.

Illustration : « Globes terrestre et céleste »  Tobias Conrad Lotter 1717-1777

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Vers où aller ? Vers le rêve et la poésie, ils seront sources d’inspiration…


BVJ – Plumes d’Anges.

Prodige…

lundi 26 mai 2014

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« … Est-il temps de lancer ma barque ? Les languissantes heures s’écoulent sur la plage – hélas pour moi !

Le printemps a donné sa floraison puis dit adieu. Et maintenant, chargé de vaines fleurs fanées, j’attends et je m’attarde.

Les vagues sont devenues bruyantes ; au delà de la berge, dans le sentier plein d’ombre, les feuilles jeunes palpitent et tombent.

Quelle absence contemples-tu ? Ne sens-tu pas un frémissement traverser l’air, avec le chant lointain qui monte et fuit l’autre plage ?…

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… Là où l’esprit est sans crainte et où la tête est haut portée ;

Là où la connaissance est libre ;

Là où le monde n’a pas été morcelé entre d’étroites parois mitoyennes ;

Là où les mots émanent des profondeurs de la sincérité ;

Là où l’effort infatigué tend les bras vers la perfection ;

Là où le clair courant de la raison ne s’est pas mortellement égaré dans l’aride et morne désert de la coutume ;

Là où l’esprit guidé par toi s’avance dans l’élargissement continu de la pensée et de l’action –

Dans ce paradis de liberté, mon Père, permets que ma patrie s’éveille… »

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Extraits de : « L’offrande lyrique (21 et 35) »  Rabindranath Tagore 1861-1941.

Tableaux : 1/« Pêcheurs en barque sur une mer calme »  Anton Laurids Johannes Dorph 1831-1914  2/« Coucher de soleil dans un fjord »  Peder Mork Monsted 1859-1941.

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Se réveiller, laisser la lumière inonder notre cœur et notre esprit…

BVJ – Plumes d’Anges.

Note joyeuse…

vendredi 23 mai 2014

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« … Le Prince Zaphir était si bon et si tendre que jamais il ne blessait de chose vivante. S’il voyait un ver ramper sur la route devant lui, il l’enjambait avec précaution pour ne pas lui faire de mal. S’il voyait une mouche qui était tombée à l’eau, il l’en sortait avec tendresse et la renvoyait dans l’air glorieux et lumineux, de nouveau libre de ses ailes ; il était si gentil que tous les animaux qui l’avaient déjà vu le reconnaissaient ensuite, et lorsqu’il allait dans le bois s’asseoir à sa place préférée, de toutes les choses vivantes une joyeuse rumeur montait jusqu’à lui. Ces insectes brillants, dont les couleurs changent d’une heure à l’autre, se paraient de leurs couleurs les plus étincelantes et se chauffaient aux rayons lumineux qui tombaient entre les branches des arbres. Les insectes bruyants mettaient leur cache-nez pour ne pas les déranger ; et les petits oiseaux qui se reposaient sur les arbres ouvraient leurs yeux ronds et brillants, sortaient dans la lumière, clignotaient des paupières, faisaient des clins d’œil et pépiaient leurs petites chansons de bienvenue avec les notes les plus douces.

Il en va toujours de même avec les personnes tendres et aimantes ; les choses vivantes qui ont des voix aussi douces que celles des hommes et des femmes, et qui ont leurs propres langages, bien que nous ne puissions pas les comprendre, toutes s’adressent à elles avec des notes joyeuses et leur souhaitent la bienvenue avec leurs propres et jolies façons…

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… Les enfants qui voudraient devenir des hommes bons et grands, ou des femmes bonnes et nobles, devraient essayer de bien connaître tous ceux qu’ils rencontrent. Alors ils se rendraient compte qu’il n’est personne qui n’ait en soi beaucoup de qualités ; et quand ils verraient quelque grande sottise, ou quelque méchanceté, ou quelque couardise, ou quelque défaut, ou quelque faiblesse chez une autre personne, ils devraient soigneusement s’examiner eux-mêmes. Ils verraient alors qu’eux aussi peut-être souffrent du même défaut qu’ils devraient chercher à vaincre – même si celui-ci ne se manifeste pas forcément d’une manière semblable. Ainsi ils deviendraient meilleurs tout en grandissant… »

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AH ! LES MAMANS, LES ENFANTS…

UNE VIEILLE ET BELLE HISTOIRE À ÉCRIRE ET RÉÉCRIRE SANS CESSE…

BONNE FÊTE À TOUTES LES MAMANS,

QU’UNE NOTE JOYEUSE ILLUMINE LEUR CŒUR !


Extrait de : « Au-delà du crépuscule – Le Prince à la rose (Nouvelle) » Bram Stoker 1847-1912.

Illustrations : 1/« Illustration d’un conte de fée de H.C.Andersen William Heath Robinson 1872-1944  2/« Fleurs de pois »  Edward Poynter 1836-1919.

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Devenir meilleur en grandissant…

BVJ – Plumes d’Anges.

Hymne à la paix…

mercredi 21 mai 2014

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« … « Croire quand même,

Espérer quand même,

Aimer quand même. »…

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… Il est en vérité tout à fait scandaleux d’avoir à constater qu’en l’an de grâce 1991, des hommes qui se prétendent pourtant « civilisés » n’aient pas encore su trouver d’autres remèdes aux conflits entre peuples que la violence et la guerre, procédés dont une expérience multiséculaire aurait dû, depuis longtemps, nous révéler l’inefficacité. Avec leur dicton Si vis pacem, para bellum, les pauvres Romains ont, en réalité, fait la guerre pendant deux siècles et demi.

La véritable maxime, celle que les hommes devront adopter demain, s’ils ne veulent pas risquer de disparaître, est : Si vis pacem, para pacem

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… Ma récente réponse à un plaisant me demandant ce que je ferais si j’étais président de la République devait être la suivante :

– je commencerais par remplacer le ministère de la Guerre, dit de la « Défense », par un ministère de la Paix ;

– je déclarerais solennellement la paix au monde ;

– je ferais activement travailler à la reconversion des industries d’armement, de façon que le mot « désarmement », qui n’évoque jusqu’ici que des possibilités lointaines et sans cesse volontairement reculées, finisse par devenir rapidement une réalité effective.

Comment imaginer qu’un pays se disant foncièrement pacifique puisse tolérer que son hymne national possède un refrain à la fois raciste et sanguinaire ? Il y aurait donc, comme on le fait chanter aux bambins de nos écoles, un sang « impur » dont il serait nécessaire d' »abreuver nos sillons » ? Bel idéal évidemment de fraternité universelle ! …

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… La symphonie n’est-elle pas faite de la variété des instruments, comme l’harmonie du tableau des polychromies de la palette ? La beauté et la richesse d’un ensemble ne reposent-ils pas sur une juxtaposition, sur une mise en commun d’objets discrets, séparés mais rapprochés dans un même concert et jouant « à l’unisson » ?…

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… Soyez réalistes ;

demandez l’impossible !… »

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Extraits de : « Et si l’aventure humaine devait échouer »  Théodore Monod 1902-2000.

Tableaux : 1/« Musicien »  Christian Wilhelm Steendorff 1807-1904   2/ »Jeune femme au piano »  François Gauzi XXème .

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Les mots de paix attirent la paix, les mots d’amour attirent l’amour…

BVJ – Plumes d’Anges.

Interdépendance…

dimanche 18 mai 2014

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« Si vous êtes poète, vous verrez clairement un nuage flotter dans cette feuille de papier. Sans nuage, il n’y aurait pas de pluie ; sans pluie, les arbres ne pousseraient pas ; et sans arbre, nous ne pourrions pas faire de papier. Le nuage est essentiel pour que le papier soit ici devant nous. Sans le nuage, pas de feuille de papier. Ainsi, il est possible de dire que le nuage et la feuille de papier « inter-sont ». Le mot « inter-être » ne figure pas encore dans le dictionnaire, mais en combinant le préfixe « inter » et le verbe »être », nous obtenons un nouveau verbe, inter-être. Sans nuage, nous n’aurions pas de papier ; nous pouvons donc dire que le nuage et la feuille de papier inter-sont.

En regardant encore plus en profondeur dans cette feuille de papier, nous y voyons aussi le soleil. Sans soleil, la forêt ne pourrait pousser. En fait, rien ne pourrait pousser, nous ne pourrions nous développer. Par conséquent, nous percevons aussi la présence du soleil dans cette feuille de papier. Le papier et le soleil inter-sont.

En continuant d’observer, nous découvrons également le bûcheron qui a coupé l’arbre et l’a amené à la fabrique de papier. Et nous voyons aussi le blé : nous savons que cet homme n’aurait pu vivre sans son pain quotidien. C’est pourquoi le blé qui a servi à la confection du pain dont s’est nourri le bûcheron, est présent dans cette feuille de papier. Et le père et la mère du bûcheron y sont également. Si nous observons de cette manière, nous remarquons que, sans tous ces éléments, cette feuille de papier ne pourrait exister.

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En examinant encore plus profondément, nous y découvrons aussi notre présence. Ce n’est pas difficile à voir : lorsque nous regardons cette feuille, celle-ci fait partie de notre perception. Votre esprit s’y trouve et le mien aussi. Par conséquent, nous pouvons dire que tout est présent dans cette feuille de papier. Il vous sera impossible de me montrer une seule chose qui n’y soit pas – le temps, l’espace, la terre, la pluie, les minéraux du sol, le soleil, le nuage, la rivière, la chaleur… Tout coexiste avec cette feuille de papier. Voilà pourquoi je pense que le mot « inter-être » devrait être dans le dictionnaire. « Être, c’est inter-être ». Vous ne pouvez pas « être » simplement par vous-même. Vous devez forcément inter-être avec toutes les autres choses. Cette feuille de papier est parce que tout le reste est.

Supposez que nous essayions de retourner un seul de ces éléments à sa source. Supposez que nous renvoyions sa lumière au soleil. Pensez-vous que l’existence de cette feuille de papier soit alors possible ? Non, sans la lumière du soleil, rien ne peut exister. Si nous retournions le bûcheron à sa mère, nous n’aurions pas non plus de papier. Le fait est que cette feuille est uniquement constituée d’éléments « non-papier », et que, si nous retournions ces éléments « non-papier » à leurs sources respectives, il n’y aurait alors plus de papier du tout. Sans ces éléments « non-papier », tels que l’esprit, le bûcheron, la lumière du soleil, etc., il n’y a plus de papier. Aussi fine que soit cette feuille, elle contient en elle-même tout l’univers. »

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Extrait de : « Le cœur de la compréhension » Éditions Village des pruniers Thich Nhat Hanh.

Illustrations sur papier : 1/« Trompe l’œil » (aquarelle)  Anonyme italien XIXème  2/ et 3/« Arbre à laque – Feuilles et fleurs »  Nathaniel Wallich 1791-1878.

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Veiller à l’équilibre du tout…

BVJ – Plumes d’Anges.

Lune éclatante…

mercredi 14 mai 2014

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« Il n’y a personne qui soit né sous une mauvaise étoile,

il n’y a que des gens qui ne savent pas lire le ciel. »

Tenzin Gyatso – 14ème Dalaï-lama.

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N’avons-nous pas toujours le choix d’emprunter les chemins d’AMOUR, de SAGESSE et de LUMIÈRE, ou les chemins contraires ?

Illustration : « Pleine lune et lapins »  Anonyme – Corée XIXème.

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Ouvrir nos yeux sur le ciel…

BVJ – Plumes d’Anges.

Chant de la Terre…

lundi 12 mai 2014

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« … Il y a une vingtaine d’années donc, je voyageais dans la forêt du Darién panaméen, non loin de la frontière avec la Colombie, près des sources d’un fleuve appelé Tuira, et j’ai fait connaissance avec un peuple indien qui m’a enseigné quelque chose qu’aucun livre, aucune philosophie n’aurait pu m’apprendre…

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… Les Waunanas… Ces hommes pratiquent un rite millénaire chargé de sens et d’émotion, qui concerne tous les hommes de la terre. Régulièrement, pour célébrer le dieu suprême Hewandama, créateur de la terre et des hommes, ils se réunissent, venus de tous les points de la forêt, hommes, femmes, enfants, vieillards. Ils teignent leur corps de noir, avec le suc du fruit kipar, la Genippa americana. Les hommes mettent des pagnes blancs, les femmes des jupes blanches, la couleur de leur dieu. Ils se réunissent autour d’une grande pirogue en bois de balsa, suspendue par des cordes à quatre poteaux de bois. Puis ils commencent à danser au son des flûtes de Pan et des tambours d’eau, girant lentement autour de la pirogue, hommes, femmes, enfants, vieillards, s’inclinant vers elle et frappant sa coque avec des bâtons de bois. Pendant des heures, jusqu’à la nuit, la clairière dans la forêt retentit de cette musique étrange, les chants monotones, les accents de la flûte, et les coups sourds sur la coque de la pirogue comme le rythme d’un tambour géant. Ils dansent et font leur musique à la manière d’une prière, pour que Hewandama n’anéantisse pas de nouveau la terre par le déluge. Ils savent que Hewandama est irrité par la méchanceté et l’impiété des hommes et que, comme autrefois, il peut à chaque instant décider d’en finir avec ses créatures, ouvrir les vannes du ciel et des fleuves pour anéantir l’univers tout entier. Au fond de la forêt, les Waunanas sont les seuls à connaître la menace qui plane sur le monde. Ils prient à leur manière, en dansant autour de la pirogue magique, seul souvenir du premier déluge, pour que Hewandama ne cède pas à la colère et épargne tous les vivants, animaux et hommes.


Il y a quelque chose de touchant, de troublant dans ce rite. Ce peuple, l’un des plus isolés et des plus démunis de la terre, cette poignée d’Indiens ignorés et dédaignés du monde moderne, vivant au cœur de la forêt, ignorant tout ce qui secoue et déchire la civilisation occidentale, ignorant les découvertes extraordinaires de la science, et aussi le mal total qui peut en résulter, ces hommes ont néanmoins reçu, comme une grâce divine, l’intuition de la destruction imminente du monde, et en même temps le pouvoir d’un exorcisme, l’idée d’un salut. Ils ont la volonté et la foi pour sauver tous les hommes, et pas seulement eux-mêmes. Ils font leur danse et leur prière, sans emphase, sans orgueil, simplement, comme ils vivent, car ils savent que s’ils ne le font pas, s’ils ne dansent pas autour de la pirogue magique pour prier Hewandama d’épargner le monde, qui d’autre le fera ?

Que peut un écrivain contre le nouveau déluge qui menace le monde actuel ? Que peut un homme, n’importe quel homme, contre la mort thermonucléaire que la science a su inventer pour mieux se détruire elle-même ? Que peut un homme, ici, dans les villes d’Europe ou d’ailleurs, pour tenter de sauver les matins du monde ? Mais peut-être qu’il peut, comme les Waunanas de la forêt, simplement danser et faire sa musique, c’est à dire parler, écrire, agir, pour tenter d’unir sa prière à ces hommes et ces femmes autour de la pirogue. Il peut le faire, et d’autres entendront sa musique, sa voix, sa prière, et se joindront à lui, écartant la menace, se libérant d’une destinée malfaisante.

Écrivons, dansons contre le nouveau déluge. »

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Extrait de : « La fête chantée » 1997  J.M.G. Le Clézio.

Illustrations : 1/« Loddigesia mirabilis – Planche 161 – Histoire naturelle des Colibris »  John Gould 1804-1881  2/« Forêt au coucher du soleil »  Albert Bierstadt 1830-1902 3/Carte du « Carte du Darien panaméen » extraite de « Une description de l’Isthme du Darien » 1699.

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Unir notre voix au chant de la Terre…

BVJ – Plumes d’Anges.

Belles découvertes…

vendredi 9 mai 2014

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« Ça bavarde les choses faut pas croire faut écouter leur mutisme bavard se taire pas parler dessus non seulement se taire et les écouter ça s’agite dans le souterrain des fossoyeurs ça cause partout c’est secret bien sûr ça parle une langue qu’on ne comprend pas qu’on ne comprend plus mais on saisit des bribes parfois quand on se tait ça rentre pas par les oreilles de la tête ça rentre par ailleurs par le corps par les pieds par les doigts faut se taire et écouter ce murmure ça parle doucement comme avec un mouchoir dans la bouche ou un chiffon sur les lèvres ça crie pas ça murmure mais ça s’entend dans le silence il faut attendre attendre parfois longtemps guetter ne rien faire se rendre disponible scruter s’enfouir dans ce tout redevenir une partie de ce tout de silence  alors on entend le murmure mystérieux des choses que le bruit barbare recouvrait alors tout redevient harmonieux les statues marchent la nature bavarde les masques sourient et le secret apparaît dans son évidence même à celui qui s’offre à l’accueillir dans l’atelier du regard silencieux le tissu du monde recousu ressuscite et délivre sa parole fossoyée »

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« Çà bavarde les choses »  Francis Ricard  – Poème découvert —> ICI

Illustrations : 1/« Scène d’intérieur »  Frank Weston Benson 1862-1951   2/« Le studio de I.S. »  Sergey Endogurov 1864-1894.

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Dans le silence, il y a de belles découvertes…

BVJ – Plumes d’Anges.

Ferveur…

mercredi 7 mai 2014

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« … Créer, c’est manquer peut-être ce pas dans la danse. C’est donner de travers ce coup de ciseau dans la pierre. Peu importe le destin du geste. Cet effort t’apparait stérile à toi, aveugle, qui te tiens le nez contre, mais recule-toi. Considère de plus loin le mouvement de ce quartier de ville. Il n’est plus là qu’une grande ferveur et qu’une poussière dorée du travail. Et les gestes manqués tu ne les remarques plus. Car ce peuple penché sur l’ouvrage, bon gré mal gré, édifie ses palais ou ses citernes ou ses grands jardins suspendus. Ses œuvres naissent comme nécessairement de l’enchantement de ses doigts. Et je te le dis, elles naissent autant de ceux-là qui manquent leurs gestes que de ceux-là qui les réussissent, car tu ne peux partager l’homme, et si tu sauves seuls les grands sculpteurs tu seras privés de grands sculpteurs. Qui serait assez fou, pour choisir un métier qui donne si peu de chances de vivre ? Le grand sculpteur nait du terreau de mauvais sculpteurs. Ils lui servent d’escalier et l’élèvent. Et la belle danse naît de la ferveur à danser. Et la ferveur à danser exige que tous dansent – même ceux-là qui dansent mal – sinon il n’est point de ferveur mais académie pétrifiée et spectacle sans signification.

« Ne condamne pas leurs erreurs à la façon de l’historien qui juge une ère déjà conclue. Mais qui reprochera au cèdre de n’être encore que graine ou tige ou brindille poussée de travers ? Laisse faire. D’erreur en erreur se soulèvera la forêt de cèdres qui distribuera, les jours de grand vent, l’encens des oiseaux. »…

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… Il disait ailleurs :

« N’invente point d’empire où tout soit parfait. Car le bon goût est vertu de gardien de musée. Et si tu méprises le mauvais goût tu n’auras ni peinture, ni danse, ni palais, ni jardins. Tu auras fait le dégouté par crainte du travail malpropre de la terre. Tu en  seras privé par le vide de ta perfection. Invente un empire où simplement tout soit fervent…

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… Bâtir la paix c’est bâtir l’étable assez grande pour que le troupeau entier s’y endorme. C’est bâtir le palais assez vaste pour que tous les hommes puissent s’y rejoindre sans rien abandonner de leurs bagages. Il ne s’agit point de les amputer pour les y faire tenir. Bâtir la paix c’est obtenir de Dieu qu’Il prête son manteau de berger pour recevoir les hommes dans l’étendue de leurs désirs. Ainsi de la mère qui aime ses fils. Et celui-là timide et tendre. Et l’autre ardent à vivre. Et l’autre peut-être bossu, chétif et malvenu. Mais tous dans leur diversité, émeuvent son cœur. Et tous, dans la diversité de leur amour, servent sa gloire… »

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Extraits de : « Citadelle »  Antoine de Saint-Exupéry 1900-1944.

Illustrations : 1/« Une fleur parmi les fleurs »  Nicolae Grigorescu 1838-1907  2/« Fleurs, fruits et fougères de Madeire » Couverture d’un livre du XIXème siècle de Jane Wallas Penfold et William Lewes Pugh Garnons.

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Tous ensemble, vivre chaque jour avec ferveur…

BVJ – Plumes d’Anges.