Archive pour la catégorie ‘plumes à rêver’

Envolées…

lundi 25 septembre 2023

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« … Je n’avais pas tout de suite remarqué que Kat Epadô, le pseudo de Sayo (sans doute parce qu’il résonnait rock, me faisant penser à Kat Onoma), était la première personne du présent du verbe grec : Chanter aux oreilles, Prononcer des paroles magiques, Ensorceler. J’avais trouvé ce choix bizarrement calé. Et même gonflé. Qui le lui avait soufflé ? De plus, un pseudo n’est jamais gratuit. Il vous camoufle et en même temps vous révèle. Je m’étais demandé pourquoi Sayo avait choisi un fragment de grec ancien. Pour le feu du son ou pour la cendre du sens ? Ou seulement pour l’élément mort d’une langue morte, complètement étrangère au Japon afin d’y passer elle aussi pour morte ? Et quand cessait-elle d’être Sayo pour devenir Kat-Epadô ? Qu’est-ce qui changeait alors en elle ? Je ne le lui ai jamais demandé.

Le samedi 1° décembre, j’ai découvert la nouvelle annonce :

CdG  Tunique avec implant

Elle est en fine matière extensible, gris irisé.

Sur l’épaule gauche se trouve une longue forme qui entoure à moitié votre cou comme un implant bizarre

Moi je dis qu’elle est mon chat gris, mon chagrin, couché sur mes épaules  =^^^= …

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J’allume la radio, à chaque fois j’entends comme un immense tremblement de terre. Quelque chose s’écroule.

Je connais un oiseau qui chantait avec assurance au cœur de la dévastation, m’a soudain dit Emily D. La dévastation, on y est, ça c’est sûr, lui ai-je répondu. Mais comment chanter ? Chante, a dit Emily D…

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… Il existe toutes sortes de rencontres. On peut rencontrer un vêtement : il vous foudroie. On peut rencontrer un pseudo : il vous possède. On peut rencontrer un oiseau : il vous fait rougir. La plus petite rencontre contient sa part explosive qui fracture quelque chose en vous…

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Autour de nous, je sentais un immense territoire dressé, avide, vivant. La nuit quelque chose s’éveille, sort, se tend, tiré, étiré en un grand bond, un jaillissement, et ça pousse, ça marche, ça avance. Beaucoup plus qu’en plein jour. Les rochers aussi (il y en avait beaucoup là bas, le chemin traversait un paysage de moraines), même eux, les rochers qui après avoir roulé semblaient s’être immobilisés, étaient en route, comme nous, je voyais bien qu’ils étaient encore en route, à leur dos rond, à leur épuisement, et j’ai compris qu’on n’est jamais arrivé, que rien n’a jamais de fin, même pour les pierres. Et quand je levais la tête, les constellations comme les moraines, leurs cygnes, leurs ourses, leurs lièvres, leurs chevaux et leurs chiens, traversaient le ciel, prises elles aussi dans le même interminable éboulement… »

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Zsazsa quitte son compagnon Thomas, abandonne Paris (pour une année au moins) et part dans les montagnes en vue d’étudier la langue des oiseaux, . Elle arrive la nuit, sous la neige, dans une baraque (dessinée par Jean Prouvé) au cœur de la forêt. Elle apporte dans ce lieu de solitude juste l’indispensable, deux livres d’Emily Dickinson publiés aux éditions Corti, deux livres de poésie chinoise  (de Li Bai et de Du Fu), un livre signé du russe Isaac Babel, un IMac 27 pouces, un téléphone portable, un duvet, des draps…

Ce soir là, elle fait la connaissance sur EBay de Sayo, celle-ci vend sous le pseudo de Kat-Epadô, des fringues de la célèbre marque Comme des garçons. Ce qui interpelle la narratrice, c’est le style de la petite annonce accompagnant la photo du vêtement : un texte court, étrange, poétique, mystérieux, elle tombe immédiatement sous le charme. S’en suit une relation entre ces deux « oiseaux » qui évoluera au fil des pages…

J’ai adoré cette lecture, une sorte de petit roman japonais où l’on s’attache à la délicatesse des mots, à l’essence des choses. Zsazsa  questionne et se questionne, tout a son importance mais tout est dérisoire aussi. C’est la quête de deux femmes qui vont grappiller un peu de l’autre, elles sont à une étape de leur vie, elles cherchent à entrevoir qui elles sont vraiment et vers où elles veulent aller.

L’écriture de l’auteure est toujours belle, ses descriptions de la nature, son côté sauvage et érudit, cet attachement aux maladresses et aux petits détails qui illuminent le présent sont un enchantement.

Sans se voir, sans se connaître, on peut tisser des liens, de lumineux liens.

AIFELLE en avait parlé –>

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Extraits de : « La langue des oiseaux »  2014  Claudie Hunzinger.

Illustrations : 1/ « Oiseaux »  Elise Konstantin-Hansen  1858-1946  2/ « Roses »  Elizabeth Bigelow Greene  1837-1915.

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Chercher un sens…

BVJ – Plumes d’Anges.

Fleurs et fleurettes…

lundi 11 septembre 2023

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« J’aimerais que mes souvenirs qui clignotent souvent soient munis d’un interrupteur

afin que je puisse au besoin les rallumer après les avoir éteints un certain temps. »

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« Toute vie est un hasard

Pourtant mes yeux ont vu trop de choses

Pour vivre comme un simple visiteur. »

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Dans les après-midi pré-automnales, je ne veux encombrer mon esprit,

j’aspire à la sérénité, j’appelle des souvenirs fleuris, j’en fais un doux bouquet.

Des forces lumineuses et colorées se tissent, se sculptent, se disent, se chantent,

des bulles d’énergie s’élèvent pour peindre dans le ciel de nouvelles étoiles.

Ainsi va la vie, elle nous montre que nous sommes en vie,

que la lumière est là en nous, à côté de nos zones d’ombre.

Ne perdons pas de temps à ressasser,

choisissons nos lignes de force,

 le tableau de notre quotidien se fera harmonieux et joyeux…

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Poèmes du sud-coréen Eom Won-tae  « Dans une région obscure »  2023

Tableaux : 1/ « Jeux d’enfants »  Alexei Harlamov  2/ « Fleurs dans un verre »  Albert Edelfelt

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Choisir notre lecture du monde…

BVJ – Plumes d’Anges.

Joie de l’âme…

vendredi 25 août 2023

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« … la joie, à l’inverse du plaisir, ne se décrète pas. Nous pouvons chercher le plaisir, et l’obtenir presque à coup sûr, par la satisfaction d’un besoin ou d’un désir : manger, boire, faire l’amour, s’adonner à une activité que nous aimons. La joie est une émotion beaucoup plus intense que le plaisir et elle nous tombe dessus, comme une grâce. Elle transporte notre cœur, notre esprit et notre corps…

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nous ne pouvons pas programmer la joie comme il est possible de programmer le plaisir, mais nous pouvons créer un terrain favorable à l’émergence de la joie. En étant présents et attentifs à ce que nous faisons, la joie peut survenir…

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... Si nous contemplons avec attention la beauté d’un paysage ou d’un sourire, une joie immense peut soudain inonder notre âme. De même, la joie jaillit souvent dans un cœur reconnaissant envers la vie…

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si nous pratiquons la gratitude, si nous savons remercier la vie et les autres chaque jour pour ce qu’ils nous apportent de beau, de bon ou d’utile – parfois même à travers des difficultés ou des épreuves – , alors la joie envahira souvent notre âme. Il en va de même pour la bienveillance…

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La joie est aussi l’expression de l’augmentation de notre puissance vitale. Plus nous sommes capables d’agir et d’agir librement, plus notre esprit est joyeux…

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La joie accompagne la croissance de notre être, de notre intelligence, de notre cœur, de notre créativité, de notre conscience. La joie est d’autant plus forte que l’effort a été intense pour y parvenir ou combler nos espoirs…

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La joie est le fruit d’un dévoilement. Comme l’amour, elle réside au plus profond de l’esprit et du cœur de tout être humain. La joie de vivre est naturelle chez les enfants. Elle est comme une source jaillissante…

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Puis les soucis de la vie, les peurs, les déceptions et les tristesses vont progressivement obstruer cette source. Il s’agit de se débarrasser des idées et des croyances erronées, des peurs, des tristesses et des colères qui empêchent la source de jaillir…

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L’eau pourra alors couler et inonder l’âme de joie. C’est ainsi que nous redevenons comme ces petits enfants, qui se réjouissent d’un rien, qui vivent dans l’instant présent, qui s’émerveillent de tout et ne cessent de rire… »

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Rencontrer certains paysages peut transporter notre âme.

L’heure parfaite, la lumière idéale, une température vivifiante,

tout devient merveille dans la découverte :

les rochers de granit poli d’une exquise douceur,

la musique et le scintillement de l’eau, un camaïeu de bleus divins…

La joie fait irruption et l’onde quelques jours après est toujours présente.

Pour accompagner ces moments magiques,

le hasard avait mis dans nos bagages divers livres,

dont les deux tomes de « L’Âme du monde » de Frédéric Lenoir,

conte philosophique très à propos dans ces lieux propices à la méditation. 

Merci la vie !

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Extraits de « L’Âme du monde » tome II  2019  Frédéric Lenoir.

Photos BVJ – Suisse Août 2023 – Torrent du Val Cristallina dans le Tessin.

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Se sentir à sa juste place, joie absolue…

BVJ – Plumes d’Anges.

Livres de vie…

lundi 14 août 2023

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« … Un dimanche (1960)

Un dimanche normal. Je suis très inquiète pour l’œil de Pa, j’espère que tout ira bien. Pourquoi a-t-il tous les malheurs ? Je les voudrais pour moi. Je veux que Dieu me donne un œil malade à la place de Pa. Chaque fois que je souhaite la même chose, c’est toujours le même bon vieux souhait « faites en sorte que tout le monde soit heureux ». Hier j’ai inventé un hôpital, les chambres auraient des roses sur le papier peint ; et l’oeil de Pa pourrait être massé tous les jours et Ma pourrait avoir de la psychothérapie et ils se sentiraient comme les chefs du monde.

J’ai appris des choses sur Dieu aujourd’hui. Je m’interroge beaucoup à propos de Lui, ça doit être une bien étrange personne, est-ce-que c’est un homme, a-t-Il un corps ? S’Il n’en a pas, est-Il un vide ? Et si c’est un vide, comment peut-Il exaucer nos souhaits ?

Je me sens tellement plus adulte maintenant que j’ai acheté du rouge à lèvres et que mes seins ont enfin réussi à pousser. Je travaille plus dur et je pense différemment. J’ai des bas* et des petites crush sur moi…

* Soixante deniers, une opacité grandiose. Et s’ils étaient filés, on pouvait les raccommoder, je sais toujours le faire… »

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Extrait de : « Munkey Diaries » – Journal, 1957-1982   Jane Birkin 1946-2023.

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« … Grand Canyon, 13 Août 1999

3 heures du matin. Insomnie dans le désert. On est allongé en sueur dans notre tente de camping derrière un immense rocher, Baby Ben, Charlotte, Kate et moi. Je n’avais pas rigolé à ce point depuis longtemps. Je suis la seule réveillée, comme d’habitude. J’ai oublié mes somnifs dans la voiture et je n’arrive pas à trouver mon pull. J’ai vu neuf étoiles filantes, alors il y en avait pour chacune des filles, plus Roman et Ben et Munga.

J’espère ne pas tomber de cheval demain, je les entends hennir et s’ébrouer depuis tout à l’heure. C’était si chouette de faire un feu de camp en mangeant des côtelettes, de regarder les étoiles et de partir se promener à travers les montagnes. Kate est vexée de s’apercevoir que Paris n’est pas le monde, j’ai dit que Londres ne l’est pas non plus, que la nature seule est extraordinaire, et tant pis pour la grande muraille de Chine ! Quoi qu’il en soit, ces immenses montagnes rouges ressemblent à des couches de plastique brillant superposées. À tout moment un Mohawk peut se pointer au sommet et on se retrouvera dans un film de Robert Mitchum. Roman a déposé son précieux scorpion sur un lit de coton dans ma boite de boule Quies.

Je dois essayer de dormir, ma lampe torche attire tous les insectes de l’univers. Kate a nettoyé mon visage poussiéreux avec de la crème pour les pieds du Dr Scholl, ça commence bien !

Dernière nuit avec les filles. J’ai tellement eu envie de tout leur raconter, mais j’ai décidé de ne pas le faire, c’est adorable de leur part de m’emmener faire ce voyage avec elles, alors je ne veux pas qu’elles s’inquiètent une seule fois pour moi… Tu sèmes un doute et il est impossible ensuite de le dissiper…

Nous sommes tous ensemble dans la même chambre carrée, tous ceux que j’aime, exceptée la petite Lou, et peut-être ça n’arrivera plus jamais. Les filles sont si terriblement drôles, chacune à leur manière, méticuleuses, délicates, pures et élégantes. Si féminines et belles…

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… 21 juillet 2004, message de Charlotte 

« Je viens de lire ton scénario, je suis tellement touchée, c’est toi qui me touches. Peu à peu on est envahi par ce qu’on comprend de ton personnage, c’est émouvant, drôle et barge, la manière dont tout est imbriqué, voilà c’est toi, ça te ressemble, tu dois absolument le faire, bisous, Charlotte. »

J’ai pleuré, ma fille croit en moi, comme Ma croyait en moi… »

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Extraits de : « Post-scriptum »  Journal, 1982-2013  Jane Birkin 1946-2023.

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J’ai aimé Jane Birkin et son sublime regard, j’ai senti en elle une belle âme, sa disparition me touche énormément.

Elle nous laisse beaucoup de cadeaux, ses films, ses chansons, ses combats, ses livres, ses journaux : deux qui se suivent, le premier fut rédigé en anglais, puis traduit, le second le fut en français, cela donne une écriture différente à ces deux ouvrages.

L’amour et l’amitié sont omniprésents dans toutes les notes prises au fil du temps, Jane met en valeur les personnes rencontrées ne voyant que leurs belles facettes, on découvre ce drôle de milieu qu’est le show biz. Elle semble avoir eu très peu confiance en elle et pourtant face aux échecs, face à la maladie, elle a vaillamment lutté.

Dans les extraits publiés de ses journaux, elle ne s’épargne jamais, elle est d’une immense franchise. Elle revendique sa liberté, va parfois très loin dans sa fantaisie. Elle nage dans un océan d’émotions, se soucie des autres et fait preuve d’une profonde gentillesse.

Ses filles sont très proches d’elle, elle s’arrête d’écrire le 11 décembre 2013 à la mort de Kate. La postface page 425 est plus qu’émouvante… Adieu Jane, merci de nous avoir accompagné(e)s depuis tant d’années.

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Illustrations : 1/« Pivoines »  Charles Ethan Porter  1847-1923  2/« Souvenir »  Arthur Bowen Davies  1862-1928.

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S’aimer, se soutenir…

BVJ – Plumes d’Anges.

Liberté et lumière…

jeudi 3 août 2023

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« LA FLORAISON DE LA PENSÉE.

La conscience claire est un état d’esprit qui peut tout embrasser – le vol des corbeaux à travers le ciel, les fleurs sur les arbres, les gens assis là aux premiers rangs et les couleurs qu’ils portent – , il nous faut avoir cette amplitude de conscience qui exige que l’on examine, que l’on observe, que l’on remarque la forme de la feuille, la forme du tronc, la forme qu’a la tête du voisin, ce qu’il est en train de faire. Avoir cette amplitude de conscience, et agir sur ces bases – c’est cela, avoir conscience de la totalité de son être. Ne disposer que d’une capacité partielle, d’un fragment de capacité ou d’une capacité morcelée, cultiver celle-ci et fonder notre expérience sur la base de cette capacité qui est limitée – cela donne un esprit de qualité médiocre, limitée, étroite. Mais avoir conscience de la totalité de notre être – compris grâce à la perception de chaque pensée, de chaque sentiment, sans qu’on oppose de limites à cette perception, mais en laissant fleurir toutes les pensées, tous les sentiments -, être par conséquent pleinement conscient, voilà qui est tout autre chose qu’une action ou une concentration qui ne sont qu’une simple capacité, et qui sont de ce fait limitées.

Laisser fleurir une pensée ou un sentiment demande de l’attention – pas de la concentration. J’entends par laisser fleurir une pensée le fait de lui permettre de se déployer en toute liberté, et observer le résultat, voir ce qui se passe dans votre pensée, dans vos sentiments. Tout ce qui fleurit a besoin de liberté, de lumière, et ne peut être assujetti à aucune restriction. On ne peut pas l’évaluer, on ne peut pas dire : » C’est bien, c’est mal ; ceci est acceptable, cela ne l’est pas » – car c’est ainsi qu’on limite cette floraison de la pensée. Or la floraison ne peut avoir lieu qu’à la lumière de cette conscience-là. Donc, si vous allez au fond des choses, vous découvrirez que la floraison de toute pensée en est aussi la fin ultime. »

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Un livre-journal, il explore la vie et les différents thèmes qui en font la richesse

à travers 365 textes qui peuvent être appréciés comme autant de sujets de méditations.

Il se lit et se relit, l’auteur nous invite à nous libérer de nos conditionnements,

à vivre notre existence en développant notre attention, en nous forgeant un esprit libre…  

Une lecture de chevet fort enrichissante qui nous accompagnera jusqu’à notre dernier souffle,

que demander de plus ? Rien, tout est parfait ici et maintenant.

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Extrait de : « Le livre de la Méditation et de la Vie »  Jiddu Krishnamurti
1895-1986.

Illustrations : 1/ « Pensées et éventail japonais »  2/ « Innocentia »  Maria Wiik  1853-1928.

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Faire croitre notre attention…

BVJ – Plumes d’Anges.

Balancements…

dimanche 9 juillet 2023

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 « Je vis, je meurs , je me brûle et me noie,

J’ai chaud extrême en endurant froidure,

La vie m’est et trop molle et trop dure.

J’ai grands ennuis entremêlés de joie.

 

Tout à coup je ris et je larmoie,

Et en plaisir maint lourd tourment j’endure,

Mon bien s’en va et à jamais il dure,

Tout en un coup je sèche et je verdoie.

 

Ainsi Amour inconstamment me mène,

Et quand je pense avoir plus de douleur,

Sans y penser je me trouve hors de peine.

 

Puis, quand je crois ma joie être certaine,

Et être au haut de mon désiré heur,

Il me remet en mon premier malheur. »

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Tandis que l’Homme s’agite en tous sens dans un monde devenu totalement binaire,

la nature, elle, ne perd le fil de la création,

elle est tout à son œuvre dans la saison présente.

Naissance, floraison, fanaison, fructification,

recherche de beauté, d’équité, de loyauté…

Certains tentent de tracer ce chemin avec humilité,

partons à leur recherche joyeusement

et ensemble trouvons des sources limpides.

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Sonnet de Louise Labé – XVIème

Illustrations de Robinet Testard  1471-1531: 1/ « AlphabetHeures de Charles d’Angoulême  2/ « Rose, grand Paon de nuit  et Sceau de Salomon – Livre des Simples de Mattheaus Platearius » XVIème.

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Tout change, perpétuellement…

BVJ – Plumes d’Anges.

Jardins intérieurs…

samedi 1 juillet 2023

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« Avec merles et pinsons

j’ai beau partager mes graines

à la table de l’hiver

je ne ferai jamais partie de leur monde

 

eux d’un coup d’aile

prennent de la hauteur quand ils veulent

et tout s’amenuise en bas »

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« Ce coup de vent sur la terrasse

qui m’extirpe d’une sombre méditation

doit annoncer un dieu

 

les feuilles se retournent

les fleurs s’inclinent

qu’on ajoute un fauteuil

il va venir sous peu

s’enquérir de notre humeur »

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« Alors que flambe le fagot

de pensées fines et de sentences

amassées au fil des jours

avec tous mes ah oui accolés

je regarde ce livre d’images

que le vent feuillette à l’envers

devant ma porte ce matin

jusqu’au plus opaque

de l’arbre et du ciel »

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« Aujourd’hui me précède

un poème vigoureux

qui réduit en poussière lumineuse

tourments et ronces

en travers du chemin

 

si des choses doivent se murmurer

du plus profond de la forêt

elles trouveront mes oreilles

avant le soir »

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« Empêchons les jours mauvais

de remonter du puits

maçonnons le couvercle

et devenons légers

sans devenir des anges

ouverts encore selon

les vieilles catégories

aux péchés les meilleurs

aux vertus négligées »

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« J’ai aménagé un jardin de pierres

dans mes soucis

 

je veux l’agrandir chaque jour

d’une poignée de sable fin

la nuit avant de m’endormir

je le ratisse comme autrefois je priais »

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Découvertes éternellement renouvelées, au fil des jours, des lieux et des saisons…

Précieuse découverte d’un « nouvel ami » poète dont les mots cueillent

simplicité et profondeur de la vie.

Tout est là, se déployant à nos pieds, illuminant notre regard.

La poésie, la nature et la beauté sauveront-elles le monde ?

Si chacun de nous entretient cette flamme, tout reste possible, j’ai envie d’y croire…

Poèmes extraits de « ÉLÉGIES ET PIERRES DE FRONDE »  2009 Roland Reutenauer.

Photos BVJ – Alpes françaises et italiennes juin 2023.

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Cultiver nos jardins intérieurs…

BVJ – Plumes d’Anges.

Plis et replis de l’âme…

lundi 5 juin 2023

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« … La traversée de l’hiver demande patience. Ce n’est qu’une saison à passer, mais je remarque, et chaque année davantage, combien l’angoisse m’étreint, sitôt disparue l’ardeur des rouges et des ors de nos mois d’automne. Cet aveu m’apaise, car nous abritons en nous quantité de souvenirs et de réflexions ; il ne se trouve personne pour les entendre, et le cœur s’étouffe à les contenir.

Je n’ai pas de goût pour les confidences que s’échangent les femmes entre elles. Trop souvent, on voit le secret de l’une, sitôt franchi ses lèvres, porté à la connaissance des autres. Il devient leur jouet et elles en disposent à leur guise. Ce ne sont que broderies et arabesques, chacune y ajoute ses motifs et ses couleurs, et la réalité de l’affaire disparaît sous les ornements.

Il ne reste plus rien alors de ces instants où l’on a cru se livrer à un cœur compatissant, à une âme bienveillante, et confié sans défiance, dans un tendre rêve de gémellité, les tourments les plus sombres ou les pensées les moins raisonnables. De cela, je ne veux pas…

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… Musica laetitiae comes medinina dolorum. Dès la première fois où enfant, j’ai posé mes mains sur les touches, cette phrase s’est offerte à mes yeux, et avant de savoir assez de latin pour la comprendre, j’avais demandé à mon père de m’en indiquer le sens. Depuis il n’est pas de jour où cette réflexion ne m’accompagne de son évidence. Dans la joie comme dans la peine, la musique demeure notre compagne. Elle embellit ce qui peut l’être, et console, lorsque cela est possible. Mais des trop grandes peines, elle ne distrait point. La vraie tristesse s’accompagne de silence, mais c’est autre chose…

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... L’ordre, la mesure et le travail sont des remparts contre les embarras de l’existence. C’est ce qu’on nous apprend dès l’enfance. Vanité de croire tout cela. Chaque jour qui passe me rappelle, si besoin était, que la conduite d’une vie n’est en rien semblable à celle d’un stock d’épices ou de porcelaine.

Ce que nous tentons de bâtir autour de nous ressemble aux digues que les hommes construisent pour empêcher la mer de nous submerger. Ce sont des édifices fragiles dont se jouent les éléments. Elles restent toujours à consolider ou à refaire. Le cœur des hommes est d’une moindre résistance, je le crains…

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Je sais désormais qu’il nous faut agir selon notre cœur, au plus près de ce qui nous semble juste et ne jamais accepter ce qui nous fait violence. J’ai failli ce jour là, et le prix de ce manquement est une croix de plomb sur mes épaules…

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… Avec le temps, ce sont nos joies d’enfant que nous convoquons le plus facilement dans nos souvenirs, elles nous accompagnent avec une rare fidélité. Retrouver ce que nous avons éprouvé dans ces moments demeure une source de félicité que nul ne pourra vous ravir. Le cours de nos vies est semé de pierres qui nous font trébucher, et de certitudes qui s’amenuisent. Nous ne possédons que l’amour qui nous a été donné, et jamais repris… »

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   Tout commence par un tableau d’Emanuel de Witte, c’est ce tableau qui a intrigué l’auteure, elle a imaginé l’histoire de cette femme qui apparait de dos jouant du virginal dans sa chambre à coucher au riche décor, un homme est allongé sur le lit, au fond, une jeune servante balaie. Elle se nomme Magdalena Van Beyeren, décide de « mettre un peu d’ordre dans son cœur pour apaiser son âme », écrit un journal intime entre le 12 novembre et le 16 décembre 1667.

Elle se raconte en tant que fille ainée, ne s’est jamais sentie attirée par les taches domestiques et les travaux de broderie, s’est vite intéressée aux affaires de son père, administrateur de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales, marin et armateur. Elle a adoré les déplacements à ses côtés, les départs et les arrivées des bateaux chargés de trésors venus de lointains pays : épices, soieries, porcelaines… ce monde l’enchante et son talent dans les affaires est reconnu. Mais elle est née à une époque où les filles n’ont aucuns droits. Elle épouse Peter qui héritera de la charge d’administrateur puis deviendra mère, de nombreuses fois.

Elle couche sur ces pages les pensées qui la mettent en joie et celles qui la broient chaque jour, empêchant la venue du sommeil. Elle se questionne sur l’avenir, les qualités des uns et des autres. Elle se délivre d’un lourd secret de jeunesse. Elle aime et se sait aimée mais suite à une décision de son mari, une fissure se fait en elle, elle se trouve profondément ébranlée. La musique et son épinette l’ont toujours accompagnée, elle se prend à rêver.

L’écriture de ce court ouvrage est très belle, l’auteure déroule un fil tissé de mots choisis, dignes et bienveillants. C’est un récit très touchant, délicat, une pièce de musique, un petit bijou…

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Extraits de : « Les heures silencieuses »  2011  Gaëlle Josse.

Illustrations : 1/ »Intérieur avec femme au virginal »  Emanuel de Witte  1617-1692  2/ »La jarre »  Harry Wilson Watrous  1857-1940.

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Observer le silence pour entendre réponses à nos questions…

BVJ – Plumes d’Anges.

Surréaliste…

lundi 29 mai 2023

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« Quand le marchand de sable finit sa tournée, il rejoint la plage originelle, s’allonge dans l’orbite qu’il a creusé, referme sur lui la paupière de l’aube et s’endort jusqu’au soir dans le grand œil de l’inconscient. »

Poème « Quand » extrait de Passerelles d’oiseaux –  2020 –  Jean-Claude Silbermann.

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Exposition étonnante et détonante  – Hold-up ! – dans le très beau musée La Banque à Hyères.  Jean-Claude Silbermann, né en 1935, vit la moitié de l’année dans sa Maison Rose à Port-Cros. Il s’intéresse tout jeune à la poésie (Appolinaire, Artaud…) et rejoint, sur invitation d’André Breton, le mouvement surréaliste, publie ses poèmes puis se tourne vers le dessin et la peinture. Il explore sans cesse l’imaginaire, le rêve, l’inconscient, laisse monter en lui des images – ses ombres et ses lumières -, ne prévoit rien à l’avance, s’effraie, se réjouit, s’étonne. De là nait un dialogue silencieux où peinture et langage conversent poétiquement.

L’artiste nous offre ici différentes facettes de son art : des encres (un monde aquatique en noir et blanc), des coloriages… et des « enseignes » (peinture à l’huile sur toile marouflée sur contreplaqué découpé). Celles-ci sont spectaculaires, elles planent, elles voltigent, l’effet visuel est surprenant. Les couleurs sont splendides, le trait est délicat, le travail de menuiserie parfait. Notre regard se pose sur mille et un détails, il y revient, il y a encore et toujours à découvrir. Nul ne reste indifférent, la fantaisie est partout.

Chaque œuvre est accompagnée d’une « pancarte », sorte de panneau indicateur qui livre une anecdote, Jean-Claude Silbermann en a écrit les textes, un pur enchantement, l’homme est intelligent et ne se prend pas au sérieux, il joue avec les mots et les images, pour notre plus grand plaisir.

Babil-Babylone est une installation, un « tableau » en trois dimensions, il sort du cadre. Composé de 58 éléments, les images flottent dans l’espace, des fils se tendent, on attend le moment où tout va s’animer, une vie inconsciente est à l’œuvre, un voyage…

Le Hold-Up ! est réussi et Jean-Claude Silbermann se fait Roi des Arts (une autre de ses œuvres, à découvrir).

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ÉDOUARD  1961 ou 1962.

« Ceci est le tout premier tableau émanant de ma décision de peindre (un autre le précède d’un an, mais je l’ai égaré). Celui-ci doit dater de 1961 ou 1962. Flora, notre fille, dans sa robe de chambre bleue devait avoir trois ou quatre ans. Et doux art est dans le sac. »

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LA TRAVERSÉE    1980.

« Dans cet art que je pratique, le sujet, le plus souvent inconnu au préalable, ne se découvrant que dans l’improvisation du dessin, je ne sais trop à quoi attribuer le besoin qui se présente parfois d’un combat en grand avec le vide. C’est un besoin physique. Il est porté, je crois, par ce sentiment « d’enthousiasme excentrique » dont parle Hölderlin, sentiment dont témoigne cet intrépide bébé. »

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TOI, MON INFINITUDE  2004.

« Je passe la moitié de ma vie sur l’île de Port-Cros. Là, je me concentre : j’écris, je prends des notes, je dessine et je réalise parfois quelques petites pièces dans le format imposé aux colis postaux (la somme de leur longueur et de leur largeur ne doit pas excéder 150cm). Un jour l’idée saugrenue m’a pris, comme un besoin impératif de me dégourdir, de peindre une grande pièce. J’ai commandé à terre une planche de 160 x 120cm. J’ai dû me faire aider pour le remonter depuis le môle jusque chez moi. Et ce fut un réel grand plaisir d’avoir enfin le geste large pour la préparer et de pouvoir dessiner debout. Les ennuis ont commencé quand, achevée, il a fallu l’exfiltrer de l’île. Je me suis fait à nouveau livrer des planches de contreplaqué (pas trop minces et donc coûteuses) pour confectionner une grande caisse. Puis, celle-ci descendue au port avec quelque appui bienveillant, je l’ai accompagnée par bateau au Lavandou. La location d’une camionnette fut indispensable pour l’amener à Sollies-Pont (40km), où se trouvait une agence du Sernam (Service national de messagerie) seule compagnie susceptible alors d’assurer son transport jusque chez moi, dans la région parisienne. J’ai dû attendre deux heures que l’on veuille bien s’occuper de ma caisse, tant il y en avait d’autres – et de grand gabarit, tant il y avait de colis, tant de marchandises diverses dont un personnel restreint devait gérer l’envoi. Je me souviens aussi d’avoir été désagréablement surpris par le prix demandé. Tout se paye, paraît-il. »

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BABIL-BABYLONE  1990-2017.

Installation composée de 58 éléments.

« Cette grande installation a été élaborée de 1990 à 2017 par ajouts et inclusions successifs. Je l’avais tout le temps derrière la tête comme une sourdine folle. Son sens général me devance et résiste encore aujourd’hui à ma plaine compréhension. Il me semble qu’il porte à peu près, pour toute une part, sur les représentations secrètes du Pouvoir liées à celles (non moins dérobées) du Langage : l’art est nié.

À un moment de son état (vers 1998), j’ai écrit avoir « fondé Babil-Babylone sur le sable des jours qu’il me reste à vivre ». Mais, pour des raisons qui me semblent être aujourd’hui de pure superstition, je ne me suis pas senti de l’achever. Et je ne fus pas mécontent de m’en dessaisir. Il manque à Babil-Babylone son ciel. J’ai pourtant réalisé une maquette sommaire de ce qui aurait dû être un palindrome écrit au dessus des têtes en grandes lettres ornementées. Mais j’étais (et demeure) empêché de le réaliser, dans la crainte que cet achèvement m’emporte avec lui. Je n’ai pourtant pas peur de la mort, présente dans Babil-Babylone. Mais une distance trouble sépare le courage de l’indifférence qui, objectivement, est le seul état dans lequel il convient d’accueillir la mort. Bien que comblé de jours, je ne puis accepter sans tristesse de me passer définitivement des beaux moments du Monde : du visage de mes amours et de la splendeur des nuits d’été. Nous n’avons que la vie. »

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LE OUI DES FEMMES 1988.

« Le Oui des femmes résulte d’une commande passée par un riche collectionneur qui m’avait déjà acheté plusieurs pièces. Un jour il m’a dit : « Silbermann, faites-moi un chef d’œuvre. Avec une femme, si possible.

Mais qu’à cela ne tienne ! » lui ai-je répondu.

J’ai bataillé trois mois avant de l’appeler. Il est venu dans l’atelier, s’est assis dans le grand

fauteuil que j’avais disposé pour lui devant la pépée (c’était un vieux monsieur) :

« Ah oui, très bien la femme, ah oui, la femme, les couleurs, la fausse symétrie.

Oui, vraiment très, très bien la fausse symétrie. »

Et puis soudain troublé : « Mais… mais, il y a un serpent ? Il y a un serpent ! C’est rédhibitoire. Pour moi et ma femme, rédhibitoire ! » Il s’est levé et il est parti. Et je ne l’ai jamais revu. »

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VOUS PARTEZ DÉJÀ ?  2009.

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Si vous voulez en savoir plus sur ce toujours jeune homme, artiste très inventif, je vous invite à suivre une interview –> ICI

Œuvres de Jean-Claude Silbermann.

Exposition HOLD-UP ! – musée La Banque à Hyères dans le Var.

Photos BVJ – mai 2023.

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Naviguer sur les côtes de l’imprévu…

BVJ – Plumes d’Anges.

Œil au guet…

lundi 22 mai 2023

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« … Souvent les enfants m’apportent ce qu’ils ont trouvé et qui respire et bouge et les captive, et celui-ci tenait devant lui ses deux mains fermées comme une boîte, soudain ouverte sur un rouge-gorge étourdi de froid ou de faim qu’il avait ramassé dans la neige.

Le lendemain, j’étais descendue au moulin acheter dix kilos de graines de tournesol et j’avais installé une mangeoire dans le rosier derrière la vitre de mon bureau, à hauteur de mon regard, et une autre en dessous, à même le sol. Et les oiseaux étaient arrivés…

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C’était un été paradoxal, de joie et de profonde mélancolie. L’été précédant, je m’en souvenais bien, le jour même où Le Monde titrait « La sixième extinction de masse est en cours », et annonçait la disparition des espèces, nous avions été visités par un Grand Mars changeant, plus vu depuis des années, entré par la porte-fenêtre grande ouverte. Son bleu métallique, irisé. Et une heure plus tard, dans la prairie, midi, était passé le voilier jaune taché de rouge et de bleu d’un Machaon. Je n’avais pas pu m’empêcher de voir dans ces insistantes apparitions des visites d’adieu : La Beauté vous salue bien…

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... Dans la nuit du 28 juillet, trois « raires » successifs, longs et lents, ont remué l’espace. Un cerf s’éveillait de sa longue paix sexuelle. Les « raires » de fin d’été ne ressemblent pas aux mugissements du brame, et sont faciles à imiter. On ouvre grand la bouche, on la tord, le menton baissé pour aller chercher les notes graves qu’on module en une mélopée paresseuse semblable au baîllement d’ être encore endormi.

Un soir je m’étais postée à côté de la cabane d’affût, au grand air, dans les fougères, sous un simple filet, quand est sorti de la forêt, à gauche, un magnifique 14. Bois noirs, élancés, andouillers très longs dans l’empaumure. Apollon. – Et Arador, tu l’as revu les bois dépouillés ? ai-je demandé à Léo, par mail. – Pas encore.

L’été s’achevait. Il pleuvait doucement. Je descendais à pas lents, précautionneux, à travers les éboulis des moraines ponctués de taillis, les bras écartés en balancier comme un funambule, les yeux agrandis, je ne pensais à rien, ne faisant pas plus de bruit que la pluie, toute à mon équilibre, quand j’ai aperçu, entre les rochers en contrebas, émerger des branches d’arbre, ocre clair, qui bougeaient. M’approcher, façon Ojibwa. Avancée/arrêt. Avancée/arrêt. Souffle retenu. Stop à moins de trois mètres. Je n’ai pas conscience du temps. Il n’y en a plus. Je m’assois, bien tassée, les bras autour des genoux. Je ne vois pas le museau, ni l’encolure, ni le corps couché. Seulement la nuque, les oreilles et la ramure dorée aux pointes blanches. Reposant sur ses pattes repliées, dans son fort de ronces, le cerf regardait à mon opposé, vers la vallée d’où aurait pu surgir un humain. Splendeur qui ne semblait pas faite pour être vue. Les oreilles, deux feuilles largement ouvertes, remuaient indépendamment l’une de l’autre pour capter le moindre bruissement, mais j’étais arrivée du haut, dans son dos, le vent pour moi. Tout est là, avoir le vent pour soi. Longuement, sans jumelles, je comptais et recomptais ses cors. C’était un 18-cors portant 6 et 5 aux empaumures, 5 comme 5 doigts écartés au bout de cette branche, plus 4 cors le long de cette branche. Je me disais : contemple la liberté sur son constant qui-vive, un être de liberté, mu par une incessante frayeur, tout de noblesse et de frayeur… »

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C’est un texte bondissant au sein d’une nature sauvage. Tout se passe la nuit pour l’observateur averti nous dit Pamina qui habite une ancienne métairie perdue au fin fond d’une forêt vosgienne – Les Hautes-Huttes – , avec son compagnon de vie Nils. Elle n’est pas peureuse mais patiente et passionnée. Elle regarde autour d’elle, reste à l’affût parfois des nuits entières, quel que soit le temps, juste pour admirer ces merveilles animalières que sont les cerfs, les biches, les chevreuils et saisir leurs comportements. Elle accompagne souvent Léo, photographe qui l’initie à cette observation. Parfois il ne se passe rien, mais souvent il y a de vrais cadeaux.

Les descriptions de l’auteure pour raconter ces animaux sont d’une grande richesse. Hormis l’incroyable vocabulaire – empaumure, cors, daintier, andouiller, époie… – , on apprend beaucoup de choses :  les cerfs dorment les yeux ouverts, ils perdent leurs bois chaque année au mois de mars, il en repousse de nouveaux recouverts d’un velours, puis vers la mi-juillet sur les nouveaux bois « allongés », ils mangent les velours tombés en lambeaux…

Elle nous parle de sa passion pour ces lieux sauvages, sa colère contre les chasseurs et l’O.N.F. Que l’on partage ou pas son point de vue, peu importe, elle nous entraîne dans ces mondes peu connus pour notre plus grand plaisir.

Encore un lecture que j’ai beaucoup appréciée,

initiée par Dominique –>

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Si vous aimez ces animaux,

partez à la découverte du travail de Catherine Blancard,

particulièrement de l’exposition « La liste rouge » vue à Chamonix il y a peu de temps

—>  ICI.

Extraits de : « Les grands cerfs »  2019  Claudie Hunzinger.

Illustrations : 1/ « Oiseaux chanteurs »  Illustration anonyme d’un dictionnaire de 1908  2/ « Cerf rouge et sa meute »  Carl Friedrich Deiker  1836-1892.

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Plonger vers l’authenticité…

BVJ – Plumes d’Anges.