Luministe…

.

.

« Le salon de musique »

« Ou comment choisir d’une part entre la beauté profuse, toujours renouvelée, du monde sensible avec ses grands ciels suaves, ses lointains, ses contrées, tout ce que les saisons et les jours déposent en nous d’intrigues, d’errances, la rencontre de l’aube, de la nuit, les amours, les chemins, et d’autre part ce que la solitude, le confinement et l’esprit distillent lentement, l’œuvre élaborée, philtre ou formule, concrétion étrange de ce qui a été plus rêvé que vécu ?

C’est ce doux va et vient entre Narcisse et Goldmund qui est ici mis en scène. C’est la théâtralisation d’une double soif, jamais étanchée, entre les deux tentations majeures, celle de la vie dépensée ou celle du repli méditatif.

L’aventurier ou le scribe.

Parmi les œuvres de l’esprit et de la main entassées dans ce vaste salon, la présence fragile d’une rose coupée nous parle de ce qui est inimitable, mais aussi quelle musique vient de résonner ici, digne du ciel impeccable dont elle provient ? »

Pascal Vinardel

.

« Le retour d’Ulysse »

.

« L’inconnue »

.

« La vigie »

.

« Pandore »

.

« Le vent chaud »

.

Dans l’exposition TERRA INCOGNITA qui se tient au Musée de la Banque à Hyères les Palmiers jusqu’au 19 mai 2024 , le peintre PASCAL VINARDEL semble nous tenir la main d’une toile à une autre, il a quelque chose à nous raconter et prend le temps de le raconter.

Il célèbre la lumière de l’aurore ou des dernières clartés du jour, juste avant que la nuit ne dépose son voile sombre. Vient le moment où les intérieurs s’éclairent, les familles se réunissent, les solitudes s’exacerbent…

Des tableaux qui suggèrent une chaleur intense. Une ville qui s’étire au creux d’une baie – est-ce toujours la même ? Les fenêtres et les portes ouvertes sur l’extérieur nous invitent à poser un regard attentif sur les paysages et les espaces clos : la petitesse de certains personnages et la hauteur des plafonds impressionnent, des rideaux comme des voiles gonflées par la brise, des tableaux ou des miroirs dorés aux murs, quelquefois une icône qui attrape joyeusement la lumière, verre, carafe d’eau limpide, piano, pendule, lampe à huile, ventilateur ou lustre à pampilles au plafond, au sol un tapis, des livres , des feuilles égarées, un chat qui médite… vestiges d’anciennes splendeurs, vestiges d’un passé révolu… Tout cela nous parlent d’intériorité, de souvenirs gravés dans la mémoire du cœur. L’atmosphère est paisible, silencieuse, les couleurs chaudes y participent. Au dehors, pas de routes goudronnées mais des chemins de terre, souvent sinueux ou pentus. Rues désertes, vieilles demeures tels des palais abandonnés, rares volets aux fenêtres, stores en toile écrue, un aéroplane, un bus, navires, automobiles d’un autre temps, personnages esquissés, presque fantomatiques, légers comme des plumes, fontaines, flaques d’eau circulaires…

Toutes ces images émanent d’un feu intérieur, une « terre inconnue » qui donne naissance à l’œuvre.

L’homme artiste commence par un texte – très beau – dans lequel il décrit un sujet, son intention, puis il crée le tableau. Là il maitrise totalement le geste, la main dessine, construit des architectures, les pinceaux immortalisent des ambiances liées au passé ou rêvées. La matière picturale est talentueusement travaillée, ombres et lumières sont omniprésentes.

À côté de ces grands formats, quelques petites peintures sur bois et des lavis en noirs et blancs qui confirment le grand talent de Pascal Vinardel.

Vous l’aurez sans doute compris, la découverte de cet artiste est pour moi un enchantement.

.

« … L’humanité n’a pas vieilli. Elle peut à chaque instant retrouver ses pouvoirs d’embellissement. C’est le monde qu’elle s’est fabriquée qui vieillit de plus en plus vite, drainé par ses nouveautés incessantes, se fissurant à chaque instant, se regardant tomber en miettes… » 

Jaime Semprun  1947-2010  dans « Andromaque, je pense à vous ! »  (œuvre posthume).

.

« Les joueurs »

.

« La grande terre »

.

« Anna au chemisier blanc »

.

« Le royaume »

.

.

« Noli me tangere« 

« … Au mur, un pan de « Noli me tangere » du Titien.

« Ne me touche pas » dit le Christ à Marie Madeleine. Sa résurrection accomplie, il n’appartient plus désormais au monde « tangible ».

Peut-on toucher l’aurore ? Étreindre un chant ? Peut-on s’emparer de ce qui est lointain ? Quoi de plus intact qu’une jeune fille ? Quoi de plus impalpable qu’une buée dans une vitre, qu’un visage reflété dans une glace, qu’une lumière d’aube qui saupoudre une chevelure, un livre, quoi de plus évanescent que l’air ?

Il est dit ici que le monde sonore et lumineux est inaccessible et ne peut s’appréhender que par la contemplation.

Mais il est dit aussi que le peintre, et seulement lui, par la magie de ses onguents et la conscience de son office, peut donner chair à ce monde et nous offrir, par le truchement mystérieux du tableau, de le « toucher ».

Pascal Vinardel.

Tableaux de Pascal Vinardel.

…..

Aspirer à l’authenticité…

BVJ – Plumes d’Anges.

19 commentaires sur “Luministe…”

  1. Fiorenza dit :

    Il fait encore nuit mais la lumière inonde la maison :
    le peintre inconnu vient d’y poser ses pinceaux magiques…
    Quel bonheur en effet, d’allier ainsi la richesse de la civilisation
    et la douceur de la méditation, ce mariage réussi que nous recherchons
    sans jamais nous lasser !

    Un soupçon de « Guépard » flotte au-dessus des toiles,
    une couleur méditerranéenne chaude et enveloppante,
    un rêve d’ocres au milieu des grisailles de l’hiver :
    merci, chère Brigitte, pour ce réveil en beauté !

  2. Thé âche dit :

    saisir l’insaisissable avec la brosse et les pigments, c’est toute la gageur du peintre il nous aide à approcher et il nous dit :on ne touche on n’atteint on ne peut que sentir du bout des yeux : pas d’accaparation autre que les sens et la pensée ?

  3. Dominique dit :

    Je ne connaissais pas ce peintre et je suis surtout sensible aux paysages : la grande terre et le royaume dont j’aime le thème et les couleurs chaudes

  4. Colo dit :

    Une grande sérénité dans tous ces tableaux, un peintre inconnu de moi aussi.
    Contemplation: oui, c’est le mot que lumière, couleurs, musique inspirent.
    Merci beaucoup, un beso.

  5. Florinette dit :

    Je découvre ce peintre grâce à ton article et j’ai pris beaucoup de plaisir à admirer toutes ses toiles. J’aime beaucoup l’extrait quand il dit que c’est ce monde qui vieillit et que c’est à nous de l’embellir, car nous seuls pouvons construire un monde où ne règne que la beauté. Merci Plumes d’Anges pour ce beau moment et doux dimanche, je t’embrasse.

  6. eki eder dit :

    je découvre ce peintre et ses tableaux avec à chaque toile un halo de lumière blanche
    bonne soirée Brigitte

  7. Aifelle dit :

    Il y a beaucoup à admirer et à contempler chez toi ce matin. Une totale découverte pour moi ce peintre, merci. Bonne semaine Brigitte, bises.

  8. Anne G dit :

    Problème: tout mon commentaire évaporé dans les limbes……….Juste reprendre que j’ai adoré ce bel article, ce peintre que je ne connaissais pas, somme toutes: classique, figuratif, mais qui crée une ambiance dans laquelle on se promènerait, intriguée, la citation de Semprun tout à fait exacte, le dernier paragraphe: peut -on toucher le monde sensible.? Je vais tout relire, tout apprécier. Merci pour ce très beau partage.

  9. Béa Kimcat dit :

    Des toiles splendides !!
    Une très belle découverte
    Bises Brigitte et bonne semaine

  10. Ulysse dit :

    Cette découverte Brigitte est aussi pour moi un enchantement En te lisant me sont venus à l’esprit ces vers d’Alphonse Lamartine :

    Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices ! Suspendez votre cours : Laissez-nous savourer les rapides délices Des plus beaux de nos jours !  » Assez de malheureux ici-bas vous implorent, Coulez, coulez pour eux ; Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent

    et tu m’as rappelé le roman Narcisse et Goldmund d’Herman Heisse que j’ai lu adolescent et que tu m’as donné envie de relire.

    Belle semaine à toi

  11. Cathie Flore dit :

    J’aime les couleurs, les ambiances, « Anna au chemisier blanc » et le dernier tableau avec la phrase latine tirée de l’évangile après la résurrection. Oui, on peut se laisser toucher par une œuvre sans la toucher de ses mains. L’émotion vient d’au-delà des sens.

  12. Bonjour Brigitte,
    Merci pour ce billet qui me permet de connaitre.
    Dès la première photo, coup de coeur pour ce salon de musique. J’aime cette ambiance, ces deux grandes portes qui s’ouvrent sur un vaste panorama, puis le violon. Un instrument que j’affectionne.
    Coup de coeur aussi pour Anna au chemisier blanc pour sa sobriété.
    Belle semaine Brigitte. Je t’embrasse

  13. daniel dit :

    Je ne connais pas ce peintre. Ses tableaux dégagent quelque chose de mystérieux comme une intériorité§

  14. manou dit :

    Je ne connaissais pas du tout ce peintre et je trouve en effet ses tableaux très lumineux. Il nous donne envie de regarder par la fenêtre…J’aime aussi ses portraits et le salon de musique me donne envie de réveiller ceux qui dorment pour les entendre jouer ! Quelle belle ambiance, je comprends que tu sois émerveillée par cette expo (c’est encore trop loin de chez moi, dommage…) mais merci pour le partage.

  15. Tania dit :

    Oh, merci de partager cette belle exposition. Je ne connais pas du tout cet artiste, mais je vais revenir ici pour regarder ses toiles une à une, tu m’as donné l’envie d’y entrer. Bonne semaine, Brigitte.

  16. Tania dit :

    Pièces ouvertes, fenêtres, miroirs, une lumière chaude éclaire ces toiles et voici même un chat attiré par le crépuscule… Ca me plaît.

  17. Mais je vais y aller ! C’est superbe ! Un grand merci.
    Sinon, à la Villa Tamaris, une magnifique exposition de photojournalisme de Pascal Maitre.
    Bonne fin d’après-midi.

  18. yannn dit :

    Je découvre cet artiste. Français.
    J’ai un faible pour les intérieurs, portes ouvertes.
    Et par la porte fenêtre, on découvre le ailleurs.
    Pour le  » noli me tangere « . J’ai fait un billet, de ce Christ
    que Marie Madeleine ne reconnaissait pas.
    Elle le voyait en jardinier. Une bêche en main.
    C’est aussi le nom d’une balsamine, qui au toucher,
    catapulte ses graines. Amic@lement. Yann

  19. Quelles splendides peintures d’intérieurs ! Merci Brigitte pour ce partage, je ne connaissais pas ce peintre.
    Je t’embrasse.

Laisser une réponse

*