Poussières…

10 octobre 2016

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« … Nous croyons parfois avoir tout oublié, que la rouille et la poussière des ans ont désormais complètement détruit ce que nous avons un jour confié à leur voracité. Mais il suffit d’un son, d’une odeur, d’un contact furtif et inopiné pour que soudain, les alluvions du temps tombent sur nous sans compassion et que la mémoire s’illumine avec la brillance et la fureur de l’éclair…

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… Le temps finit toujours par effacer les blessures. Le temps est une pluie patiente et jaune qui éteint doucement les feux les plus violents. Mais il est des brasiers qui brûlent sous la terre, des crevasses de la mémoire si sèches et profondes que jusqu’au déluge de la mort, ne suffirait pas, quelquefois, à les faire disparaître. On essaie de s’habituer à vivre avec ces plaies, on amasse silence et rouille sur le souvenir et quand on croit qu’on a tout oublié, il suffit d’une simple lettre, d’une photographie, pour faire éclater en mille fragments la dalle de glace de l’oubli…

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… Le temps passait avec tant de douceur, il glissait entre les maisons et les arbres si lent et si imperturbable, que je n’arrivais même pas à réaliser qu’il s’évaporait entre mes doigts comme un flacon d’alcool…

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… Le bois que j’avais préparé à cette fin était toujours humide, je l’avais pourtant coupé au printemps, avec la lune à son dernier quartier, pour que le vieux tilleul de l’école ne souffre pas et que son bois puisse résister très longtemps sous la terre. Le secret, je l’ai appris de mon père quand j’étais encore enfant. On ne le sait pas, mais un arbre est vivant, il perçoit les choses, il souffre et il se tord de douleur quand la hache entre dans ses chairs, formant stries et nœuds par lesquels pénètreront plus tard la moisissure et les vers qui finiront un jour par le pourrir. Mais avec la lune descendante, les arbres sont endormis et, comme un homme mourant soudain dans son sommeil, ils ne se rendent même pas compte qu’on est en train de les couper. Ainsi leur bois reste lisse, compact, impossible à pénétrer, capable de se maintenir des années sous terre.

J’ai toujours voulu mourir ainsi : comme un arbre assoupi, comme un tilleul envoûté, dans la paix de la nuit, par la lueur de la lune… »

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Extraits de : « La pluie jaune » 1985 Julio Llamazares.

« Illustrations : 1/« Paysage »  Charles Webster Hawthorne 1872-1930  2/« Lune au-dessus de la forêt »  Charles Warren Eaton 1857-1937.

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Traverser les nuits de la vie, avec confiance…

BVJ – Plumes d’Anges.

Des vies…

6 octobre 2016

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« … Y en a pas beaucoup des occasions dans la vie où tu peux dire ce que tu penses et en plus, de le dire bien… De le dire avec des mots déjà trouvés… De te servir d’un personnage inventé par quelqu’un d’autre pour passer en contrebande des trucs que toi aussi, tu trouves précieux… De dire qui tu es… Ou qui tu voudrais être… Et de le dire mieux que tu ne pourrais jamais le faire si t’avais pas déjà sous la main des phrases déjà si belles…

Extrait de : Billie.

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… Tu sais, Mathilde, si tu tiens vraiment à quelque chose dans la vie, eh bien, fais ce qu’il faut pour ne pas le perdre…

Extrait de : Mathilde.

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… – Mais, Yann… Mon jeune ami… Bien-sûr que je la connaissais. Les gens qu’on aime, on ne les rencontre pas, voyons, on les reconnaît. Vous ignoriez cela ?… »

Extrait de : Yann.

Extraits de : « Des vies en mieux » 2016  Anna Gavalda.

Illustrations : 1/« Martin-pêcheur » Peintre anonyme – Collection William Farquhar XIXème 2/« Flore » (détail)  Francesco Melzi  1493-1570  3/« Junonia orithya » Planche 33 du volume 2 des « Papillons exotiques »  Jacob Hübner 1761-1826.

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Illustration 2 : le très beau tableau de F.Melzi dans ce billet —> Pourquoi pas

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Vivre et tendre à mieux vivre…

BVJ – Plumes d’Anges.

Doux plongeon…

4 octobre 2016

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C’était hier au soir.

J’étais sous le charme, un spectacle envoutant,

une somptueuse palette de couleurs  !

Quand le soleil a « plongé »dans la mer,

des avions et leurs traînées célestes se sont mis à briller.

J’ai alors pensé avec émotion à ce peintre merveilleux,

humble poète,

sorte de funambule entre terre et ciel,

la tête pleine de chants d’oiseaux,

le cœur empli du parfum des roses,

qui disait :

« Au fond, je ne suis ni peintre, ni dessinateur, ni affichiste, ni écrivain, ni graveur.
Je ne suis ni abstrait, ni figuratif. Je n’appartiens à aucune école.
Mon but n’est pas de figurer dans une histoire de l’art.
Je n’ai rien inventé, puisque je dois tout à tout le monde.
Je ne comprends pas mes images, et chacun est libre de les comprendre comme il veut.
J’ai seulement essayé de fixer mes propres rêves, avec l’espoir que les autres y accrochent les leurs. »

JEAN-MICHEL FOLON.

Il s’est éteint un certain mois d’octobre de l’année 2005…

Si vous voulez encore rêver avec lui, vous pouvez suivre ces liens :

—>Jean-Michel Folon

—>Fondation Folon

Photos BVJ

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Plonger dans nos belles émotions…

BVJ – Plumes d’Anges.


Sage opération…

30 septembre 2016

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– Avant propos du livre

« Du grec anagramma, « renversement de lettres », l’anagramme est un mot formé à partir de lettres d’un autre mot, placées dans un ordre différent. Il n’est tenu compte ni des accents ni de la ponctuation. Cette opération malicieuse peut s’appliquer à tout type d’énoncé : nom, expression, phrase… C’est ainsi qu’on découvre des  pensées d’artistes dans la  tasse des peintres.

Tous les énoncés et les anagrammes sont signalés par des caractères gras…

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…  » Cueille le jour sans te soucier du lendemain« 

On le rencontre chez Horace, dans une ode adressée à une voyante ; on le trouve chez Ronsard, dans un sonnet dédié à une belle Hélène. Pourtant, c’est dans un quartier reculé d’Athènes, à l’époque hellénistique, que le Carpe diem a vu le jour. « Jouissons pleinement de l’instant, car le présent seul est le temps du pur bonheur d’exister. » L’homme qui rédige ces mots se nomme Épicure. Il a trente-cinq ans et vient de s’acheter un jardin pour un montant de quatre-vingts mines, une somme considérable – le prix d’une trirème avec son équipage. Il y « vit caché », selon son propre précepte. Existence simple et frugale. Végétalien, il s’accorde toutefois un morceau de fromage de temps en temps. Un verre de vin lui suffit. Peu s’en faut que ses hôtes ne vivent au pain et à l’eau ! La jouissance n’est pas affaire de quantité. Ainsi, dans l’enceinte du Jardin, les œuvres fleurissent, qui montrent la voie de la félicité.

Au seuil du Jardin,

une école, cent mille roses… »

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Extraits de : « Anagrammes pour lire dans les pensées » 2016 Raphaël Enthoven – Jacques Perry-Salkow  – dessins de Chen Jiang Hong.

Illustrations : 1/« Roses » Grace Jane Joel 1865-1924   2/« Jardin en mai »  Maria Oakey Dewing 1845-1927.

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Changer nos pensées et voir fleurir en nous des roses…

BVJ – Plumes d’Anges.

Coup de coeur…

26 septembre 2016

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 » On aurait dit le matin. Et on aurait dit le soleil. On aurait aussi dit que tous les lits étaient faits, les chaussures enfilées, les tabliers disparus, la rosée évaporée, toutes les fleurs de Liseron ouvertes. On aurait dit le silence et le désert.

Ce n’est qu’au dernier tintement de clochette de « Bonjour, Travail » que la fourmi ouvrit un oeil.

Et le referma aussitôt.

Elle replongea dans ce monde cotonneux et opaque où elle volait. Oui, elle volait, légère, sur une feuille de Tilleul parmi des immeubles rouge et miel… »

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– RENTRÉE LITTÉRAIRE 2016 –

« Derrière la brume »

Coup de cœur pour cette merveilleuse histoire

portée par de non moins merveilleuses illustrations !

Ramona Badescu et Amélie Jackowski

signent là, aux éditions Albin Michel, un très bel album cartonné,

un livre tendre et généreux,

destiné aux jeunes lecteurs.

On y parle de prêter attention à l’autre,

de l’accompagner, d’entendre sa souffrance,

de déculpabiliser,

mais aussi de savoir s’écouter…

Aminautes qui avez autour de vous, enfants ou petits-enfants,

partez à sa découverte, laissez-vous happer,

c’est du bonheur !

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Extrait de : « Derrière la brume » 2016  Ramona Badescu et Amélie Jackowski.

Le livre entre les jolies mains de Louba… Illustrations de couverture.

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Partager les belles valeurs avec les enfants…

BVJ – Plumes d’Anges.

Cadeau de saison…

23 septembre 2016

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Respect infini, plaisir immense,

gratitude pour ce doux et grand moment…

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« Des îles –

des pins sur les îles –

et le bruit frais du vent »

Masaoka Shiki

Photos BVJ – Plage de Léoube dans le Var.

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Ici et maintenant… tout est présent…

BVJ – Plumes d’Anges.

La joie d’être…

19 septembre 2016

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« … J’aime la tendresse de la terre sous mes genoux et j’aime aussi quand je la prends dans mes mains, quand elle glisse entre mes doigts. C’est comme une pluie, la pluie la plus douce qui soit. J’aime le miracle de ce silence qui éteint le tumulte de la cour. Et dans le ciel cet avion qui laisse une trace blanche ; il ne manque rien. Oh, je sais, il y a bien ces barbelés, il y a bien ces miradors mais je m’y suis fait. Ces barbelés, je peux les regarder longtemps, la tête renversée, je contemple ces formes enlacées et alors ce ne sont plus des barbelés : ce sont des corps qui font l’amour, c’est le croquis d’un peintre ou autre chose encore. Le surveillant aussi, là-haut, perché sur son mirador, il suffit d’un peu d’attention et c’est lui le prisonnier, c’est lui le chien exilé dans le ciel.

Ma parcelle dans le potager, j’ai mis des mois à l’obtenir. Des mois de bonne conduite pour avoir le droit de planter ds tomates et des courgettes, des poivrons et des oignons, des salades, des potirons. Ce que j’aime par-dessus tout, ce sont les potirons et les tomates, je ne sais pas pourquoi, peut-être pour leur couleur, ou pour leur démesure, surtout celle des potirons lorsqu’ils se mettent à enfler. J’en prends un énorme à pleines mains, je le soutiens et j’ai l’impression de sentir la force sous l’écorce, la vie qui pousse et qui réclame, éclate la carapace. Je réajuste la tige contre le tuteur, je resserre un peu le lien et je sais que ça suffit : il ne lui en faut pas plus pour cesser de ployer et croître de nouveau. Il fait beau, si beau, j’aime cet orange, ce rouge, ce vert, cette lumière qui traverse les feuilles et je suis dans les îles, là où le rhum permet de supporter la chaleur et de voir briller des serpents à la surface de l’eau, je suis partout où les grillons chantent leur bonheur d’être au monde, je suis allongé dans le sable, les bras en croix, partout où souffle le vent tiède…

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… Il ne comprend pas qu’ici, les déceptions n’ont pas le même poids : ici, on peut mourir d’espérer. Je lui dis que c’est le réel qui compte, c’est lui et lui seul qui peut nous rendre heureux. Mais je vois qu’il n’entend rien. Il a les yeux baissés. Dans un murmure, il dit qu’il me plaint. Alors je lui ordonne de bien m’écouter et je lui dis de me regarder. Je lui dis que ma sortie, je n’y pense jamais. Jamais. Je lui dis que j’ai cette vie-là à aimer et que c’est bien assez. Je lui dis que je ne veux pas de son espoir parce que l’espoir est un poison : un poison qui nous enlève la force d’aimer ce qui est là…

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… Un mot revient souvent dans la bouche du médecin, le mot comportement. (..) Il me dit qu’il veut comprendre ce que je ressens. Il me demande si je peux nommer ce sentiment, si je peux mettre un mot sur ce dont j’ai parlé, cette chose qui monte dans le ventre et même dans la gorge et qui parfois surgit quand je ne m’y attends pas. Je crois que c’est de la joie. C’est le mot qui me vient. Ses mains sont jointes devant lui et sa tête penchée. Il me fixe toujours. Je ne sais pas s’il pense à autre chose ou s’il est concentré et puis c’est comme un cri du cœur : « Mais… il n’y a pas de raison ! »… »

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Extraits de : « La joie » 2014  Charles Pépin.

Illustrations : 1/ et 2/ « Le jardinier potager »  Giuseppe Arcimboldo 1527-1593.

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Sublimer notre quotidien…

BVJ – Plumes d’Anges.

Instant paisible…

15 septembre 2016

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Quand elle s’est faite attendre,

quand elle sait rester fine,

quand sa musique douce chante délicieusement,

quand la terre desséchée étanche enfin sa soif…

Consciente de ma chance, bien à l’abri, dans la maison,

je lis avec amour ces vers de R.M.Rilke

et envoie vers ceux qui souffrent de trop d’eau,

d’apaisantes vibrations…

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« Vois-tu venir sur le chemin, la lente, l’heureuse

celle que l’on envie, la promeneuse ?

Au tournant de la route il faudrait qu’elle soit

saluée par de beaux messieurs d’autrefois.


Sous son ombrelle, avec une grâce passive,

elle exploite la tendre alternative :

s’effaçant un instant à la trop brusque lumière,

elle ramène l’ombre dont elle s’éclaire. »

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Extrait de : « La passante d’été  (Vergers) »  Rainer Maria Rilke 1875-1926.

Illustrations : 1/« Pins près de la mer » 2/« Pluie »  Bertha B.Lum 1869-1854.

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Partager sa paix intérieure…

BVJ – Plumes d’Anges.

Plume légère…

12 septembre 2016

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« … D’abord, il verse l’eau dans le creux de la pierre à encre, puis frotte lentement le bâton en mouvements circulaires contre la paroi. Ensuite, il saisit le pinceau entre ses doigts, le dispose à la verticale et, d’un geste ferme, applique la pointe sur le papier. Il laisse alors glisser sa main avec légèreté, avant de terminer le geste en diminuant la pression peu à peu.

Un seul mouvement suffit. Et la calligraphie apparaît, comme un vertige, sous la main du maître…

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… Chaque matin, Maître Kuro sort dans le jardin. Nourrit les carpes. S’occupe de la taille des végétaux. Respire le parfum des fleurs. Et ratisse inlassablement le champ de gravier blanc.

À chaque jour, un nouveau paysage.

C’est là son seul luxe. Qu’il préfère nommer plaisir…

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… Être attentif à une branche prise dans le vent du matin. Observer le mouvement de la brume et des nuages. Vivre les lieux. Respirer les parfums de la nature. Saisir l’instant.

Puis s’enfermer dans son atelier. Et reproduire en un trait unique les nuances de la réalité.

Travail solitaire.

Souffle divin.

Comme tous les artistes sur cette terre, changer le monde de façon invisible.

Et cependant évidente…

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… L’existence de Maître Kuro pourrait continuer ainsi indéfiniment, dans un calme et une sérénité qu’on qualifierait aisément de zen. Mais l’équilibre d’une vie peut à tout moment être balayé par l’imprévu…

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… – Quel nom avez-vous choisi de donner à votre pinceau ? (…)

Yuna réfléchit. Petit à petit elle comprend ce qu’est le zen dans la voie de l’écriture. Un style inspiré de l’instant, une esthétique où l’ombre prime sur la lumière. Où il est nécessaire d’observer une concentration extrême pour libérer l’énergie et la faire converger vers la pointe du pinceau.

Unité et beauté.

Art semé de mystères.

– Le mien se nommera « Plume légère »…

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… – Ce qu’il vous faut voir, c’est ce qui se trouve déjà sur la feuille devant vous, et qui pourtant ne se voit pas.

À ces mots, la jeune femme a une révélation. Le nœud qui était en elle se relâche soudain et son esprit s’ouvre comme une fleur dans la lumière du jour… »

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Extraits de : « Zen » 2015  Maxence Fermine.

Illustrations : 1/« Bai-kei » encre sur papier Shuho Myocho (Daitō Kokushi)  1282-1337 2/ Sceau japonais.

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S’ouvrir au souffle précieux de notre vie…

BVJ – Plumes d’Anges.

Doux animal…

8 septembre 2016

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« Nul besoin d’être bon.

Nul besoin de marcher sur les genoux

sur une centaine de kilomètres à travers le désert, repentant.

Il te suffit, simplement, de laisser le doux animal qui est en toi

aimer ce qu’il aime.

Raconte-moi le désespoir – ton désespoir – et moi, je te raconterai le mien.

Entre temps, le monde poursuit son cours.

Entre temps, le soleil et la pluie, en petits cailloux transparents,

balayent les paysages,

au dessus des prairies et des arbres profonds des montagnes et des rivières.

Entre temps, les oies sauvages, là-haut dans le ciel bleu et pur,

rentrent de nouveau au pays.

Qui que tu sois, aussi esseulé que tu puisses être,

le monde s’offre à ton imagination.

Il t’interpelle comme la voix rauque et animée des oies sauvages,

clamant encore et encore ta place

au sein de la famille des choses. »


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« Les oies sauvages » Poème de Mary Oliver trouvé sur le net (PDF de Guillaume Rodolphe)

Illustrations : 1/ et 2/ « Paysage d’automne avec oies sauvages et fleurs » Paravent japonais du XVIIème – Anonyme.

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À côté d’une peine fleurit une belle histoire…

BVJ – Plumes d’Anges.