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« … « Va vers nulle part
L’horizon n’est pas loin
Va vers nulle part
Tu connais le chemin »
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« Dans l’arrière cour du pavillon fricotaient les anophèles mâles et les femelles. Partout dans le petit gazon les insectes grésillaient tranquilles.
Une cabane était refuge à ceux qui cherchaient dans le soir les quelques notes énigmatiques qui pouvaient déverrouiller la nuit. Deux-trois touches, pianoter, comme les chiffres sur un verrou, un cadenas numéroté.
Plissant les yeux pour sentir dans le soir l’air banlieusard qui parvenait jusqu’à nous, on tournait la tête en tous sens exactement comme les insectes, en espérant que nous poussent sur le crâne des antennes paraboliques et paramétrées pour se connecter à la fréquence des anges, des messages qui défilent sans auditeurs sur la bande passante des songes. On voulait réveiller les mots endormis. Pardon pour le dérangement. »
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« À l’heure des premières figues, tout le monde s’en allait sur les places publiques dire son amour pour le pays intérieur.
Vas-y, vas-y ! Vas-y ! criaient les jeunes gens sous le soleil bien lourd. Mais aller où ? Dernièrement, un singe plébiscita les forces de l’ordre juste pour faire mumuse. Alors, de là à lui demander une main, un secours, un peu d’aide. Il n’y avait qu’un pas. Mais un pas de fourmi. Une plume tomba du ciel.
Les jeunes gens ne virent rien, occupés à crier vas-y, vas-y, mais une femme parmi eux conquérait, le front plissé, les hauteurs du monde. Alors naturellement, elle vit la plume. Il n’y avait pas d’oiseaux, il n’y avait pas de lune, il n’y avait pas de souffle, il n’y avait plus de poète, il n’y avait pas d’indulgence, il n’y avait pas de calme, il n’y avait pas de flamme, il n’y avait pas de marge intrépide où faire son beurre MAIS elle vit la plume »
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« Ce qu’on s’autorise à espérer
Prend racine quelque part »… »
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Arthur Teboul, auteur compositeur interprète du groupe Feu ! Chatterton, acteur, poète…nous propose ici un acte de poésie et un jeu libérateur et jubilatoire, qui étonne en premier lieu le poète en nous qui s’ignorait : « Comment, à l’intérieur de moi, j’abritais tous ces mots, et ne le soupçonnais pas ? »
Il suggère de penser à un nom, de l’écrire immédiatement puis d’y ajouter un adjectif… l’étincelle se produit, les mots affluent, ne pas les juger, ne pas les corriger, écrire ainsi rapidement pendant cinq à sept minutes, renouveler l’exercice chaque jour…
L’auteur nous offre une centaine de textes courts et une très belle présentation, « la poésie est partout. Elle peut être partout. « Le monde est rempli de visions qui attendent des yeux. Les présences sont là, mais ce qui manque, ce sont nos yeux. » C’est Christian Bobin qui le dit. La poésie est une attention, une délicate attention. »
Cette démarche m’a totalement séduite et d’instinct je crois en sa vertu.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
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Extraits de : « Le Déversoir – Poèmes minute » 2023 Arthur Teboul.
Illustrations : 1/ « Oiseaux » Tivadar Csontvary Kosztka 1853-1919
2/ « Le chant de l’oiseau » Ferenczy Karoly 1862-1917.
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Laisser chanter nos mots intérieurs…
BVJ – Plumes d’Anges.