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« … Paris déserté, les bancs alignés entre les tilleuls et les marronniers rouges, les rayons du soleil déclinant derrière les statues, les marches de l’escalier où nous ne cessons de nous arrêter pour nous embrasser : l’avenir nous appartient.
Quelques jours plus tard je recevrai ce message de Pierre : « Je n’aurais pas voulu mettre de tristesse dans ta vie mais je voudrais qu’on arrête. »
Et cette phrase qui me pulvérise : »Je ne peux pas faire l’amour sans amour. »
Il n’y aura jamais d’autre explication…
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… J’ai parlé de Célian avec le père de Rosalie. (…) Il m’a dit ce qu’il sait par expérience. Qu’un surdoué ce n’est pas quelqu’un de plus intelligent mais quelqu’un qui ne peut pas ne pas voir la fausseté du monde sans que ça lui soit insupportable. Qui réinterroge sans cesse le récit collectif, inepte, factice. Il faut juste aider Célian à rendre acceptable cette quête de sens, pour qu’elle ne devienne pas obsessionnelle. Lui apprendre à se laisser traverser par des émotions sans s’en aliéner, et en faire une liberté…
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… Juste avant notre voyage, le père de Rosalie m’a conseillé l’ouvrage d’un collègue. Un passage de ce livre m’a interpelée : « Les surdoués sont partout dans la littérature, et de manière récurrente chez des auteurs comme Tchekhov ou Shakespeare : avec leur rapport au monde passionné, douloureux, ce peuple d’écorchés, épris de justice, hante les œuvres, de Cyrano à Hamlet.«
Je me dis que Tycho Brahe était sans doute lui aussi un enfant déconcertant. J’ai retrouvé dans un de mes carnets quelques mots de Rilke à Marina Tsvetaïeva : « As-tu déjà entendu l’histoire de Tycho Brahe ? À une époque où on ne lui avait pas encore permis d’étudier l’astronomie, il connaissait déjà si bien, comme par cœur, le Ciel, qu’un simple regard là-haut lui fit cadeau d’une nouvelle étoile. Sa première découverte dans la nature étoilée… » et ces mots « il connaissait si bien, comme par cœur » résonnent singulièrement dans mon esprit aiguisé par les préoccupations autour de Célian…
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… Peu d’adultes connaissent encore au contact de la nature ces émerveillements de l’enfance : les poètes, les peintres, les botanistes et les photographes animaliers du panthéon singulier de Célian… Je me mets à plat ventre dans les céréales pour apprendre de mon grand garçon les secrets de l’organisation du vivant et retrouver grâce à lui cette connexion essentielle avec le monde que je n’aurais jamais dû perdre. Je me mets à plat ventre pour attendre la rencontre avec l’oiseau… ».
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Mary est la maman de Célian. Ce petit garçon est rêveur : fin observateur de la nature, il a du mal à se concentrer et exaspère son institutrice qui le traite de fainéant ! Mary est abandonnée par Pierre, une blessure d’enfance se rouvre, elle se sent comme pulvérisée par toutes ces injustices…
Elle entreprend un voyage vers l’ile de Ven ( anciennement Venusia) aujourd’hui suédoise. Un astronome, Tycho Brahe, né en 1546 y fit construire un palais observatoire de grande renommée et rédigea le premier catalogue des étoiles du XVIème, son assistant Kepler le fit éditer à sa mort. Mais plus rien n’existe sur cette ile, seulement des traces, des histoires, une nature complètement préservée et des gens merveilleux qui vont les accompagner sur un chemin de guérison.
C’est un roman paisible, une tranche de vie racontée par petites touches délicates. Les grandes villes ne peuvent convenir aux êtres hypersensibles, il leur faut l’amour, la terre, sa beauté, ses parfums, ses secrets, le ciel qui s’allume chaque nuit pour offrir sa féérie toujours renouvelée, l’espace et la liberté.
J’ai beaucoup aimé ce premier roman, la belle relation entre cette mère et son enfant, j’ai découvert cet astronome (j’ai hâte d’explorer plus en profondeur sa vie), ses travaux, ses liens avec Hamlet de Shakespeare, c’est une lecture qui apporte beaucoup, je vous la conseille…
Une lecture conseillée par ANNE il y a un an il me semble, merci Anne…
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Extraits de : « L’enfant céleste » 2020 Maud Simonnot.
Illustrations : 1/ « Uraniborg – Château et observatoire » Tycho Brahe 1546-1601 2/ « Champ de céréales » Jan Stanislawski 1860-1907.
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Emprunter un chemin de guérison…
BVJ – Plumes d’Anges.
Oui, Brigitte, l’observation des étoiles est un privilège « à portée d’yeux »
en permanence…et pourtant, combien d’humains en ignorent-ils les bienfaits ?
Le BONHEUR écrivait Kant pouvait se résumer en ayant sa conscience en paix
ET en observant le ciel étoilé au-dessus de sa tête : le prolongement ici présent
de cette philosophie suffira à embellir la semaine qui vient ;
merci, chère amie, la grandeur et la simplicité vont souvent de pair 🌟
la relation à l’univers que ce soit vaste ou plus intime questionne, des enfants sont plus sensibles, de nos jours ces aspects sont peu valorisés, et c’est vraiment dommage, merci pour tes conseils de lecture…
Je l’ai vu à plusieurs reprises mais il ne me tentait pas j’ai peut être raté un bon livre
Brigitte, comme ton article me plaît!! Il résume bien ce récit qui a tiré pour moi aussi les liens avec Tycho Brahe, Shakespeare…
Je lis de moins en moins ce dont tout le monde parle…et j’ai de moins en moins de déceptions!! L’édition a trop à voir avec les affaires.
Le dernier livre lu Le tutoiement des morts d’Alexandre Billon ne sera sur Amazon que le 23, mais je l’ai lu la semaine dernière en avant- première et j’ai aimé intensément ce récit. Et zou, je le recommande!!!
Et je t’embrasse!
PS, j’ai dû t’en parler il y a 2 ans, car sur amazon, ma critique L’ivre Libre) date du 10 mai 2022. Si cela peut donner envie à tes visiteuses de le lire…
C’est un livre qu’on m’a offert ; sur le coup, il ne m’ pas accroché. J’ai attendu une demi- année, puis…….
Sans le regretter, bien au contraire, il m’a appelée et happée !
Belle écriture, sans plus ; 2 « héros » intéressants (Célian et sa maman), mais sans plus encore ; histoire somme toute banale ; et pourtant, idée incroyable et forte, un 3° personnage, historique celui- là, vient se mêler au roman et lui donne une coloration historique et étrange à la fois ; celui- là : Tycho Brahe qui créa au XVI° siècle un observatoire comme jamais l’occident n’en avait construit, est unique, passionnant, un génie et celui qui sans doute a inspiré Hamlet. Les clins d’œil littéraires abondent, sans être pesants à ceux qui ne les décèleraient pas. Par exemple, le professeur qui enquête sur place au sujet de Tycho Brahe et Shakespeare s’appelle des Esseintes, nom emprunté à Huysmans (A rebours), sorte d’anti- héros nouveau né au XIX° siècle.
Je suis plutôt attirée par les pays chauds, j’ai eu pourtant eu envie de filer en Suède sur l’île de Ven où …n’existe plus le site créé par l’astronome. Heureusement ! Je n’aurai pas à tenter ce périple sur un lieu mythique qui conservera intact son caractère exceptionnel… L’île représente le paradis perdu, l’enfance, la nature préservée, la solitude nécessaire à la reconstruction.…
Tout cela est bien entremêlé, bien imaginé ; c’est un livre particulier, lumineux, original, dépaysant, qui ne sera pas oublié sitôt que lu…Comme tant d’autres!
Extraits:
– A propos de Tycho Brahe : « Il restera cet homme qui, un jour, a demandé une île en cadeau pour mener la vie qu’il voulait. Et entre la mer, la forêt et ce ciel étoilé qu’il était venu contempler nuit après nuit, c’est l’inverse du repli que nous avons trouvé ici »… (page 130)
-« Mon existence était une eau qui coule entre les mains. Je désirais dormir, oublier et être oubliée. Ne plus jamais avoir mal, ne plus jamais aimer. »
-J’évoque ces mondes flottants qui gravitent en silence, le mouvement à la fois apparent et inimaginable de cette nuit infinie, son architecture secrète, et ces autres morts dont la brillance nous éblouit encore. Il me répond que ce qui le fascine le plus ce ne sont pas les étoiles scintillantes mais le noir entre les lumières. (pages 114-115)
Cela ressemble (avis personnel) à ce qu’on pourrait dire de l’écriture!
Connaître le ciel par cœur et avoir en cadeau une nouvelle étoile… Voilà qui fait rêver et ne peut que donner de l’énergie !
Oui, on ressent beaucoup de paix dans la présentation de ce livre et la paix est toujours tentante.
Je l’ai lu aussi et beaucoup aimé. Lire tes extraits ce matin me replonge dans cette lecture toute douce. J’ai encore plus aimé « l’heure des oiseaux » de la même autrice. Comme toujours j’apprécie tes illustrations et tes extraits.
Voilà une lecture à la fois porteuse de sens et de connaissance : j’ignorais tout de Tycho Brahé, cela m’intrigue. Je note le titre, merci, Brigitte. (Pour l’anecdote, le chaton Mina d’appelait Venusia au refuge, j’ai donc appris d’où cela venait ;-).
Ton compterendu donne envie de lire ce livre…
Tu parles d’un univers dans lequel je me retrouve à cent pour cent. Un enfant différent, exacerbé, sûrement hypersensible, un amoureux d’étoiles, un rapport au monde sensuel et déchiré, une quête de sens. Une institution qui ne comprend pas et rejette : j’ai vécu tout cela.
Je le vis encore, mais de façon plus apaisée.
Tout cela me donne envie de lire ce livre, dont même le titre me parle complètement
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Je me suis arrêtée récemment sur « l’heure des oiseaux » en librairie, intriguée par le titre et l’histoire. Grâce à Manou j’apprends que c’est la même autrice. Je note son nom et verrai quel titre me parlera le plus.. bonne journée Brigitte. Bises.
Merveilleux billet qui donne envie de lire ce livre et m’intrigue …..suivi de commentaires très intéressants. Merci à toutes. Merci brigitte
Kepler, oui, astronome de renom.
Liste des étoiles visibles, tu me l’apprends.
Tu nous en diras plus, je crois.
Et pour Tycho Brahé, je crois qu’il a donné son nom à un cratère sur la lune.
Un des plus visibles? Le cratère rayonnant de la lune.
Comme le point de départ des quartiers d’oranges.
Là où l’orange a la trace de l’ancienne fleur.
https://www.groupeastronomiespa.be/lunetychotit.jpg
Et la mère de cet enfant, pulvérisée, ça en dit long.
Amic@lement. > Yann
merci pour ce partage intéressant
bon wk Brigitte
Merci chère Brigitte pour ton partage. Je ne connais pas cet auteur, je note !
Il existe tellement d’enfants écorchés, malmenés, inadaptés à notre monde mais tellement riches à écouter.
Bon dimanche à toi. Avec des bises chaleureuses. Claudie.
La nature est le grand livre dans lequel il faut se plonger sans cesse ! merci Brigitte pour cette idée de lecture Belle semaine à toi