Mutations…

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« … J’ai une seule question brûlante pour traverser l’existence : « Qu’est-ce-qu’un homme ? »

Un homme qui attend son heure dans les couloirs de la mort, se pose cette question. Dans cette antichambre, il n’y a plus de mains, plus de politique, plus de philosophies, plus de religions. Il y a la solitude la plus intime. La véritable unité des hommes est fondée sur cette solitude. Ensemble c’est seul, parce que toute l’humanité a ses assises dans la conscience de chacun.

Je quitte les empilements successifs : le vacarme du mental, les gémissements de l’émotionnel et le voile de mes sensations. Mes réactions archaïques de panique et de colère me subliment.

Qui peut me confisquer ma mutation ? Seule la peur peut tout faire échouer…

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Passons tous ensemble dans une autre ère. Comme si un jour un poisson, n’ayant plus assez d’eau, s’asphyxie et mute brusquement pour trouver un autre mode respiratoire. La fin du poisson que nous sommes, ce n’est pas la mort, c’est la mutation, nous sommes « amphibiens » vers une nouvelle conscience.

Et les lois qui régissent le poisson ne sont plus celles de l’oiseau que nous devenons. C’est une autre façon d’être au monde. Un monde où les lois sont différentes et où la mort n’existe pas. C’est le corps qui fait le pont. Traversons tout l’espace intérieur capable de tout accueillir pour que l’universel, que nous devenons, corresponde à l’univers que l’on suscite. 

Soyons créateurs. Contactons cette force d’une douceur qui comprend ce que nous ne comprenons pas. Personne ne peut tuer cette création.

C’est le nouveau chaînon de notre évolution pour une espèce moins tragique. Ce n’est pas la politique, ce ne sont pas les religions, ce ne sont pas nos philosophies qui vont nous sortir de là. Personne autre que notre battement de cœur. C’est notre seule réalité. Notre réel est cette mine d’or en chacun de nous… »

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C’est un texte bouleversant où bienveillance et lumière fleurissent à chaque page, préfacé par Annick de Souzenelle et postfacé par Christian Bobin. L’auteure est née en 1977 atteinte du Syndrome d’Eisenmenger. Son enfance est douloureuse sur tous les points, c’est la création qui la sauve, elle dessine et peint chaque jour.

Elle est opérée en 2012 par trois magnifiques chirurgiens qui lui greffent un cœur et deux poumons. Elle traverse quarante jours de coma et revient à la vie riche d’une grâce, elle sent l’âme du monde. Ce livre est très beau, le feu intérieur de Frédérique Lemarchand nous touche au plus profond de nous-même, sa langue est splendide…

Vous pourrez en savoir plus sur elle et admirer ses œuvres —> ICI

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Extraits de : « Cantique du coeur »    Frédérique Lemarchand.

Illustrations : 1/« Sommets alpins »  John Ruskin   1819-1900  2/« Création du monde 2 »  Mikalojus Konstantinas Ciurlionis   1875-1911.

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S’ouvrir au monde…

BVJ – Plumes d’Anges.

13 commentaires sur “Mutations…”

  1. C’est tout à fait vrai que seule la peur peut faire échouer… Merci pour cet extrait et les illustrations. Je suis plus sensible à la première, de Ruskin.
    Bonne journée.

  2. Poussy dit :

    Depuis que j’ai lu Frédérique Lemarchand, plus rien n’est pareil.
    À la première lecture j’ai été, comme toi, percutée, j’ai lu et relu ces mots incandescents que maintenant je commence à intégrer, à comprendre… et à vivre.
    Moi non plus, personne ne me volera ma mutation.
    Et hier, j’ai éclaté de rire, d’amour et de gratitude devant la colère d’une amie chère, qui n’était juste cette fois-ci qu’une autre forme extraordinaire de la vie, expérience puissante.
    Un seul être PARLE et tout est transformé, excuse moi Lamartine.
    Tu as choisi un des plus beaux extraits de ce livre dont chaque mot alimente un incroyable feu d’amour.
    Merci Bribri de mon coeur

  3. Fiorenza dit :

    Nous touchons ici à l’essentiel !
    Rien à ajouter sinon un remerciement pour ce témoignage bouleversant !

    Amitiés granitiques de Fiorenza

  4. Dominique dit :

    je vais me précipiter c’est évident, j’ai déjà beaucoup lu sur la douleur car c’était mon métier de soulager et puis je suis passée par là aussi alors ce type d’écrits j’y adhère totalement et cet extrait donne immédiatement l’envie de lire le reste
    merci merci merci

  5. Tania dit :

    A la première illustration, j’ai cru que tu allais parler de la fonte des glaciers, mais les extraits évoquent une autre fonte, celle du mur de glace que nous dressons parfois devant les changements dans notre vie ou dans le monde qui nous effraient. Je vais aller cliquer sur ces liens, merci.

  6. Anne dit :

    J’en ai entendu parler, et j’ai très envie de le lire; cet extrait me semble représentatif et bien choisi. Merci à toi qui m’as fait connaitre Alain Cadéo ou Antoine Marcel, par exemple!

  7. Adrienne dit :

    ce qu’elle a vécu lui a fait connaître le prix de la vie, pourquoi faut-il qu’il nous arrive d’abord des choses graves (le plus souvent) avant que nous ne nous en rendions compte nous aussi…
    merci Brigitte!

  8. Une pensée tellement aiguisée par l’expérience traversée qu’elle nous entraine au plus profond….
    Merci infiniment Brigitte pour ce texte. Je t’embrasse. Claudie.

  9. Aifelle dit :

    Je ne connais pas cette auteure, par contre je connais bien Annick de Souzenelle, je m’empresse donc de noter. J’ai suivi ton lien et je vais y revenir plus tard, il y a beaucoup à voir. Bonne journée Brigitte.

  10. angedra dit :

    Merci pour la découverte, j’ai suivi ton lien…

  11. Ulysse dit :

    Merci Brigitte de nous parler de cette auteure magnifique qui effleure le mystère de l’être (on ne le résoudra jamais) le mystère de la vie, cette étincelle qui fait nager les poissons, voler les oiseaux, grandir les arbres, rire et pleurer les humains. Beau dimanche

  12. Florinette dit :

    Tu l’as magnifiquement mis en lumière à travers ce très bel extrait ! C’est un livre vibrant qui ne laisse pas indifférent… Merci Plumes d’Anges et beau dimanche, je t’embrasse.

  13. Mayalila dit :

    Merci pour ce beau texte. C’est souvent par la souffrance et la maladie que l’on entre dans la vraie vie. C’est le portique royal…

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