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« … D’abord, il verse l’eau dans le creux de la pierre à encre, puis frotte lentement le bâton en mouvements circulaires contre la paroi. Ensuite, il saisit le pinceau entre ses doigts, le dispose à la verticale et, d’un geste ferme, applique la pointe sur le papier. Il laisse alors glisser sa main avec légèreté, avant de terminer le geste en diminuant la pression peu à peu.
Un seul mouvement suffit. Et la calligraphie apparaît, comme un vertige, sous la main du maître…
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… Chaque matin, Maître Kuro sort dans le jardin. Nourrit les carpes. S’occupe de la taille des végétaux. Respire le parfum des fleurs. Et ratisse inlassablement le champ de gravier blanc.
À chaque jour, un nouveau paysage.
C’est là son seul luxe. Qu’il préfère nommer plaisir…
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… Être attentif à une branche prise dans le vent du matin. Observer le mouvement de la brume et des nuages. Vivre les lieux. Respirer les parfums de la nature. Saisir l’instant.
Puis s’enfermer dans son atelier. Et reproduire en un trait unique les nuances de la réalité.
Travail solitaire.
Souffle divin.
Comme tous les artistes sur cette terre, changer le monde de façon invisible.
Et cependant évidente…
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… L’existence de Maître Kuro pourrait continuer ainsi indéfiniment, dans un calme et une sérénité qu’on qualifierait aisément de zen. Mais l’équilibre d’une vie peut à tout moment être balayé par l’imprévu…
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… – Quel nom avez-vous choisi de donner à votre pinceau ? (…)
Yuna réfléchit. Petit à petit elle comprend ce qu’est le zen dans la voie de l’écriture. Un style inspiré de l’instant, une esthétique où l’ombre prime sur la lumière. Où il est nécessaire d’observer une concentration extrême pour libérer l’énergie et la faire converger vers la pointe du pinceau.
Unité et beauté.
Art semé de mystères.
– Le mien se nommera « Plume légère »…
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… – Ce qu’il vous faut voir, c’est ce qui se trouve déjà sur la feuille devant vous, et qui pourtant ne se voit pas.
À ces mots, la jeune femme a une révélation. Le nœud qui était en elle se relâche soudain et son esprit s’ouvre comme une fleur dans la lumière du jour… »
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Extraits de : « Zen » 2015 Maxence Fermine.
Illustrations : 1/« Bai-kei » encre sur papier Shuho Myocho (Daitō Kokushi) 1282-1337 2/ Sceau japonais.
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S’ouvrir au souffle précieux de notre vie…
BVJ – Plumes d’Anges.
Un art transcendant. Que de belles révélations tu nous livres Brigitte ! Douce journée à toi. Bises. Joëlle
la calligraphie c’est vraiment un bonheur pour l’oeil et pour l’esprit
Un beau texte, qui résonne parfaitement avec la nature de l’artiste.
Quel art ! ! un art à dimension spirituelle.
L’âme est dans le pinceau …
Que c’est beau !
Il y a bien longtemps, j’ai découvert Zao Wou-ki lors d’une exposition à Montauban. J’en ai gardé un souvenir de lumière et de légèreté.
Ton beau texte et son illustration me font penser à » l’Unique Trait de pinceau » de Fabienne Verdier.
» un seul mouvement suffit » …entre art, philosophie, travail et souffle. Merci à toi !
L’imprévu peut être l’encre qui s’étale en une belle tâche noire…
Je suis dans la profondeur du noir en ce moment !
Des bises
J’ai pensé à Fabienne Verdier aussi en lisant le texte. J’avais beaucoup aimé « Neige de Maxime Fermine, me voilà très tentée par ce titre-là. Bises Brigitte.
Oh merci Brigitte, un art de vivre, de percevoir l’invisible et de le peindre-dessiner avec légèreté, ce texte est magnifique!
Une délicate plume légère si bien illustrée…
J’aime, tout simplement! Bises