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… »Emmanuel Kant, en effet, a eu raison de le rappeler : on confond souvent l’agréable et le beau. Si un vin de Bordeaux qui flatte nos papilles peut être dit « agréable », une symphonie de Beethoven n’est pas agréable mais belle. Pourquoi ? Parce qu’elle ne s’adresse pas à nos papilles mais à notre pensée. Elle ne vise pas nos sens mais du sens.
Qu’est-ce que le sens ? Le sens est lié au symbole, et le symbole à la représentation. Ainsi une symphonie de Beethoven est belle parce qu’elle symbolise quelque chose. Quoi ? Un monde. On écoutait des sons, et soudain voilà que ce ne sont plus des sons, mais ici la grâce d’un chant d’oiseau un matin de printemps, là le tonnerre un soir d’orage. Le son s’est fait vision. Nous voyons des paysages et, à travers ces paysages, nous voyons tous les sentiments de l’homme défiler afin de nous parler de la condition humaine, qui doute, qui espère, qui lutte et qui aime. Si, dès lors, le son peut se faire image et n’être pas un simple son, n’est-ce pas là le signe que la condition humaine peut échapper à la banalité parce qu’il y a plus dans un son qu’un simple son ? N’est-ce pas dans cette capacité qu’a une œuvre de transfigurer le réel, afin de l’élever à la dignité d’un sens, que réside la beauté ? Le beau n’est-il pas cette alchimie faisant découvrir du sens là où il n’y aurait pu avoir que du banal ou de l’agréable pour les sens ?
Revenons à la séduction. Quand une femme se fait belle, est-ce si superficiel ou si rusé que cela ? N’est-ce pas aussi transformer le monde des apparences afin d’élever celui-ci ? Une femme qui est belle parce qu’elle a su se faire belle ne devient-elle pas une apparition révélant les possibilités insoupçonnées de la féminité ? Où est la ruse quand la séduction devient ainsi un art, et l’art une élévation de ce que l’on touche ?
La beauté est harmonie. Promesse également. Est beau le fait de passer du désordre à l’ordre, de surmonter le chaos. La beauté en ce sens, vient de loin… »
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Extrait de : « Petit précis de philosophie – Vivre » 2005 Bertrand Vergely.
Tableaux : 1/« Pianiste » 2/« Demoiselle du château » Albert von Keller 1844-1920.
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Entendre la musique de la beauté…
BVJ – Plumes d’Anges.
oh oh tu te fais bien philosophe aujourd’hui mais tu as toujours la main heureuse pour tes illustrations elles sont aériennes
Ces deux tableaux et ces réflexions matinales m’ ont accroché le coeur…:-))
» Qu’ est-ce que le beau » fut mon sujet de dissert au bac…je l’ ai moins bien traité que toi …!!
Merci pour ce joli début de journée
Les tonalités du premier tableau sont superbes. Et le texte de Vergely pousse à la réflexion, venant d’un philosophe, ce n’est pas surprenant.
J’ai adoré B.Vergély dans Une vie pour se mettre au monde (avec M. de Hennezl) c’est fort sous une approche simple; merci!
Je découvre ce philosophe et sa réflexion sur le sens et la beauté me plait beaucoup. Je crois que je vais creuser un peu plus loin, ayant lu sur Internet qu’il vient d’écrire un livre sur l’émerveillement. De bien belles reproductions de peinture par ici !
Le beau touche au coeur, il s’impose comme une évidence .
Tout le monde n’en a pas la même perception
mais toutes sont respectables … l’harmonie ne laisse personne insensible.
Belle journée et bises.