Instant présent…

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… » Que l’ importance soit dans ton regard, non dans la chose regardée…

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… Regarde le soir comme si le jour y devait mourir ; et le matin comme si toute chose y naissait.

Que ta vision soit à chaque instant nouvelle.

Le sage est celui qui s’étonne de tout…

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Il y a des maladies extravagantes

Qui consistent à vouloir ce que l’on n’a pas

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… Ne désire jamais, Nathanaël, regoûter les eaux du passé.

Nathanaël, ne cherche pas, dans l’avenir, à retrouver jamais le passé. Saisis de chaque instant la nouveauté irresemblable et ne prépare pas tes joies, ou sache qu’en son lieu préparé te surprendra une joie autre.

Que n’as-tu donc compris que tout bonheur est de rencontre et se présente à toi, dans chaque instant comme un mendiant sur ta route. Malheur à toi si tu dis que ton bonheur est mort parce que tu n’avais pas rêvé pareil à cela ton bonheur – et que tu ne l’admets que conforme à tes principes et à tes vœux.

Le rêve de demain est une joie, mais la joie de demain en est une autre, et rien heureusement ne ressemble au rêve qu’on s’en était fait ; car c’est différemment que vaut chaque chose…

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… Crois-tu pouvoir, en cet instant précis, goûter la sensation puissante, complète, immédiate de la vie, – sans l’oubli de ce qui n’est pas elle ? L’habitude de ta pensée te gêne ; tu vis dans le passé, dans le futur et tu ne perçois rien spontanément. Nous ne sommes rien, Myrtil, que dans l’instantané de la vie ; tout le passé s’y meurt avant que rien d’à venir y soit né. Instants ! Tu comprendras, Myrtil, de quelle force est leur présence ! car chaque instant de notre vie est essentiellement irremplaçable : sache parfois t’y concentrer uniquement…

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… Nathanaël, je t’enseignerai la ferveur…

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… Jette mon livre ; dis-toi bien que ce n’est là qu’une des mille postures possibles en face de la vie. Cherche la tienne. Ce qu’un autre aurait aussi bien fait que toi, ne le fais pas. Ce qu’un autre aurait aussi bien dit que toi, ne le dis pas, – aussi bien écrit que toi, ne l’écris pas. Ne t’attache en toi qu’à ce que tu sens qui n’est nulle part ailleurs qu’en toi-même, et crée de toi, impatiemment ou patiemment, ah ! le plus irremplaçable des êtres. »

Extraits de « Les nourritures terrestres »  André Gide 1869-1951.

Tableaux : 1/ « Villa Olmo – Lac de Come » Giuseppe Bizi 1787-1869  2/« Vue de la Villa Adriana – Tivoli »  Fritz Petzholdt 1805-1838.

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Dans l’instant présent, se créer nouveau, unique… S’élever, encore, toujours…

BVJ – Plumes d’Anges.

6 commentaires sur “Instant présent…”

  1. Alba dit :

    Absolument merveilleuses ces illustrations et ces extraits des Nourritures terrestres.
    Un livre qui vraiment m´a touché.
    Que je vais relire d´ailleurs, merci.

    Heureuse Année 2011

  2. je lis et relis sans cesse ce beau billet, beau car au texte d’une saveur bien particulière. Merci Plume.

  3. Oui , c’est vrai que ce texte est magnifique , les créateurs aiment … EB.

  4. valdelia dit :

    Un très beau texte de Gide, si plein de vérités. A lire entre les lignes pour mieux comprendre encore.

    Les tableaux choisis sont très beaux, merci pour tout cela, Brigitte !

    V.

  5. poussy dit :

    Depuis le temps que je suis là, à lire et à relire ce texte si dense, à rêver à la possibilité merveilleuse de recommencer, de comprendre mieux, de voir plus profond…
    Et ces tableaux, ces tableaux! Ils ouvrent une telle perspective!
    Brigitte, ce billet est d’un luxe inoui, comment te remercier à la hauteur de ce qu’on ressent??

  6. karine dit :

    S’étonner de tout a chaque instant, en ces impressions réside sans doute la clef de toute créativité, de toute élévation, chacun de nous alors devient unique et précieux, pour lui-même mais aussi pour l’autre…Merci Brigitte pour cette note si belle!

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