Mères de la lumière…

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« … Vois-tu, ma petite Dyja, contrairement à l’homme, les plantes se tournent vers la lumière. Ma grand-tante affectionnait ce genre d’équations, l’humain et le végétal, l’humain et l’animal…

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Sous

un

ciel

nouveau

une

nouvelle

terre

on

entend

un

oiseau…

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… Même si elle ne croyait pas en l’homme, ma grand tante avait foi en l’enfant. Ou disons plutôt : elle ne croyait en l’homme qu’en deçà de 50 cm. Cela correspond également au récit de ses collègues de la maternité. Selon elle, il y avait d’une part l’être humain et d’autre part l’enfant. Tout ce qui était petit, et de préférence plus petit que petit, vulnérable et faible, suscitait son intérêt et éveillait sa tendresse, que ce soit dans le monde des hommes, dans le règne animal ou végétal. La progéniture de toutes les espèces, surtout juste après la naissance, les chatons, les agneaux, les poulains d’un jour, le premier pissenlit du printemps, les œufs fragiles des oiseaux, les jeunes dans leur nid, les mouches et les abeilles, et jusqu’aux pommes de terre grenailles, suscitait en elle admiration et sensation de beauté. Elle préférait les petites baies des montagnes aux grosses gorgées de sucre, les graines et les bourgeons plutôt que les plantes arrivées à maturité, elle se réjouissait de voir paraître les petites pousses fines et vert tendre sur une tige et les caressait du bout des doigts en disant : la gracilité est un signe qui ne trompe pas. Elle s’inquiétait aussi beaucoup de tout ce dont l’existence était menacée dans la nature, les animaux et les plantes trompés par la promesse illusoire d’un printemps imminent, avec sa lumière froide qui s’infiltrait dans les moindres recoins avant de disparaître sans crier gare sous une épaisse couche de neige au moment précis où les arbres commençaient à bourgeonner et où les brebis mettaient bas.

Là où les manuscrits se contredisaient, c’est que même si ma grand-tante prévoyait la disparition de l’être humain, elle supposait qu’il y aurait dans le monde du futur une place non seulement pour les animaux et les plantes, mais aussi pour les enfants.Et pas uniquement eux puisque deux autres catégories y seraient également représentées. D’une part les gens qui avaient conservé leur âme d’enfant, qui s’amusaient à souffler sur les graines de pissenlit et savaient s’étonner, et d’autre part – ce qui n’a rien de surprenant, a souligné ma sœur – les poètes… »

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Encore une lumineuse histoire, en terre de glace,  de cette auteure tant aimée  !

La narratrice, Gyja, exerce le beau métier de sage-femme – mère de la lumière en islandais -, comme sa grand-tante Fifa, qui, à son décès, lui a légué son appartement et tout ce qu’il contenait, des manuscrits entre autres choses et quels manuscrits, ils fourmillent d’éclairages sur la complexité de la nature.

Il y a dans ce roman mille et un détails du quotidien qui, suite à la traversée de l’ombre, trouvent résolution dans l’arrivée de la lumière.

Les fils conducteurs nous montrent l’importance des relations humaines et de l’observation de la nature, la richesse infinie des beaux souvenirs qui sont une éternelle force intérieure.

La générosité, le courage, le don de soi, la connaissance, la transmission entre générations, les « hasards heureux » illuminent l’existence de ceux qui y croient, les vrais poètes de la vie !

Ce fut pour moi un très doux moment de lecture…

Dasola en avait parlé —>

Extraits de : « La vérité sur la lumière »  2021  Audur Ava Olafsdottir.

Illustrations : 1/« Ours polaire »  et  3/ « Scène d’été »  Thorolf Holmboe  1866-1914  2/ « Le monde de la mer »  Planche XXXI – Développement du Pluvier doré – Alfred Frédol  1804-1863.

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Rechercher les sources de lumière et les transmettre…

BVJ – Plumes d’Anges.

13 commentaires sur “Mères de la lumière…”

  1. thé ache dit :

    l’espoir que peut représenter un petit : devenir, mais il en est qui voit dans l’enfant « le connard qu’il deviendra plus tard » je ne sais plus qui adit cela, l’humain a rompu le lien qui existait avec la nature : sa prolixité, son absence de vouloir le gain, l’espoir qu’une éducation pourra agir et dessiner un avenir plus généreux….

  2. L’arrivée d’un Petit est une lumière qui entre dans la maison. Un nouveau petit fils a agrandi notre famille ce 25 décembre, et cette fragilité, cette page blanche d’une vie en devenir nous détournent joyeusement de l’ambiance morose ambiante.
    J’ai déjà entendu parler de ce livre, ton article me convainc de le lire !
    Merci chère Brigitte et Douce fin de semaine.

  3. Fiorenza dit :

    À ton diapason et à celui de « la petite verrière », j’applaudis la musique
    que fait entendre ton morceau d’aujourd’hui, ma chère Brigitte :
    oui, nous pouvons devenir, ou plutôt, rester de grands enfants,
    Jacques Prévert nous sert de modèle…si nous venons à l’oublier 😻

    Je ne connais pas l’auteur de « La vérité sur la lumière »,
    mais quelle finesse, quelle légèreté, dans cet extrait si poétique !
    N’oublions pas que TOUTES les plantes, en effet,
    grandissent en s’emplissant de lumière !

    Je pense souvent à la fameuse déclaration de Diogène qui cherchait UN HOMME,
    pourquoi ne pas rechercher dans les yeux de tous ceux que nous croisons
    l’étincelle de l’ENFANT qu’ils furent ?
    Et si notre quête n’aboutit pas, eh bien…passons notre chemin,
    le monde est vaste et les enfants, petits et grands, nous y attendent ❣️

    Dans la contemplation des primevères graciles, des boutons de camélias
    et des minuscules verdiers, je te remercie et t’embrasse chaleureusement !

  4. Anne dit :

    Oh je sens que je vais aimer ça, le commander, le lire!! Merci, incomparable lectrice!!!

  5. Célestine dit :

    Il est si important de transmettre la lumière…
    Et tu fais cela très bien, ma Plume.
    Ces extraits sont riches et pleins d’enseignements.
    •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

  6. Adrienne dit :

    j’aime beaucoup cet auteur moi aussi!
    et quelles belles illustrations encore sur ce billet!

  7. C’est magnifique.
    Ici, sur ce blog, on rencontre ton âme d’enfant – c’est pour cela qu’on revient.

  8. Aifelle dit :

    J’aime beaucoup cette autrice, je ne vais pas manquer de lire celui-là. Il y a beaucoup de tendresse pour les petits et les bancals dans ses romans et une poésie propre aux Islandais. Elle est très agréable à écouter aussi, avec une bonne dose d’humour (en français, qu’elle parle bien). Bonne journée Brigitte.

  9. Dominique dit :

    les écrivains nordiques parlent si bien de la lumière sans doute parce qu’elle leur est précieuse parce que rare pendant tout l’hiver

  10. DANIEL dit :

    La grande vertu de l’enfance, c’est l’innocence, une vertu que le monde nous fait perdre

  11. Ulysse dit :

    C’est une vision très « rousseauiste » du monde. L’homme naît bon et la société le corrompt ! Hélas les enfants sont parfois cruels entre eux ! Il y a des enfants et des gens âgés curieux et ouverts au monde et des enfants déjà blasés et vieux ! Pour se prémunir contre la violence il faut chaque matin remettre en cause ce que l’on sait et regarder le monde comme si on le découvrait…Bon week end Brigitte

  12. Tania dit :

    Une première étoile vient de s’allumer dans le ciel juste en face de ma fenêtre. La lumière du couchant était si belle que je suis sortie pour la prendre en photo, encore une fois. Je note aussi ce titre que tu me donnes envie de découvrir. Merci, Brigitte, pour ce billet délicat.

  13. Marie Minoza dit :

    Je note ce livre qui doit illuminer l’âme du lecteur

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