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« Ô, combien perméables sont les frontières humaines !
Voyez tous ces nuages qui passent, impunément,
ces sables du désert filant d’un pays à l’autre,
ces cailloux des montagnes pénétrant chez l’ennemi
en d’insolents sursauts !
Est-il besoin de prendre un à un les oiseaux
qui volent ou qui se posent sur la barrière baissée ?
Ne serait-ce qu’un moineau, et voilà que déjà
sa queue est limitrophe, et son bec indigène.
Et puis, qu’est-ce qu’il gigote !
Parmi les innombrables insectes je m’en tiendrai à la fourmi
qui, entre le pied droit et le pied gauche du douanier,
ne se sent pas tenue d’avouer ses vadrouilles.
Oh, saisir d’un regard cette immense confusion,
sur tous les continents !
N’est-ce pas là le troène qui, de l’autre côté du fleuve
infiltre illégalement sa cent millième feuille ?
Et qui d’autre, pensez-vous, que la pieuvre aux longs bras
viole les sacro-saintes eaux territoriales ?
Comment peut-on parler de l’ordre dans tout cela,
s’il n’est même pas possible d’écarter les étoiles
pour que l’on sache enfin laquelle brille pour qui ?
Et que dire de l’insubordination du brouillard !
Et des poussières des steppes sur toute leur étendue,
comme si l’on n’avait pas tracé une ligne en son milieu !
Et ces voix qui résonnent sur les ondes serviables :
pépiements séducteurs et allusifs glouglous !
Seul ce qui est humain peut nous être étranger
Le reste c’est forêts mixtes, travail de sape et de vent. »
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Tout bouge, tout circule, tout se transforme,
c’est la vie, sous toutes ses facettes, qui s’exprime,
depuis la nuit des temps jusqu’à la nuit des temps.
Alors pourquoi et de quel droit
certains Hommes veulent-ils s’ériger en maîtres, blessant les uns ou les autres ?
La vie est belle de par sa respiration,
il nous faut nous abreuver auprès de sources claires et limpides,
celles qui chantent harmonieusement dans le cœur du monde…
Rien n’est plus doux que de suivre les méandres de l’existence,
l’observation du poète est là, c’est une parole libre,
une pensée inspirée, un flot irrépressible qui se fait lumière,
il vient à lui comme une évidence, il ne le cherche pas, il le trouve…
Suivons les poètes pour vivre ce printemps, vous venez ?
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Poème « Psaume » extrait de « De la mort Sans Exagérer »
– Wislawa Szymborska 1923-2012 –
Prix Nobel de littérature 1996.
Illustrations : 1/ « Ancien aqueduc romain » Ettore Roesler-Franz 1845-1907 2/ « Bol chinois, oiseau, figues et cerises » Giovanna Garzonni 1600-1670.
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Suivre les doux chemins de la poétique nature…
BVJ – Plumes d’Anges.
Une magnifique découverte que ce psaume ce matin, ainsi que de cet auteur. Soyons insubordonnés, donc.
magnifique ce chardonneret du 17e siècle 🙂
« Une mer qu’aucun bord n’arrête, s’étendait bleue à l’horizon » :
Voilà, chère Brigitte, ce vers de Lamartine qui me sert de talisman !
Il résonne si magnifiquement avec ton panorama poétique de ce matin
que je ne voudrais rien ajouter à ce tableau parfait pour ouvrir en grand…
les vies enfermées 🕊
En grande amitié !
Abolissons les frontières, les ghettos, les différences, les murs. Evitons les prisons mentales, les egos surpuissants………
Un psaume à chanter pour dire que la vie est belle!
il faut la préserver
J’ai écrit, et puis avec le code anti- spam, hélas, tout s’est envolé; je reprends juste qu’ici en ce jour, tout est neuf: le poète cité, les illustrations montrées. Tout est neuf mais tout est beau et cette douceur est accueillante et bienvenue.
oui nous allons sur les pas des poètes, qui ont toujours souligné l’indispensable harmonie qui devrait guider les pas de tout un chacun retrouver l’harmonie ? que de douceurs rebelles hors frontière ….
Le printemps des poètes est toujours un plaisir et ce psaume en particulier
J’aime aussi le vers de Lamartine, merci Fiorenza
Le printemps des poètes c’est un excellent moment pour en découvrir de nouveaux 🙂 D’un seul coup, je me demande quelle étoile brille pour moi ? Bonne semaine Brigitte.
Merci pour ce beau poème d’une poétesse polonaise Nobel de littérature, mais jamais lue, je l’avoue.
En ligne, j’ai trouvé ceci, pour te remercier.
« La poésie –
seulement qu’est-ce que ça peut bien être ?
Plus d’une réponse vacillante
fut donnée à cette question.
Et moi-même je ne sais pas, et je ne sais pas, et je m’y accroche
comme à une rampe salutaire. »
(CERTAINS AIMENT LA POÉSIE
PAR WISŁAWA SZYMBORSKA)
https://www.poemes.co/certains-aiment-la-poesie.html
Merci Brigitte pour ce poème qui nous rappelle avec tant de justesse et de talent que les frontières sont des créations humaines…bien artificielles…
Oui, je te suis, suivons les poètes ! Je t’embrasse et belle semaine !
je te suis pour le printemps des poètes Brigitte.
Superbe billet.
Bonne soirée
Psaume ravissant et inspirant. Comme la vie serait belle si le poème guidait nos esprits. Je crois que l’on pourrait ainsi nous comprendre quelle que soit la langue parlée…
Belle soirée, Brigitte.
Une libre pensée inspirée s’envole en un souffle créateur…
En mémoire : la juste mesure quant à son application…
Douce soirée chère Brigitte
Michèle
Quelle chance ont les animaux et les plantes…
Libres d’aller et de venir à leur guise…
Les hommes sont des fous d’oublier cela.
J’adore ce texte !
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Un bel article l’univers est notre seule frontière Bon week end Brigitte
Je viens avec grand plaisir !!
Accueillons, chantons, poétisons ce printemps qui commence !
Beau dimanche Plumes d’Anges, je t’embrasse.
Magnifique psaume, ah être le vent, la mer, on les suit avec bonheur !
Un beso de sol
Allons à la rencontre du printemps, remercions-le pour ce renouveau qui nous donne rendez-vous.
Des joies simples qui nous rendent plus heureux.