Réveil de l’éveil…

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« … Je suis entrée dans le salon de thé le 16 octobre de l’an dernier. Je consigne tout dans un carnet, comme une sorte d’almanach qui tient dans ma poche et dessine un rythme à ma vie et au peu d’évènements qui la ponctuent.  Je me serais souvenue de ce jour sans en avoir rien écrit. Mais je l’ai fait. Sous cette date, il est indiqué le nom du lieu : « Ukiyo » et j’ai glissé la carte de visite du salon de thé pour être certaine de le retrouver. Je sais maintenant que le mot Ukiyo n’existe pas dans mon langage, qu’il veut dire profiter de l’instant, hors du déroulement de la vie, comme une bulle de joie. Il ordonne de savourer le moment, détaché de nos préoccupations à venir et du poids de notre passé…

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… « Le bruit de la pluie

Mes pas qui rient aussi

 Réveiller le destin »…

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Je suis seule, si vous saviez. Plus il y a de gens autour de moi, plus je m’enfonce dans la certitude de ne pas appartenir à ce tout. J’ai besoin de vos mains sur ma peau, de guérir sous vos paumes chaudes et qu’enfin vous enleviez ce tissu qui nous sépare pour être complètement à vous et découvrir le gout de la vie douce. Je ne veux pas garder notre rencontre comme un bel objet que l’on range dans une boîte. J’ai fait cela toute mon existence et cette fois je veux vivre…

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De cette année où nous n’avons échangé que quelques mots. Vos mains ont parlé à mon corps qui, lui, répondait, je retiendrai que nous parlons tous la même langue mais que nous avons peur de nous écouter. « Qui entend l’arbre qui tombe dans la forêt ? » Je pense que si personne ne l’entend, tout le monde le sent tomber. Peu de gens veulent se soucier des arbres qui s’effondrent loin d’eux, et on refuse d’accepter que nos cœurs entendent tout. Que notre humanité est la somme de forêts décimées, et d’arbres qui tombent en nous, de sources qui bruissent et d’oiseaux et de cris de douleur et d’abeilles qui bourdonnent… »

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Alice, 50 ans, ancienne professeure de français,

a traversé la vie comme anesthésiée, sans jamais y trouver sa place.

Mère très jeune, elle a voyagé dans les livres et leurs histoires.

Un hasard heureux lui fait rencontrer un masseur japonais, Akifumi.

Les doigts délicats de celui-ci éveillent son corps, en fait remonter moult souvenirs,

les bons comme les mauvais,

ils lui donnent un élan, un souffle nouveau.

Portée par le désir, elle s’inscrit à un cours de japonais,

apprend sa langue et sa culture pour se rapprocher de lui.

Ce livre est la lettre magnifique qu’elle lui adresse,

lettre pleine de sensualité, de douceur et de poésie,

elle s’y raconte et le questionne avec respect et pudeur.

Se réveiller, s’éveiller,

sortir du carcan des peurs et des souvenirs malheureux,

décider d’être soi et oser le dire.

J’ai beaucoup aimé cette lecture, 

j’en parle pour que la vie circule sous nos doigts aussi,

en ces temps où le toucher semble proscrit…

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Extraits de : « Lettre d’amour sans le dire »  2020  Amanda Sthers.

Illustrations : 1/ « Femme sans vie » – Étude –  Bela Cikos Sesija  1864-1931   2/ « Temple de Nikko »  Robert Weir Allan  1851-1942.

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Faire circuler le souffle de la vie sous nos doigts…

BVJ – Plumes d’Anges.

21 commentaires sur “Réveil de l’éveil…”

  1. Tu as bien raison : le toucher est si important. Tenir une main, enlacer, embrasser, câliner et même s’asseoir tout près de quelqu’un, simplement. Je n’ai rien lu de cet auteur et j’aime bien l’idée de sortir de son carcan, quel que soit son âge.
    Bonne journée !

  2. Adrienne dit :

    beaux extraits, ça a l’air intéressant!
    (ah pouvoir de nouveau toucher quelqu’un!)
    Bonne journée!

  3. Dédé dit :

    Bonjour. Enthousiaste à la lecture de ces quelques extraits. Il est vrai qu’aujourd’hui, le toucher est mis à mal. Je me rends compte avec effarement que je n’ai pas de bisou à ma maman depuis le mois de mars de l’année passée et cela me donne soudain le vertige. Je vais me procurer ce livre dont le titre déjà, est plein de promesse. Dire l’amour… sans le dire. Tout un programme. Bises alpines.

  4. Anne dit :

    Oh oh, tu me ferais connaître un livre de plus? Cela semble doux, doux- amer un peu……….
    Tu sais, au fin fond du Périgord, dans un petit village près de chez moi, parfois, je croise…un japonais; sûrement le seul japonais à des KLMS à la ronde. Il a un certain âge, il est marié à une française…Mais les fantasmes sur lui sont nombreux. J’ai appris qu’il avait été professeur d’arts martiaux…que toutes ses élèves avaient été folles de lui. On n’en sait pas plus; le mystère….
    Son regard en coulisse (les yeux bridés!) ses manières douces, différentes et polies…………Alors, je peux imaginer celle qui écrit la lettre. « L’ailleurs », le toucher effectivement hors de mise. L’imagination nous fait vivre.
    Merci, Brigitte!

  5. Anne dit :

    PS: je suis allée lire les commentaires sur A…..Très contrastés. ET toi, tu as aimé vraiment ces pages?

  6. Dominique dit :

    une belle façon de dire l’amour, la sensualité je vais noté pour le japon que j’aime énormément pour ses peintres, sa poésie un peu moins pour ses samouraÏs

  7. thé ache dit :

    le corps est une mémoire, mais il n’est pas toujours aisé de lire et dire ce qu’il suggère ou recèle, le temps social et politique (religieux) impose sa lecture qui peut interdire ?

  8. Anne dit :

    PS2: Brigitte, je t’ai toujours écoutée, j’ai trouvé le livre chez Momox. Mais j’en lis un pas mal du tout et de circonstance (La peste à florence…) donc la lecture attendra.
    Merci une fois encore pour tes propositions!

  9. Aifelle dit :

    Une auteure vers qui je n’irais pas spontanément, mais les extraits sont beaux. Le toucher c’est tellement important quand il est respectueux, c’est un autre langage que nous avons un peu trop oublié dans nos sociétés occidentales. Bises Brigitte.

  10. J’ai vu Amanda Sthers présenter son livre à LGL, et je m’étais promis de le lire. J’ai zappé…là, je note !
    Merci Brigitte, avec tes illustrations parfaitement adaptées, c’est un bonheur cette page de lecture !
    Je t’embrasse, Claudie.

  11. eMmA MessanA dit :

    J’ai beaucoup aimé ce livre tout en nuances et en élégance. En plus, je suis de plus en plus attirée par le Japon qui me semble être une terre et une culture de délicatesse.
    Cela faisait longtemps que je voulais lire cette auteure, je vais donc tâcher de lire d’autres de ses écrits.
    Merci Brigitte pour cette jolie page.
    Bonne soirée.

  12. Colo dit :

    Un hasard si heureux qui a su éveiller son corps et son esprit!
    Lex traits que tu as choisis son très beaux, sensuels.
    De quoi éveiller nos sens un peu étourdis depuis un temps ?
    La peinture du temple de Nikko est superbe, merci Brigitte, bonne semaine, un beso

  13. Tania dit :

    J’avais entendu parler de ce livre et déjà ton billet fait du bien, nous manquons tellement de contacts physiques en cette période de distances prudentes.
    De la « femme sans vie » à cet arbre tout mousseux de vie, encore un billet magnifiquement illustré. Merci, Brigitte.

  14. Marie Minoza dit :

    « se réveiller, s’éveiller,

    sortir du carcan des peurs et des souvenirs malheureux,

    décider d’être soi et oser le dire. »

    tu donnes envie de lire ce livre
    Merci

  15. Un extrait qui donne envie, d’aller plus loin, de toucher ou d’être touché, de caresses, de gestes de mains… Tout ce dont dont on est privé ! Belle journée à vous.

  16. daniel dit :

    Le contact, les caresses sont une façon de communiquer importante ! On peut exprimer tant de choses avec les mains….On peut donner et on peut recevoir ! Les mains sont des transmetteurs d’énergie !

  17. Célestine dit :

    Dès les premières lignes, j’ai senti le vent du japon a travers les mots…
    Et cette merveilleuse libération de l’âme et du corps, celle que donne l’amour.
    Merci pour ces beaux extraits ma Plume
    •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

  18. Bonjour Brigitte,
    Ce livre donne envie. Je ne connais pas cette auteure.
    Merci à toi de me redonner l’envie de lire tout simplement.
    Je t’embrasse et te souhaite une belle fin de semaine

  19. Ulysse dit :

    Nous n’entendons pas les forêts tomber et brûler mais pourtant bientôt nous en mourrons !Bon week end Brigitte

  20. Florinette dit :

    C’est beau ! Beaucoup d’émotions peuvent ressurgir sous le toucher, que ce soit comme ici lors d’un massage ou alors lors d’une étreinte. C’est important que l’on puisse exprimer cette attention à l’autre par les gestes. À ce sujet, j’aime beaucoup ce que dit la psychologue clinicienne, docteur en psychopathologie Ariane Bilheran que je te retransmets ici :

    « Il y a une attaque sans précédent contre la tendresse humaine, et ça c’est quand même très important, car la tendresse, c’est quoi ? C’est le fait de faire passer son amour dans des gestes. Et donc, cette attaque contre la tendresse humaine me paraît grave. C’est une vie déshumanisée que l’on nous oblige à vivre. »

    Beau dimanche Plumes d’Anges, je t’embrasse

  21. angedra dit :

    Ressentir les mains de l’autre, les bises des enfants, un simple contact de peau, tout cela nous manque et espérons que nous pourrons nous réveiller de ce cauchemar .

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