Expérience intérieure…

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« … On marche sur terre mais on marche aussi sous le ciel, l’un ne va pas sans l’autre. Le marcheur, à la manière d’un artiste, recompose le monde – défait sous les coups d’une exploration abstraite et d’une exploitation intéressée – en découvrant à nouveau la terre et le ciel. Le soleil éclaire la route de celui qui va et qui redoute plus que tout la nuit et le brouillard. L’absence de visibilité le condamne en effet à l’angoisse, au péril et souvent à l’immobilisme. Comment savoir où l’on est et où l’on va si nous ne voyons rien ? Le soleil indique l’orient et dévoile la nature : le marcheur peut poursuivre sa route et jouir à la fois de la beauté du paysage et du point de l’horizon.

Sans étoiles qui diffusent une lumière et qui marquent l’espace d’un repaire, le corps est en arrêt, figé dans la peur et l’incompréhension. Désorienté, absorbé par une enveloppe de néant, l’individu attend ou panique, ne sachant comment sortir de cette impasse. Il a perdu de vue l’astre capable de le guider, il ne sait que faire, ni vers où aller.

Peut-être sommes-nous parfois saisis dans l’existence par de semblables impressions et ne savons-nous alors ni quoi faire de notre vie, ni vers quoi l’orienter ? Dans une telle situation, la marche s’avère un exercice profitable car elle rétablit physiquement et concrètement cet ordre qui manque cruellement à nos vies. Nous sortons et nous trouvons la lumière toujours là, l’horizon bien dessiné ; nous faisons quelques pas, nous voilà partis en promenade. Renouvelé le plus souvent possible, ce rendez-vous avec la lumière et l’horizon fortifie le sentiment d’être à sa place dans le monde. Notre corps s’inscrit clairement dans le réel, redonnant confiance à l’esprit à travers cette expérience vécue. On aurait tort de négliger la réalité et l’évidence de cette observation et on aurait davantage tort de se priver d’une telle ressource pour se replacer, corps et esprit, sur la voie du désir… »

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Extrait de : « Petite philosophie du marcheur » 2007  Christophe Lamoure.

Tableaux : 1/« Arbres » Christian Ernst Bernhard Morgenstern 1805-1867  2/« Les chataigniers à Osny » Camille Pissarro 1830-1903.

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Marcher, retrouver son chemin intérieur…

BVJ – Plumes d’Anges

7 commentaires sur “Expérience intérieure…”

  1. Manée dit :

    Même au bout du monde, les plus grands voyages sont intérieurs – toute marche peut devenir spirituelle !
    Quant à moi, je reviens de très belles promenades dans l’Aveyron …
    Bises matinales ma grande 🙂

  2. Phène dit :

    Oui, tout repos est bénéfique avant d’entamer une progression supérieure… Belle semaine, chère Brigitte

  3. Dominique dit :

    Tu touches juste aujourd’hui où je suis un peu énervé après certains livres, les livres qui incitent à la marche qui en retire la substantifique moelle, ceux là seront toujours les bienvenus sur mes étagères et en relire ici des passages est un plaisir renouvelé

  4. telos dit :

    la brume et la pluie moi j’aime..quant à l’horizon, je marche souvent sans car je suis dans les chemins creux ou en forêt. le chemin s’enroule comme un cocon, le seul horizon la lucarne au fond au loin comme un puits de lumière, une porte que l’on ne franchit jamais ou presque..dans la nature, je cesse de penser au bout d’une heure environ, je suis la branche, je suis la feuille. l’harmonie monte en moi et décline mon appartenance à la terre comme un animal sans rien d’autre…je m’emplis, là, seule. il n’y a guère d’horizon dans mes photos. dans ma vie non plus, je suis sans attente, sans recherche, sans rêve. c’est bien, je suis juste, là , où je pose mes pas..
    parfois les aléas me font buter et je me mets à cogiter et là je ne m’aime pas..le chemin, seule, nous mène à nous mêmes, il m’apprend l’humilité.
    un peu long mon com, je ne parle guère en com mais ce sujet, je le vis si souvent.
    bonne journée

  5. naline dit :

    Un thème qui ressemble à celui du billet que j’ai publié aujourd’hui également.
    Marcher, c’est pour moi un réel bonheur. Un remède aussi quand cela va moins bien. C’est alors que je me sens vraiment vivante !

  6. Daniel dit :

    Marcher dans le silence et en contact étroit avec la nature….Moi j’aime. Je me régénère et tout va mieux. J’ai l’impression que la nature me parle et ma’ide pour la suite du chemin.

  7. Christiane dit :

    Et voilà que cette lecture me donne une farouche envie de partir me promener!!!
    Mais oui, c’est exactement cela.

    Connais-tu ce petit texte de Kenneth White?*

    évoqué ici:

    *http://terreindienne.blogspot.fr/2012/09/aurigeno.html#comment-form

    Bises et comme toujours, merci …

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