Vibration…

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« … Les noms qui parcouraient naguère la forêt, qui frissonnaient dans les brindilles, qui glissaient dans le vent d’une cime à l’autre, qui coulaient sous terre dans les galeries obscures, les noms qui parlaient par la bouche de chaque puits, on ne les entend plus. Les hommes silencieux ont percé leur propre cœur ; alors le cœur s’est arrêté de battre et le sommeil très long a pris la terre. Les hommes se sont endormis, ils ont fermé leurs yeux, et ils se sont quittés. Mais en entrant tous ensemble dans le sommeil, ils entraient dans un rêve interminable…

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… Ailleurs, alentour, le monde ne s’écroule pas, ne pourrit pas. Il n’existe pas tout simplement. Il est en transit, somme de gestes, d’actes, d’argent, pour rien…

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… Le combat des hommes n’étaient pas pour gagner quelques arpents de terre, mais pour sauver la parole vraie…

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… Au centre de la forêt, la voix ne cesse pas de parler. Elle parle sans bouger les lèvres… Ici le regard s’éclaire, il brille comme le soleil, il vibre comme le cœur. Le regard sait voir ce qui va venir. Chaque homme est un prophète qui voit avec tout son corps, avec son visage, ses mains, sa poitrine. C’est la souffrance qui ouvre sa vue, la grande sècheresse, la longue attente. Mais la souffrance ne peut pas durer. Maintenant la terre vibre comme au lever du soleil, immobile et calme, puissante, nouvelle… « 

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Extraits de : « Trois villes saintes » 1980  Jean-Marie Gustave Le Clézio.

Illustrations : 1/« Mappemonde en forme de cœur » Oronce Fine 1494-1555 2/« Pavots »  John William Godward 1861-1922.

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La vibration du cœur peut ouvrir un nouveau chapitre de l’histoire du monde …

BVJ – Plumes d’Anges.

6 commentaires sur “Vibration…”

  1. Dominique dit :

    Cette mappemonde est magnifique et réjouissante elle porte un message à elle seule
    Je ne connaissais pas ce texte de Le Clézio et c’est un manque manifeste

  2. Phène dit :

    Très joli.
    J’entends là le coeur du monde qui palpite, sereinement. Merveille… Bises et beau lundi, chère Brigitte

  3.  » Tu trouveras bien plus dans la forêt que dans les livres.  »

    Très belles illustrations, l’étude des pavots m’inspirent beaucoup.

    Une belle journée à Toi, Brigitte, ici, à Martigues, le soleil est revenu !

  4. Lily dit :

    J’ai lu trois livres de Le Clézio (La quarantaine, Le chercheur d’or, Etoile errante) et j’ai aimé sa grande sensibilité et la beauté de son écriture. Que la nature nous parle, c’est évident, encore faut-il prendre le temps d’écouter …

  5. Poussy dit :

    Une amie, à qui je demandais quel serait pour elle un moment idéal, m’avait répondu : »Lire Le Clézio en buvant du champagne et en écoutant Mozart »!
    Devant ces mots de Le Clézio, comme je la comprends! Je vais faire comme elle je crois, et laisser entrer le plus grand que soi par ces merveilleuses brèches.
    Qu’ajouterais-tu toi Brigitte, en plus de la contemplation de cette mappemonde-coeur?

    Je t’embrasse fort

  6. naline dit :

    Ah, ce monde qui vibre. J’aime particulièrement les vibrations de ces jolis pavots !
    Belle soirée !

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