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« … Tu as l’impression que ta vie présente n’est pas celle que tes parents voulaient pour toi ? a-t-elle demandé, comme si elle l’avait compris à demi-mot.
– C’est ça… Du coup, je me déçois moi-même. Je crois que je suis trop immature pour vivre de façon indépendante.
– Tu voulais ne dépendre de personne ?
– C’était un vague rêve d’enfant. Je ne sais pas pourquoi, mais je n’ai jamais voulu avoir un travail précis. Être médecin ou avocat, très peu pour moi. Je n’ai jamais voulu réussir ni être célèbre. Je voulais mener une vie tranquille, c’est tout. Je voulais qu’on reconnaisse ma valeur en tant que telle. D’où mon vague rêve d’exister de façon autonome.
– C’est vraiment beau un rêve pareil.
– Pas du tout, je pense qu’à l’époque je ne savais pas rêver.
Yeong-ju a pianoté sur la bouteille ; il s’est appuyé contre le dossier de sa chaise.
– Moi je rêvais d’ouvrir une librairie.
– Alors tu as réalisé ton rêve.
– Ce n’est pas faux, pourtant ce n’est pas l’impression que j’ai. Et je ne sais pas pourquoi…
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… Pour que l’harmonie soit belle en musique, elle doit être précédée d’une dissonance. Ainsi en musique, harmonie et dissonance doivent coexister. Et la vie est comme la musique. La vie est belle parce que la dissonance précède l’harmonie…
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… – Il y a une chose que l’on apprend au cours de ses lectures, c’est que tous les auteurs sans exception sont tombés dans un puits, au moins une fois dans leur vie. Certains viennent tout juste d’en sortir, alors que d’autres en ont émergé depuis longtemps. Et tous nous disent : je suis sûr d’y retomber.
– Et pourquoi devrais-je écouter ces histoires de personnes tombées dans un puits ? Ça ne me concerne pas, a dit Min-cheol, le visage indéchiffrable.
– Et bien… c’est très simple. Le seul fait de savoir que je ne suis pas seule à souffrir me rend plus forte. Tiens, lui-aussi, il a des problèmes ? Ma souffrance est toujours là, mais elle s’allège plus ou moins. Je suis convaincue qu’il n’existe personne qui ne soit jamais tombé dans un puits.
Elle eu un petit sourire.
Minc-cheol l’écoutait, l’air assez grave.
– Et là, me vient l’idée de sortir de cet état d’impuissance. Alors je me relève. Et, ça alors, je me rends compte que le puits n’était pas profond du tout. Je sens une brise légère qui souffle vers ma droite, selon un angle de trente-cinq degrés. Je me dis soudain que j’ai de la chance d’être en vie. Parce que le vent me fait vraiment du bien… »
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C’est l’histoire d’un rêve réalisé : devenir libraire…
Yeong-ju quitte son emploi, la pression et le rythme du travail ne lui conviennent plus, elle est épuisée. Elle choisit d’installer sa librairie dans un quartier excentré de Séoul – elle ressent bien le lieu – et propose à ses clients des livres bien-sûr mais aussi du très bon café. De petites tables sont installées, on peut venir feuilleter, acheter ou déguster. Pendant les six premiers mois de sa nouvelle activité, elle est d’humeur taciturne, elle réfléchit silencieusement, lit beaucoup, établit des fiches de lecture qu’elle glisse dans les ouvrages, anime un blog.
Elle se rend compte que le poids qu’elle a sur les épaules est à nouveau trop important. Elle engage Min-jun, un barista, lui donne un bon salaire, pour une période de deux ans : il se prend au jeu et cherche à transformer sa fonction, chaque jour son café sera meilleur et plus subtil grâce à des mélanges improbables. Elle organise des rencontres avec des auteurs, elle suit son cœur, élabore des listes de questions pertinentes, anime des discussions avec des lecteurs sur des sujets à thème…
Des habitués peuplent quotidiennement le lieu et de nouveaux clients accourent. Elle transforme sa librairie en un lieu d’échange plein d’humanité, les questions affluent et des réponses sont proposées avec un infini respect, chacun appréciant l’intensité du moment présent. Des bribes du passé font surface , on en sait un peu plus sur les personnages, l’histoire se peint toujours par petites touches…
C’est un premier roman pour cette jeune auteure, un roman bienveillant et paisible, je l’ai de plus en plus apprécié au fil des pages, si vous avez besoin de douceur, partez à sa rencontre, il vous fera du bien…
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Extraits de : « Bienvenue à la librairie Hyunam » 2022 Hwang Bo-reum.
Illustrations : 1/« Étagères avec livres et objets » attribuée à Giuseppe Castiglione 1688-1766 2/« Nature morte avec oiseau en cage, livres, café… » Johann Rudolph Feyerabend 1779-1814.
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Avoir confiance en nos capacités…
BVJ – Plumes d’Anges.
Tout dans ton résumé me séduit, et je suis convaincue que ce livre devrait me plaire. Il me rappelle mon rêve, que j’ai réalisé non pas en ouvrant une librairie en raison des loyers commerciaux élevés, mais en fondant mon association qui me permet d’organiser des conférences et des rencontres avec des auteurs 😉
Je te souhaite une belle fin de journée, Plumes d’Anges, je t’embrasse
Coucou. C’est drôle… je suis dans une tempête professionnelle actuellement et je me pose un tas de questions sur la suite. Continuer dans la même voie professionnelle ou faire tout autre chose? et autre chose, mais quoi? J’ai toujours voulu avoir ma propre librairie, y organiser des expositions, des concerts, des débats, des rencontres… Car dans le milieu dans lequel je travaille actuellement, le social, on ne rencontre plus… un comble… Bises alpines.
A retenir: » Je me dis soudain que j’ai de la chance d’être en vie. Parce que le vent me fait vraiment du bien… » c’est peut-être la clef pour vivre heureux et sans regret
une librairie : j’en ai fréquenté et je fréquente toujours, il fut un temps (plusieurs années) où j’aidais le libraire à écrire à propos des livres, d’abord sur papier… et je continue (en lisant des polars) membre d’un jury, le livre les livres ? en faire sa profession ? cela reste une question à part entière maintenant que je suis retraité comme on dit ?
J’ai croisé ce livre mais je n’ai pas prêté assez d’attention, grâce à toi je vais y revenir
quelqu’un qui veut ouvrir une librairie ne peut pas me laisser insensible évidement
La librairie « Le millefeuille » que j’avais imaginée avec une grande amie,
il y a 40 ans…n’a jamais été concrétisée mais elle trouva un prolongement
lorsque j’eus le plaisir de fonder la bibliothèque municipale
de ma petite cité.
Cette dernière poursuit son chemin avec vivacité,
les lecteurs y sont très nombreux et samedi, en jardinant
au bord de la rue, nombre d’entre eux m’ont montré leurs « cueillettes »…
Il faut rêver sa vie écrivait Marcel Proust, les livres en sont
les meilleurs alliés et « les puits ne sont jamais aussi profonds que cela » :
Belle semaine, chère Brigitte, amie des livres et amie tout court 💝
Contente de te retrouver avec ce livre tout doux et qui fait du bien…J’aime beaucoup les livres qui se passent dans le milieu des livres justement et il devrait me plaire. Tes extraits choisis sont superbes et cette phrase « Et la vie est comme la musique. La vie est belle parce que la dissonance précède l’harmonie… » me parle bien aujourd’hui. Merci pour ton enthousiasme
Tenir une librairie a toujours fait partie de mes rêves et la compagnie des livres de ma réalité quotidienne.
« Je me dis soudain que j’ai de la chance d’être en vie. » Le lire, se le dire et le ressentir…
Bonne soirée, Brigitte.
je note, merci de ce partage
très bon choix d’illustrations
bonne soirée Brigitte
Merci pour ton choix du coeur.
Quelles belles illustrations…
Il m’aurait bien lu d’être libraire ou bibliothécaire. J’aime tellement les livres…
Je me sens comme un poisson dans l’eau quand je suis entourée de livres.
Bonne semaine Brigitte
Amicalement
C’est drôle, si je n’avais pas réalisé mon rêve de devenir maîtresse d’école, j’aurais aimé être libraire.
Une libraire un peu comme Yeong-Ju
J’ai vraiment envie de lire ce livre…
Merci pour ce moment de douceur
•.¸¸.•*`*•.¸¸☆
Pour une fois j’ai lu le livre dont tu parles…et j’ai adoré. Tu as raison, sa lecture fait du bien.
merci aussi pour ces belles illustrations. Un beso frisquet aujourd’hui.
Réaliser son rêve n’est pas seulement l’atteindre…il mérite d’être entretenu, nourri… Mais nous sommes tous sujets à tomber dans ce fameux puits et à nous perdre dans son obscurité… Un peu d’aide est alors la bienvenue pour retrouver l’étincelle de l’enthousiasme et la foi du tout début.
Faire sens en créant du lien.
Voilà une lecture que je vais mettre de coté pour mes prochains congés. Merci pour la découverte 🙂
Ton billet et le commentaire de Colo, deux excellentes raisons de me pencher sur ce livre. Il y a beaucoup de romans de ce genre en ce moment, mais pas tous de même qualité. En tout cas, ils ne peuvent qu’attirer les lectrices dans notre genre. Je note bien sûr, pour un moment de douceur ; j’aimerais avoir une librairie comme celle-ci dans mon quartier. Bonne journée Brigitte, bises.
Rêver c’est bien. Réaliser, c’est mieux !
Oui Brigitte nous avons tous besoin d’un moment de douceur dans ce monde qui devient fou ! Belle semaine à toi